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Haute-Loire : près d'un médecin traitant sur deux refuse de nouveaux patients

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:59

La fracture sanitaire ne date pas d'hier. Déjà en 2012, Zoomdici s'inquiétait d'une fracture qui touchait principalement les médecins généralistes, les pédiatres, les ophtalmo et les gynéco. Force est de constater que peu de chose se sont arrangées depuis.
Si une dizaine de professionnels sont attendus dans la future maison médicale d'Aiguilhe, sur le bassin du Puy, plus de 2 000 patients n'auraient pas de médecin traitant, avec des disparités importantes entre les territoires (aucun médecin à Aiguilhe ou Espaly, mais Chadrac, Brives et Polignac bien dotés). Pourtant, le vrai désert médical en Haute-Loire, c'est celui des spécialistes.

41 % refusent catégoriquement de nouveaux patients
L'enquête de l'UFC Que Choisir 43 porte sur 29 médecins généralistes de Haute-Loire. L'association a essentiellement démarché par téléphone et les résultats sont sans appel : 41 % refusent catégoriquement de nouveaux patients. Motif du refus : 92 % déclarent avoir trop de patients et les 8 % restants arguent de leur départ prochain à la retraite. On note également que 21 % des sondés souhaient d'abord voir le patient avant de se décider.
Pour cette deuxième catégorie, selon le Docteur Alain Chapon, président du Conseil de l’Ordre des médecins du département, c'est avant tout "par peur que ce soit une très grande famille qui se cache derrière un simple patient", mais "la lourdeur de la pathologie" peut également peser dans la balance, tout comme une "incompatibilité de caractère".

----La Haute-Loire bien lotie en France
Notre département obtient tout de même un résultat un peu meilleur que la moyenne nationale, avec 41 % de refus contre 44 % à l'échelle hexagonale.-----141,6 médecins généralistes pour 100 000 habitants en Haute-Loire 
Le nombre de médecins généralistes par habitant est variable d’un territoire à l’autre et en Haute-Loire, on compte 141,6 médecins pour 100 000 habitants. Seuls Mayotte (48,2 !) et l'Eure (95,9) sont en-dessous des 100 médecins pour 100 000 habitants en France. La moyenne nationale est de 155,2. Pour Auvergne Rhône-Alpes, la densité est de 157. L'ensemble de ces données est à retrouver ici.

"J'en ai appelé dix mais aucun n'a accepté de me prendre comme médecin traitant"
C'est la triste réalité à laquelle est confrontée Marie, 25 ans, qui s'est installée il y a un mois à Espaly avec son conjoint et leur fils de neuf mois. Pour faire vacciner ce dernier, ils ont découvert un véritable parcours du combattant. "Le seul pédiatre me donnait un rendez-vous mi-mars, donc il m'a dit d'appeler mon médecin pour avoir une prescription. C'est là que j'ai essuyé une dizaine de refus", témoigne-t-elle. Un médecin, à Vals, accepte de voir leur fils exceptionnellement, mais pas question de prendre la famille parmi sa patientèle. "Pour l'instant, on n'a aucune solution et ça nous inquiète surtout pour notre enfant, qui en aurait besoin. Heureusement qu'on n'a pas de gros problème de santé mais j'achète quand même quelques trucs en pharmacie, et rien ne m'est remboursé. Si j'étais mère célibataire, je serais coincée", ajoute-t-elle.

----Certains médecins fonctionnent sans patientèle. Il  n'y a donc pas de barrière à la prise de rendez-vous. C'est le cas par exemple du Dr Charbonnier à Chadrac.
-----"Dès 2020-2025, ça devrait s'arranger"
C'est la prophétie du Docteur Alain Chapon, qui a des motifs d'espoir malgré le départ en retraite de nombreux baby-boomers qui se profile. "On va déjà avoir quatre ou cinq installations dans les mois à venir au Puy", ajoute-t-il, même s'il faut tempérer avec les deux ou trois départs en parallèle.
Il estime que la Haute-Loire conserve de l'attractivité grâce à sa proximité avec les facultés de Clermont-Ferrand et de Saint-Etienne et surtout grâce à l'hôpital Emile Roux du Puy, "un gros recruteur de médecins". Rappelons d'ailleurs qu'il y a une déléguée santé sur le Grand Velay, chargée d'attirer de nouveaux practiciens, "et tous, on se retrousse les manches", insiste-t-il. 

Quid du conventionnement territorial des médecins ?
L'association de consommateurs demande aux parlementaires d'instaurer un conventionnement territorial des médecins pour "une urgente réforme de répartition des practiciens sur le territoire". Elle leur a d'ailleurs adressé un courrier à cet effet. "Tout ce qui est coercitif, je n'y crois guère", tranche le président du Conseil de l’Ordre des médecins du département, "tous les territoires sont démunis me semble-t-il, pas plus au Puy qu'ailleurs. Ici, c'est le centre-ville qui se désertifie, car il est difficile d'accès".
Pour lui, mieux vaut appuyer sur le dispositif de 400 généralistes salariés fléchés sur des territoires prioritaires, et il essaie d'ailleurs d'en avoir un sur le secteur de Pradelles/Landos. Il reconnait cependant que "400, c'est vraiment pas beaucoup et c'est à chaque territoire de se battre pour trouver". En conclusion, pour lui le conventionnement territorial est "contradictoire avec une activité libérale" et c'est "plus un problème de démographie médicale que de répartition territoriale".

Maxime Pitavy