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Haute-Loire : le retour du vautour

, Mise à jour le 27/11/2020 à 09:08

Plusieurs cas ont été recensés au cours du mois de juin dernier faisant état d'attaques de vautours, la plus spectaculaire concernant une éleveuse de Saugues, mais aussi à Thoras. Une première réunion avait eu lieu entre le préfet de Haute-Loire de l'époque, Nicolas De Maistre, et le syndicat des exploitants agricoles début juillet. L'espèce étant protégée, aucun compromis n'avait été trouvé. Une nouvelle réunion est prévue le 30 septembre en préfecture de Lozère autour d'un comité vautours.
Interrogé au micro de Zoomdici lors de sa rencontre avec le monde agricole, le nouveau préfet Eric Etienne s'était voulu plutôt rassurant. Il a bien conscience que sur ce dossier épineux, une réponse est attendue.

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Selon l'élu, il y avait "une dizaine de vautours" et "du sang sur 70 mètres de long"
Lors de sa rencontre avec le monde agricole, le nouveau préfet Eric Etienne a été alerté de "nombreuses attaques de vautours" en Haute-Loire. Selon notamment le sénateur Laurent Duplomb, les vautours avaient tué une vache aux Estables quelques jours plus tôt. Pour conforter cette information, nous avons appelé le maire des Estables, Philippe Brun, qui confirme : "les vautours ont mangé la matrice d'une vache", matrice qu'elle avait expulsée après le velage. Les vautours ont fini le travail (avant ou après sa mort, on ne le sait pas) et le veau, abandonné à lui même, n'a pas survécu. Il a également fini dans l'estomac des rapaces.
Selon l'élu, il y avait "une dizaine de vautours" et "du sang sur 70 mètres de long". Le maire ajoute qu'il y a deux ans déjà, une trentaine de vautours auraient dépecé un poulain mort et "en 2016, sur mon exploitation, ils ont mangé une dizaine de poulets morts". Un témoignage recueilli le 4 septembre mais à cet instant, les services préfectoraux n'étaient absolument pas en mesure, ni d'infirmer, ni de confirmer cette attaque survenue le 18 août au Béage précisément.

----Des interactions ante mortem très ponctuelles
"Des interactions ante mortem très ponctuelles peuvent arriver, mais ce n'est pas du tout la pratique habituelle du vautour, qui demeure un charognard et non un prédateur. Sa physionomie ne lui permet d'ailleurs pas d'attaquer une proie mouvante", assure François Gorieu.-----L'éleveur lui même n'a pas vu les vautours et n'a découvert la vache morte que le lendemain
Le directeur de la Direction Départementale des Territoires (DDT), François Gorieu, a été en mesure de nous apporter quelques élements cette semaine. D'abord, "il convient de parler d'interaction, et non d'attaque", explique-t-il. Dans l'affaire du Béage, "il n'apparaît pas que les vautours soient intervenus sur un animal vivant, l'éleveur lui-même n'ayant pas vu les vautours". Dans le constat dressé par l'OFB (office français de la biodiversité), il est en effet stipulé que ce sont des voisins qui auraient vu les vautours, l'éleveur n'ayant découvert la vache morte que le lendemain. 
La présence des vautours ne repose donc que sur des témoignages mais aucun élement concret, tels des plumes, n'a été observé sur site. "Le problème, c'est qu'on a été prévenu trop tard", déplore François Gorieu, "presque trois semaines après l'interaction. Forcément, il n'y avait plus aucune trace et on n'a même pas vu voir la victime pour observer des lésions et pouvoir caractériser le type de consommation. En l'état, absolument rien ne permet de penser que les vautours ont tué la vache".

Et pourquoi ne pas miser sur le vautour comme levier touristique et économique ?
Joint par téléphone, Franck Chastagnol, expert sur le sujet et membre de la LPO, appuie la version des services de l'État : "aucune de ces attaques n'a été confirmée et les vautours ne sont pas en capacité d'attaquer". Il confirme cependant la présence du rapace en Haute-Loire, car "depuis 2005, on voit régulièrement des vautours dans le département mais ils n'y nichent pas". S'appuyant sur des initiatives d'autres territoires, il suggère de proposer, en Haute-Loire aussi, l'installation "sur des secteurs définis en concertation et à un certain moment de l'année, des placettes de nourrissage".
Il estime que ce pourrait être un moyen de détourner les vautours d'une consommation de bête agonisante et assure que ça peut aussi être un levier touristique : "parfois, sur certains territoires, des guides proposent au public d'assister à la curée. C'est très spectaculaire". Sans oublier qu'ils peuvent permettre à la collectivité de réaliser d'importantes économies en frais d'équarissage mais la pilule sera difficile à avaler pour les agriculteurs qui estiment qu'au contraire, c'est parce qu'on a trop bien nourri cette espèce qu'elle prospère et cause des troubles aujourd'hui.

Maxime Pitavy

- Photo d'illustration lors de l'incident à Saugues en juin 2020 @ Pauline Hugony -