Un vent mauvais s’abat-il sur les librairies ponotes ?

Par Marie Gardès , Mise à jour le 17/01/2024 à 15:30

Fin janvier, l’arbre à livres, librairie indépendante située rue Saint-Jacques va fermer définitivement. Qu'en est-il des autres librairies ponotes ? Entre inflation et changement des modes de consommation, le marché du livre est en pleine mutation. Les librairies Chat Perché et Interlude font le point sur leur situation. 

Anne Helman, propriétaire de la librairie Chat Perché s’attriste de la fermeture de l’Arbre à Livres. « Le secteur du livre est très fragile, ce n’est pas propre au Puy-en-Velay. C’est un commerce de détail peu rentable », analyse t-elle.

Même si les fêtes de fin d’année ont été bénéfiques, le dernier bilan est mitigé, souligne la libraire : « Je ne peux pas prédire l’avenir de ma librairie, mais je ne peux pas dire que tout va bien. Chat Perché a 25 ans. J’y ai consacré toute ma vie, je la tiens à bouts de bras, même si je ne sais pas ce qu’il se passera plus tard. »

Les périodes creuses, de janvier à juin, sont « difficiles à passer » et « longues, non pas en terme de volume de travail qui est important toute l’année mais au niveau de la trésorerie ». Heureusement, les moments forts de l’année sont « très forts » s’amuse Anne Helman.

Elle attribue la fragilité du secteur du livre à un changement des modes d’achats depuis 10 à 15 ans, notamment avec l’arrivée d’Amazon. En revanche, cette dernière ne pense pas que les gens lisent moins qu’avant.

« Depuis que la télévision existe, il y a toujours eu des personnes qui ne lisaient pas. C’est la manière de consommer des livres qui est différente, notamment avec les habitudes des jeunes à consulter les écrans. La lecture sur support numérique se développe beaucoup. »

Certaines niches ont pourtant du succès, comme les bandes dessinées. La libraire relativise. « Il y a des modes, mais elles passent, comme les fringues, c’est pareil avec la BD et le manga. »

Les BD ont le vent en poupe au Puy-en-Velay

Pourtant, ce n’est pas l’avis de Julien Chemin, libraire à Interlude, qui ne s’inquiète pas pour les prochaines années. « Nous allons très bien », se réjouit celui-ci. « Nous sommes dans une niche, la BD, qui se porte très bien. En plus, notre magasin est situé dans une rue très empruntée par les passants et les touristes. Forcément, on en profite, on a agrandi les locaux tellement que le succès est au rendez-vous », met en lumière Julien Chemin.

Il confirme que le secteur du livre n’est pas le plus solide, même s’il préfère employer le terme de mutation plutôt que de crise. Lui aussi attribue cela à l’arrivée fracassante du numérique et à l’inflation. « Si l’inflation continue, les gens vont s’appauvrir et là, on va souffrir réellement parce que les loisirs seront délaissés », imagine le libraire.

Il observe tout de même un engouement pour la BD et les mangas, notamment depuis le Covid. Julien Chemin constate que les clients hésitent davantage avant d’acheter, même si le mois de décembre a été « très correct » et qu’il « ne faut pas s’inquiéter. »

Pour lui, Interlude a le monopole au Puy-en-Velay dans ce secteur de niche. « Nous n’avons vraiment aucun concurrent, pas même la Fnac ou Amazon. »

« Les gens qui commandent sur Amazon ne sont pas des clients de librairie. S’ils commandent sur Amazon, c’est qu’ils n’ont pas le choix, qu’on n’a pas pu leur fournir le service qu’ils attendaient. Sinon, ce sont des gens qui n’ont pas pour habitude d’acheter dans les librairies, ils ne sont pas curieux comme nos clients. Nous n’avons pas à regretter l’arrivée de ces plateformes, et la loi Lang a empêché ce géant de faire couler les libraires. »

La loi Lang du 10 août 1981 relative au prix du livre, (du nom de Jack Lang, ministre de la Culture), est une loi instaurant un prix unique du livre en France. Elle limite la concurrence sur le prix de vente au public du livre afin de protéger la filière et de développer la lecture.

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