Lutte des sucs : trois personnes placées en garde à vue

Par JPo, N.De jeu 06/10/2022 - 06:00 , Mise à jour le 06/10/2022 à 06:00

Une trentaine de militants du collectif de la Lutte des sucs se sont rassemblés ce mercredi 5 octobre en début d'après-midi au lieu-dit "Rabuzac", commune de Saint-Etienne-Lardeyrol. Malgré l'action totalement pacifique, trois personnes ont été placées en garde à vue dont le Conseiller régional Écologiste Renaud Daumas.

 

Trois militants de la Lutte des Sucs sont, ce mercredi 5 octobre, en garde à vue dans différentes gendarmeries de Haute-Loire pour y passer la nuit. Les causes de leurs méfaits seraient d'avoir participé sans violence aucune à une opération d'entrave à l'avancée des pelleteuses sur le chantier de la déviation St-Hostien/Le Pertuis dans le lieu-dit Rabuzac à Saint-Etienne-Lardeyrol.

Renaud Daumas, agriculteur, élu écologiste au Conseil Régional Auvergne-Rhône-Alpes

Vers 16 heures, une vingtaine de gendarmes, dont une dizaine appartenant au peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG) sont intervenus sur les lieux. Après avoir immobilisé les personnes présentes sur le site et relevé leur identité, les gendarmes ont placé en garde à vue Renaud Daumas, agriculteur, élu écologiste au Conseil Régional Auvergne-Rhône-Alpes et deux autres personnes souhaitant l'anonymat.

"Je suis impressionné par le nombre de gendarmes alors que tout était pacifique"

D’après Ben, un opposant présent sur place au moment de l'interpellation, "ils cherchent à intimider les militants. Je suis impressionné par le nombre de gendarmes alors que tout était pacifique. Planter des patates sur des terres appartenant à l'Etat, c'était aussi illégal et pourtant ils ont laissé faire. On place des personnes en garde à vue, alors qu'on ne s'occupe pas du dépôt de plainte d'une dame au Vernet, propriétaire d'un terrain qui a été saccagé par les travaux et sur lequel plusieurs arbres ont été coupés. C'est grotesque".

Selon Thierry Mialon, membre de l'association "Oui à la 2 fois 2 voies route 88", des dégradations auraient été perpétrées contre des engins forestiers présents sur les travaux de la déviation St-Hostien/Le Pertuis

Suspension des droits civiques, civils et de famille

Un communiqué de la Préfecture a justifié l’intervention en indiquant le soir-même que le délit d'entrave au travail est une infraction punie d'un an à trois ans d'emprisonnement et de 15 000 à 45 000 euros d'amende. Les personnes physiques coupables de cette infraction peuvent également être suspendues de leurs droits civiques, civils et de famille et se voir interdire d'exercer d'une fonction publique.

Toujours selon le communiqué : "Le préfet apporte son soutien aux employés et aux entreprises qui ont été impactés par cette action et remercie les forces de gendarmerie pour leur action rapide et efficace. Trois personnes ont été immédiatement interpellées et l’enquête judiciaire se poursuit dans le but d’identifier les autres auteurs".

Mobilisation organisée

La Lutte des sucs, FNE, le Groupe "En vert et pour tous, Le Puy en commun", les écologistes Région Aura et bien d'autres appellent à un rassemblement ce jeudi 6 octobre à 10 heures devant la Préfecture de la Haute-Loire.

"Nécessité d'une réaction forte et médiatisée"

"Nous appelons les réseaux militants à être solidaires de la Lutte Des Sucs Collectif et appelons à ce que les militants soient relâchés, partage une militante sur les réseaux sociaux".

Elle livre encore : "Si comparution immédiate, nécessité d'une réaction forte et médiatisée pour dénoncer les réactions indignes de la Préfecture et des forces de l'ordre qui empêchent le droit de manifester et de dénoncer un écocide !"

"C'est le terrain de jeu de mes deux garçons" 

"Cette chibotte, c'est tous les souvenirs d'enfance de mon homme. Elle appartenait à sa famille jusqu'à ce qu'on soit exproprié. C'est le terrain de jeu de mes deux garçons et de leurs cousins."

Mélanie est la femme de Xavier, l'un des 29 agriculteurs expropriés "pour cause d'utilité publique". Son habitation ainsi que l'ensemble de son exploitation ne disposent pas de l'eau courante, issue du réseau de ville. Elles sont alimentées par une source captée par les aïeux de l'exploitant. Cette source sera coupée du fait de l'artificialisation de la zone et des travaux à venir : "On avait une source énorme d'eau, ils vont nous la bétonner et on n'aura plus d'eau. Le préfet nous avait promis des réponses mais on attend toujours".

"On souffre trop dans notre famille. Ça peut plus durer"

Quand Mélanie a vu, en début de semaine, une immense pelleteuse poser ses crocs d'acier sur le haut de son ancien terrain, à coté de la cabane de pierre, ses plaies se sont rouvertes et son angoisse s'est réveillée : "J'ai vu arriver la grue en rentrant du boulot l'autre soir, et je me suis dit ça y est, maintenant c'est vraiment fini. Ici c'était un petit coin de paradis. Avant, quand on ouvrait les volets, le matin, on voyait des chevreuils et des renards. Depuis qu'ils ont coupé tous les arbres, y'a plus rien. Mon beau-père, quand ils lui ont coupé ses arbres, il en a fait un AVC. On souffre trop dans notre famille. Ça peut plus durer".

Mélanie nous montre du doigt l'emplacement de sa chibotte Photo par JFP

"Je sais pourquoi je suis là, et pourquoi je me bats"

"Le seul moyen qu'on a à notre disposition, c'est de les bloquer pacifiquement"

"Ça  me brise le cœur de voir Mélanie dans cet état" nous confie une des militantes présentes sur place,"mais en même temps, je sais pourquoi je suis là et pourquoi je me bats". 

Depuis quelques jours, les militants se relaient sur le terrain pour effectuer une veille et guetter toute reprise des travaux : "l'Etat et la Région cherchent à gagner du temps en ralentissant la décision de  justice à venir, explique un autre militant. Du coup, nous aussi on cherche à gagner du temps sur la reprise des travaux, et le seul moyen qu'on a à notre disposition, c'est de les bloquer pacifiquement. C'est notre responsabilité de citoyens".

"Nous vivons en ce moment une crise alimentaire inédite et majeure et ici, on s'apprête à détruire 80 hectares de terres nourricières. C'est une honte"

"On continue à détruire la nature alors que le vivant n'a jamais été autant sous pression"

Pour Renaud Daumas, Conseiller régional des Verts, "les militants sont quotidiennement présents sur les lieux, pour s'assurer qu'aucune irrégularité ne soit commise, comme cela avait été le cas lors de la première phase des travaux.On vérifie notamment qu'un écologue soit là pour veiller à la résilience des écosystèmes".

Il ajoute : "Sur le fond du dossier, on continue à penser que ce projet est totalement en décalage par rapport à la situation actuelle. On continue à détruire la nature alors que le vivant n'a jamais été autant sous pression. Nous vivons en ce moment une crise alimentaire inédite et majeure et ici, on s'apprête à détruire 80 hectares de terres nourricières. C'est une honte".

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13 commentaires

CO

jeu 06/10/2022 - 19:00

Quand une antenne relais est saboté devant journalistes, forces de police et syndicats, par un agriculteur non content des décisions judiciaires, aucune garde à vue. Pourtant l'affaire a été tout aussi médiatisée et la dégradation constatée et revendiquée. M. Daumas a le tort de faire du bio et non de l'intensif-chimique. C'est un dangereux terre-oriste.

st

jeu 06/10/2022 - 17:09

Lorsque je lis certains commentaires je prends peurs.certains d entre vous se prennent pour des justiciers...des visionnaires...des je sais tout sur tout... oups pardon il y a une chose qu ils ne savent pas c est de respecter les lois de la République. Après ce que je leur propose si nos lois et le respect de celles ci ne leur convient pas il y a Mr Poutine qui accueille aujourd'hui 

CO

jeu 06/10/2022 - 13:21

On peut avoir des opinions différentes et en débattre, mais il est inadmissible de colporter des fausses rumeurs. Aucun engin de chantier n`a été dégradé, n`en déplaise à M. Mialon et sa mauvaise foi. Par contre, pas de nouvelle de la plainte d`un propriétaire dont les arbres ont été coupés par `erreur`. Curieusement, personne en garde à vue.

le

jeu 06/10/2022 - 12:25

Si l'on se rappelle bien le barrage de Serre de Lafarre n'a pas été fait grâce aux militants qui se sont opposés pacifiquement aux premiers travaux. Et il y a pléthore d'exemples en France où le laisser faire a conduit à la conduite de travaux mêmes s'ils fussent illégaux par la suite. Pour ce qui est des problèmes plus généraux le changement ne vient jamais d'en haut bien au contraire. Alors nous savons ce qu'il nous reste à faire si l'on veut avancer.

ga

jeu 06/10/2022 - 11:44

Occuper des terrains dont on n' est pas propriétaire tombe sous le coup de la loi : normal que la police intervienne, on est dans un état de droits !

se

jeu 06/10/2022 - 11:16

L : Ces personnes se croient tout permis aussi pas de "cadeau" dans les sanctions. Les gens (entreprises) qui y travaillent font tout simplement leur travail. Cette déviation est nécessaire pour globalement la sécurité sur les routes. Ras le bol de ces écolos qui n'en ont que le nom, sans doute des gens qui n'ont rien à faire et qui s'ennuient

ri

jeu 06/10/2022 - 10:05

Total soutien à tous ceux  - trop rares ! - qui se battent pour laisser une planète vivable à nos enfants. Rappelons que les scientifiques annoncent une dégradation brutale des conditions de vie sur Terre dans les années à venir (et les derniers événements climatiques leur donnent raison). Ce projet totalement ringard (typique de la Haute-Loire, département ultra-complexé !), à contre-sens total de l'histoire, est un écocide. Vivement les canicules à 50°C pour que tout le monde le comprenne, quand ces routes se liquéfieront sous l'effet de la chaleur et qu'il n'y aura plus rien à manger puisque nous vivons sous perfusion des camions !

po

jeu 06/10/2022 - 09:53

Comme pour le contournement Ouest de Strasbourg, les recours en justice des opposants aboutiront ici, très logiquement, à leur donner raison. Mais pendant ce temps le chantier n'est pas suspendu et ses promoteurs comptent sur les lenteurs de la Justice pour mettre tout le monde, une fois de plus, devant le fait accompli.

Alors, que faire face à tant d'absurdité et... d'injustice ? Bloquer l'avancé des destructions devient légitime.

an

jeu 06/10/2022 - 08:17

Si tout les activistes avaient laissé faire , notre planète serait dans un état encore pire aujourd'hui !! Heureusement que certains se bougent pour défendre des causes juste qu'elles soient écologique, social, environnemental  ... On foncent droit dans le mur et certains essaient  d' empêcher ceux qui freinent ce désastre annoncé en voulant l'accélérer!!  

ru

jeu 06/10/2022 - 07:30

Le rassemblement de soutien aux 3 personnes en garde à vue est ce matin, jeudi 6 octobre à 10h devant la préfecture

st

jeu 06/10/2022 - 07:16

Manifester est un droit encadré par des devoirs mais ce mot échappe à ces personnes. Madame la vie est faite de souvenirs et de deuil comme celui de perdre un parent sur des routes plus conformes à notre usage. Allez demander aux habitants d Yssingeaux de Saint Maurice de Monistrol et surtout de BLAVOZY si aujourd'hui avec la déviation leur vie n est pas plus agréable. 

po

jeu 06/10/2022 - 06:59

Nouvelle entrave à la liberté de manifester !

Ce chantier est illégal, illégitime et inutile !

th

jeu 06/10/2022 - 06:40

Mouvement pacifiste cite le journaliste et on apprend que ces activistes ont occasionné de gros dégâts sur des engins de chantier quelques jours avant aussi devant cette guérilla le préfet a raison d'employer la manière forte.