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Arlette Arnaud-Landau : 50 ans de combat pour le droit des femmes

Par . . ven 25/11/2022 - 12:30 , Mise à jour le 25/11/2022 à 12:30

Ce vendredi 25 novembre a lieu la journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes. Rencontre avec Arlette Arnaud-Landau, féministe et militante pour l'égalité homme-femme depuis la première heure.

" Je ne veux pas qu'on pense que les femmes ont besoin d'être surprotégées. Elles sont fortes et solides". Regard bleu intense, cheveux blonds coupés courts et l'air déterminé, Arlette Arnaud-Landau milite depuis près de 50 ans pour l'égalité homme-femme. 

L'engagement d'une vie 

C'est au sein de la caserne de gendarmerie Romeuf du Puy entourée de frères que grandit cette femme au parcours inspirant. " J'étais dans un monde plutôt masculin. J'étais très revendicative. Je ne savais pas ce qu'était une jupe au grand désespoir de mon père", s'amuse-t-elle. Pour ses études universitaires, la jeune femme part dans le sud de la France puis à Metz.

Ce n'est qu'en 1975 qu'elle revient au Puy et obtient un poste au sein de la trésorerie générale. Arlette Arnaud-Landau s'engage alors dans les syndicats, le milieu associatif puis en politique. " En 1978, j'ai adhéré au Planning Familial et intégré le groupe des femmes du Parti socialiste au niveau national", se souvient-elle.

La jeune femme rencontre alors Yvette Roudy, devenue ensuite ministre des droits des femmes. "C'est à ce moment là que je me suis découverte féministe. J'avais envie de la parité entre les hommes et les femmes. A l'époque, il y avait une telle inégalité. Dans de nombreuses entreprises, les hiérarchies étaient masculines.", ajoute Arlette Arnaud-Landau.

Arlette Arnaud-Landau lors de la création du CIDFF en Haute-Loire.
Arlette Arnaud-Landau lors de la création du CIDFF en Haute-Loire. Photo par Arlette Arnaud-Landau

En 1982, Arlette Arnaud-Landau lance le CIDFF en Haute-Loire.

Elle est rapidement nommée Chargée de mission départementale au droit des femmes en Haute-Loire. " Mon employeur m'a mis à disposition au cabinet de la préfecture. C'est à ce poste, accompagnée de la Déléguée régionale de l'époque Michèle André, que j'ai déployé le Centre d'Information des Droits des Femmes et des Familles en Haute-Loire", se remémore-t-elle. Un établissement ouvert dans tous les départements de France à la fin de l'année 1982 à la demande d'Yvette Roudy.

" Elle est arrivée chez moi le bras bandé. Il l'avait attaqué au fer à repasser et l'avait brûlée" . A. Arnaud-Landau

A ce poste, Arlette Arnaud-Landau est rapidement confrontée aux violences faites aux femmes. De nombreuses victimes viennent la rencontrer pour lui parler et lui confier leur quotidien dramatique. " Je me souviens de deux femmes. La première était venue me rencontrer chez moi. Elle avait honte. C'était une femme directrice d'établissement scolaire. Son époux était directeur d'agence bancaire. Elle est arrivée chez moi le bras bandé. Il l'avait attaqué au fer à repasser et l'avait brûlée. Je l'ai accompagnée et gardée chez moi quelques temps", raconte la militante.

"Son époux l'avait attaquée avec un pique-feu brûlant"

Une rencontre douloureuse qui n'est en fait que la première parmi tant d'autres. Des confrontations difficiles à entendre pour Arlette Arnaud-Landau qui est encore jeune. " Un jour, c'est une agricultrice qui est venue me voir à la préfecture cette fois. Elle était accompagnée de ses enfants. Elle vivait au dessus de Costaros. Son époux l'avait attaquée avec un pique-feu brûlant. C'était horrible. Je me souviendrai toujours d'elle. Ses enfants avaient subi ça toute leur enfance. Elle restait parce qu'elle pensait que c'était bien pour eux qu'elle le fasse. Lors de notre rendez-vous, ils lui ont dit qu'ils auraient préféré qu'elle parte et ne vive pas ça", poursuit-elle, touchée par ses souvenirs.

"Nous l'avons cachée car son époux était très violent"

Et puis il y a eu cette autre rencontre. Celle d'une famille marocaine de 7 enfants, dont la mère était violentée par son mari. " C'est la première que nous l'avons sortie du domicile familial. Nous l'avons cachée car son époux était très violent. L'une de ses filles devait être mariée de force. Je l'ai hébergée à mon domicile pendant plusieurs mois pour éviter cette union. Aujourd'hui, elle vit à Clermont et a installé un logement au sein de sa maison pour accueillir des femmes victimes de violences", livre-t-elle. 

Depuis des années, Arlette Arnaud-Landau se bat pour créer un centre d'accueil d'urgence des femmes victimes de violences mais aussi pour libérer la parole et que justice soit faite. "Il y a 40 ans, il était très compliqué de déposer une main courante ou une plainte auprès d'un commissariat de police ou de la gendarmerie. Il y a eu une importante évolution dans ce sens là", se réjouit-elle.

"Les femmes ont un potentiel extraordinaire" 

Aujourd'hui, à presque 70 ans, elle est toujours engagée en tant que présidente du CIDFF de Haute-Loire, déléguée régionale des CIDFF de la région Auvergne-Rhône Alpes et membre du bureau national de la fédération des CIDFF. Son combat ne se limite pas à la défense des femmes victimes de violence, elle souhaite aussi que le potentiel des femmes soit reconnu.

"Les femmes sont fortes. Elles l'ont prouvé au fil des siècles. Au moment des guerres, c'est grâce à elles que la France a continué de travailler. En Iran, ce sont les femmes qui se révoltent. Elles ont un potentiel extraordinaire", conclut-elle remplie d'espoir et d'optimisme. 

Il s'agit d'une association départementale, membre d'une fédération nationale et régionale, agréée par l'Etat. Les objectifs de la structure sont de promouvoir l'autonomie sociale personnelle et professionnelle des femmes et des familles mais aussi de développer la culture de l'égalité.

Le CIDFF en Haute-Loire

Le siège de l'association se trouve au Puy-en-Velay où 9 salariés y travaillent. Tous interviennent sur le département avec des permanences de proximité mais aussi sur différents services tels qu'un accompagnement juridique, accompagnement des victimes, insertion socio-professionnelle ou encore prévention. 

" On souhaite permettre aux victimes de libérer leur parole. Qu'elles puissent mettre des mots sur ce qu'elles vivent. Nous proposons des parcours sur-mesure. On s'adapte aux besoins de chaque personne", détaille Elodie Arsac, directrice du CIDFF de Haute-Loire. 

En 2022, 197 femmes aidées par le CIDFF de Haute-Loire 

Chaque année, près de 200 femmes du département sont accompagnées par la structure. Elles étaient 220 en 2021. A la mi-novembre, 197 ont été aidées par les services du CIDFF. " Les demandes sont de plus en plus nombreuses. L'activité est croissante. La parole se libère doucement", explique la directrice.

Le prochain défi du centre : lutter contre les violences dans les zones rurales. " Nous déployons des permanences dans les maisons France Services notamment à Craponne et Saint Julien Chapteuil",continue-t-elle.  

Contact : 04 71 09 49 49. Les accueils en présentiel et par téléphone sont assurés du lundi au vendredi de 9h à 12h30 puis de 13h30 à 17h.  Un service gratuit, anonyme et confidentiel.