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Saugues

Neuf ans de prison pour avoir tué son nouveau-né

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:45

En ce troisième et dernier jour d'audience, un point a mis d'accord l'ensemble du tribunal : cette affaire touche à l'un des plus grands tabous de notre société. Ce mercredi 8 février 2017, une femme de 30 ans a été jugée par la Cour d'Assises de la Haute-Loire pour le meurtre de son nouveau-né par étranglement. Le "néonaticide" s'était produit à Saugues le 20 mars 2015.
----Rappel des faits
Le 20 mars 2015, pompiers et gendarmes sont appelés dans un appartement du bourg de Saugues. Sur la terrasse, ils découvrent le corps d'un nouveau-né, déposé dans un carton. A l'intérieur, une jeune femme et sa mère doivent s'expliquer. La première reconnaît rapidement avoir étouffé son bébé alors qu'il venait de naître. Elle avait tenu sa grossesse secrète.-----"Elle ne s'est pas construite psychologiquement"
Dans le box des accusés, la trentenaire s'effondre. Elle sait qu'elle risque la peine maximale, soit la réclusion criminelle à perpétuité. Alors que le procès avance, son visage se fatigue et son dos se voûte. Les larmes coulent sans cesse, l'empêchant parfois de parler.
Le tribunal le sait : l'accusée est fragile. La perte de son père à l'âge de sept mois, les absences de sa mère et les non-dits familiaux "ont empêché la jeune femme de se construire psychologiquement", analyse Maître Gustin, l'une de ses avocates.
Une altération du discernement
Mais le Ministère public, représenté par Marie Moschetti, refuse de croire que "sa personnalité seule ait mené au passage à l'acte". Une question se pose alors : que s'est-il passé dans la tête de la jeune femme cette nuit du 20 mars 2015 ? Pourquoi a-t-elle décidé d'étrangler son bébé avec un sac plastique, juste après l'accouchement, dans son lit ?
L'expert psychiatre dépeint une personnalité "borderline", affaiblie par des bouleversements hormonaux, une anémie, et un anxiolytique avalé avant de se coucher. Il conclut à une "altération du discernement" : la jeune femme n'était ni dans son état normal, ni complètement délirante.
"Elle s'y est prise à deux fois, ce n'est pas un accident"
De son côté, l'avocat général penche pour un meurtre commis en conscience. "Elle savait pour sa grossesse. Elle connaissait les conséquences. Elle n'en a jamais parlé alors qu'on lui tendait la perche. Quand elle a perdu les eaux, sa mère était à côté", tonne Marie Moschetti. "Elle s'y est même prise à deux fois : elle a essayé de l'étouffer, puis de l'étrangler. Ce n'est pas un accident, mais un acte éminemment volontaire." La représentante du parquet requiert neuf années d'emprisonnement et dix ans de suivi socio-judiciaire.
"Elle a accouché comme une bête"
En face, Maître Diez tempère. La seconde avocate de l'accusée ne cherche "aucune excuse" à ce geste, mais pointe du doigt "une mécanique qui s'est emballée". Pour elle, "il y a eu un débordement, une panique".
"La violence de cette action est proportionnelle à la frustration qu'elle a subie. C'est comme une cocotte minute qui explose. A ce moment là, son cerveau est en chaos." Et l'avocate de rappeler "des conditions d'accouchement archaïques" : "Ca s'est produit dans la solitude, l'isolement. Elle a accouché comme une bête."

Devant les jurés, Maitre Diez conclut : "Plutôt que d'avoir l'intention de donner la mort, elle n'a pas eu la capacité de donner la vie." Mais la Cour n'adhère pas au raisonnement et suit les réquisitions du parquet. Juges et jurés condamnent la jeune Sauguaine à neuf années d'emprisonnement, complétées par dix ans de suivi socio-judiciaire. L'accusée et le Ministère public disposent de dix jours pour faire appel.

Clément L'hôte

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