La commune de Séneujols condamnée pour « destruction d’habitats d’espèces protégés »

, Mise à jour le 05/07/2022 à 12:25

Ce mardi 5 juillet 2022, la commune de Séneujols a été condamnée, en première instance, par le tribunal judiciaire du Puy-en-Velay pour "destruction d'habitats d'espèces protégées".
A l’approche du concours national de labour « Les Terres de Jim » en juillet 2019, la mairie avait ordonné l’arrachage de 740 mètres de haies et de murets en pierres sèches. Sept espèces d’oiseaux et de reptiles avaient alors vu leur habitat détruit en pleine période de reproduction.
 

C’était une décision attendue depuis presque trois ans par les différentes associations de protection de l’environnement. Ce mardi 5 juillet 2022, en ouverture du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay, la commune de Séneujols a été finalement reconnue « entièrement responsable du préjudice subi ».
En attendant un éventuel recours en appel de la mairie, c’est donc l’aboutissement d’une affaire médiatique, judiciaire et environnementale qui oppose des associations écologistes au maire de Séneujols. 

Les Terres de Jim ont eu lieu du 6 au 8 septembre 2019 à Bains et Séneujols.
Les Terres de Jim ont eu lieu du 6 au 8 septembre 2019 à Bains et Séneujols. Photo par Annabel Walker archives

Tout débute lors de la préparation du concours national de labour « Les Terres de Jim ». L’évènement agricole national, qui s’est tenu sur le domaine Chantouin du 6 au 8 septembre 2019, a nécessité à l’époque d’importants travaux pour permettre l’accueil des milliers de visiteurs et le passage de toute la logistique inhérente à ce type de rassemblement.

Trois associations environnementales, France Nature Environnement Haute-Loire (FNE 43), FNE AURA et la LPO Auvergne, constatent alors l’arrachage de haies, le tronçonnage d’arbres et l’enlèvement de murets en pierres sèches sans autorisation de dérogation à la conservation d'espaces naturels d'espèces protégées. Elles dénoncent des faits d’une extrême-gravité et la destruction d’habitats d’espèces protégées. Selon les ONG, sept espèces d’oiseaux et de reptiles ont ainsi vu leur habitat complètement détruit en pleine période de reproduction. Cela concerne notamment la très rare pie-grièche grise, espèce protégée en très fort déclin, ainsi que la vipère péliade.  

Plusieurs milliers d’euros d’amendes et une obligation de remise en état

Jugement du tribunal Judiciaire du Puy-en-Velay

La commune de Séneujols a été déclarée "coupable et entièrement responsable du préjudice subi".

De ce fait la municipalité est condamnée :

  • à une remise en état complète des haies et des murets sous une période de dix mois.
  • à verser 2000€ pour préjudice moral à chaque association s'étant constituée partie civile : France Nature Environnement 43 (FNE 43), FNE AURA et la LPO Auvergne.
  • à verser une indemnité à chaque association pour couvrir les frais de justice liées à cette affaire.

Rapidement les associations environnementales réclament de réimplanter le linéaire détruit de haies et de murets sur la commune de Séneujols. Une exigence refusée par Serge Boyer, maire de Séneujols. C'est après ce refus réitéré que les associations environnementales ont décidé de porter plainte.

En septembre 2020, une plainte est déposée par l’Office français de la biodiversité (OFB) pour demander des mesures compensatoires au moins équivalentes au milieu qui a été détruit et en décembre 2021 le tribunal judiciaire est finalement saisi.

  
Après de longs mois d’instruction, ce dernier a donc rendu sa décision et a suivi, en partie, les plaidoyers des ONG et du ministère public en condamnant la commune de Séneujols à réimplanter l'équivalent des 740 mètres de haies et de murets dans un délai de dix mois. Passée cette période, la municipalité s’expose à une pénalité de 50€ par jour de retard pendant trois mois.

La commune a également été condamnée à verser plusieurs milliers d’euros d’indemnité pour préjudice moral aux trois associations qui s’étaient portées parties civiles.

« Une grande première juridique dans cette condamnation symbolique »

A la sortie de l’audience, les associations environnementales se sont félicitées de ce jugement.
Pour Jean-Jacques Orfeuvre, vice-président de France Nature Environnement 43, c’est une « condamnation symbolique importante et attendue face à une collectivité locale qui ne respecte ni les réglementations ni la loi ». 

Le militant écologiste espère surtout que : « ce jugement fera avancer la prise de conscience de l'intérêt de conserver les murets et les haies qui sont des réservoirs d'animaux prédateurs de campagnols et autres rongeurs notamment rats taupiers, d'oiseaux prédateurs d'insectes, alliés des agriculteurs ».

« Les agriculteurs n'ont aucune responsabilité dans cette affaire, les décisions ayant été prises à la mairie de Séneujols ». Jean-Jacques Orfeuvre

Réaction de Coline François, en service civique à la FNE43, qui estime que cette jurisprudence ouvre une nouvelle voie pour la justice environnementale :

« Nos associations passent beaucoup de temps (et un peu d'argent car nous en avons très peu) à la sensibilisation de la sauvegarde des haies et des murets et accompagnent de nombreuses actions de plantations de haies ». Jean-Jacques Orfeuvre

« Ces associations écologiques se font de l’argent sur le dos de nos agriculteurs »

Face à eux les représentants des Jeunes Agriculteurs, organisateurs de l’évènement controversé, dénoncent une décision de justice « dommageable » qui « ne va pas aider au dialogue entre écologistes et paysans ». 

   
Pour Laurine Rousset, présidente des Jeunes Agriculteurs de Haute-Loire (JA 43), « la mairie de Séneujols et la Région Auvergne-Rhône-Alpes font bien plus de bien à notre territoire que certaines associations écologiques qui font de la communication et sont uniquement à la recherche de sources de financement ».    
Anthony Fayolle, président des JA 43 à l’époque des « Terres de Jim », regrette également une décision de justice qui « ne facilitera pas le travail de nos collègues » et qui va, selon lui, à contresens « du désenclavement des parcelles ».    

Du côté de la défense, maître Aurélie Chambon, représentante de la mairie de Séneujols, « se réserve le droit de porter un éventuel appel » à cette décision de justice en première instance.

Vous aimerez aussi

Vos commentaires

Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire

19 commentaires

jeu 07/07/2022 - 10:54

Juste pour tous ceux qui critiquent sans lire correctement : c'est l'OFB  - Office français de la Biodiversité - qui a porté plainte en septembre 2020.  Autrement dit c'est la Police de l'environnement qui a déposé plainte. C'est marqué noir sur blanc dans l'article .

Les organisations telles que la LPO, FNE43 et FNE AURA se sont portées civiles suite à la plainte mais n'en sont pas à l'origine.

Apprenez à lire et surtout à comprendre les articles avant de critiquer.

Et pour finir en réponse @mi si vous croyez que 2000 € de dommages est une somme énorme alors pourquoi tant de gens qui touchent cette somme tous les mois en tant que salaire se plaignent de ne pas s'en sortir ?

 

mer 06/07/2022 - 22:19

Les lois ont le rôle de garde-fou.

Parmi elles, certaines visent à éviter les atteintes à l'environnement.

Si quelqu'un venait à porter plainte contre le vol de sa voiture, nul n'aurait idée de critiquer la personne qui porte plainte, à part peut-être des malfrats eux-mêmes.

Certaines personnes n'ont pas encore compris que les associations de protection de la nature défendent un patrimoine commun à tous et déjà bien malmené.

mer 06/07/2022 - 15:22

et oui les écolos ,la L.P.O, F.N.E sont arrivés !!!!!! Messieurs les maires prenaient de bonnes assurances parce ce que tout ce que vous aller organiser sur votre commune ces gens la seront a l'affût pour vous attaquer et demander des dommages,et intérêts. Etant donné que  c'est avec cela qu ils remplissent  leurs caisses. Les communes qui vont être traversées par   l' enduro vont devoir replanter des arbres,remettre les cailloux en place,replanter de l'herbe....etc.......

mer 06/07/2022 - 10:58

Quand avez-vous vu les agriculteurs condamnés à rembourser ce qu'ils cassent? Les gilets jaunes ont bien dégustés au tribunal, mais à chaque manif d'agriculteurs rien pourtant les dégâts sont importants pas de plaintes(préfecture par exemple), pas de condamnations. On le sait depuis longtemps qu'ils sont protégés par les élus. Mais là il y en a marre de payer cher pour eux, la loi est pour tous...

mer 06/07/2022 - 07:55

Les amateurs d'enduro n'ont qu'à bien se tenir.... La jurisprudence est en route ! Enfin on va respecter l'environnement....et ses citoyens

mer 06/07/2022 - 00:51

Vous êtes allés constater sur place ? Les buissons repoussent déjà, arrêtez de dramatiser là où il n'y a rien !!

L'entretien de la campagne est indispensable si on veut continuer d'y vivre sinon c'est la jungle !! 

mar 05/07/2022 - 22:29

celui qui devrait être condamné c'est celui ou celle qui a demandé ce chemin, le maire aurait pu refusé de détruire les haies.

mar 05/07/2022 - 21:46

Ce serait bien que les agriculteurs d'aujourd'hui comprennent que la base de l'écologie, ou protection de l'environnement, passe par le respect de ce que les paysans d'hier ont construit, mais visiblement, ils ne semblent pas toujours en comprendre les raisons !

mar 05/07/2022 - 21:26

Tout à fait d'accord avec les commentaires. La réaction du maire et des JA est hallucinante : quand ces gens comprendront-ils qu'il faut arrêter de détruire cette planète ? Comment est-il possible que ce département soit encore aussi arriéré, pour s'accrocher mordicus à tout ce qui est une insulte au bon sens : la moto-cross, les finales de labour, la chasse au renard, la destruction des haies, les 2x2 voies... Y a-t-il seulement une petite chance pour que ces gens-là évoluent un jour et comprennent que ce n'est ni plus ni moins qu'une question de vie ou de mort à brève ou moyenne échéance ? Qu'est-ce qu'on dira aux enfants quand toute vie sera détruite et qu'on aura 50°C à l'ombre ? Prions pour que les gens soient moins arriérés dans les autres régions...

mar 05/07/2022 - 19:51

La mégalomanie des uns doit s'arrêter où commence la tranquillité des autres et le bien être de la planète. Piétiner, détruire et produire du déchet pour du loisir est d'un autre âge : il faut que les gens le comprennent. Ce qui est regrettable, c'est la peine univoque encaissée par la mairie alors que de nombreux syndicats agricoles, partenaires financiers (banques, assurances, concessionnaires) étaient parties prenantes et complices du programme. Ceux-là se frottent les mains, ils ont reçu tous les bénéfices de la fête et la mairie paie seule leur manque de sobriété (qu'elle a validé certes mais dont ils ont été acteurs).

mar 05/07/2022 - 19:27

J'espère que ce jugement fera jurisprudence ... pour les championnats d'enduro la note devrait être salée

mar 05/07/2022 - 18:56

M.Le Maire de Seneujols est un terroriste environnemental qui bafoue non seulement la Loi mais les intérêts fondamentaux de l'Humanité toute entière. Le comportement de la FDSEA et des JA est une aberration économique et sociétale. Ils travaillent avec un acharnement singulier à se faire haïr par une majorité de plus en plus importante de la population, même en Haute Loire où l'inconscience écologique reste particulièrement forte. N'est pas agriculteur, ni agricultrice, qui veut. Cela demande aujourd'hui un niveau élevé de savoir faire et d'intelligence du milieu que ceux qui se prétendent agriculteurs en massacrant de cette façon l'environnement n'ont pas. M.Duplomb, M.Boyer ou Madame Rousset sont indignes de se prétendre agriculteurs.

mar 05/07/2022 - 18:01

Et ce n'est que le début j'espère...

Rendons à nos enfants une planète propre et formons des humains respectueux qui sauront préserver le calme et la beauté de notre terre.

mar 05/07/2022 - 17:08

Bravo pour cette décision de justice ! Merci aux associations de protection de l'environnement pour leur vigilance et leur combat au quotidien face à des élus et des agriculteurs productivistes FNSEA ancrés dans le passé.

L'OFB est de plus en pus présent dans les campagnes et mène un travail difficile; cette victoire juridique est aussi celle d'agents publics engagés !

Quant aux jérémiades des agriculteurs, rappelons simplement que le droit s'applique à tous et que les agriculteurs y sont soumis.

Enfin, depuis qqs mois, dans les champs du le plateau du Dévés, on peut observer des arrachages sauvages de haies , suivis ensuite de nouvelles plantations  (haies financées via le plan de relance) . ça ressemble furieusement à de la chasse aux subventions...

 

 

mar 05/07/2022 - 16:08

enfin la justice française a compris que notre survie dépend de notre vigilance à sauvegarder la biodiversité. Quand aux JA 43, qui osent dire que les associations cherchent de l'argent dans de s procès, elle manque pas d'air: pacs, prime d'ici et de là, destruction de biens publics à chaque manif.... A par leur nombril et leur argent, pour eux le reste du monde n'existe pas, a croire qu'ils n'auront pas d'enfants et tant mieux. Encore bravo aux associations qui essayent par le peu de moyens qu'ils ont de sauver notre planète,merci pour l'avenir des générations a venir

mar 05/07/2022 - 15:44

Ce serait bien de comprendre que la base de l'écologie, ou protection de l'environnement, c'est de préserver l'habitat des espèces en voie de disparition, ou non. Mais visiblement, les paysans d'aujourd'hui ne semblent pas en comprendre l'intérêt et n'ont aucun respect du travail de leurs ascendants (les miens, en l'occurrence ! )

mar 05/07/2022 - 15:15

A quoi peut bien servir la rédaction de textes de lois , si les dits textes sont bafoués par des organisations majoritaires sans oppositions qui s'en moquent et se considèrent comme au dessus des lois et agissent comme telles?

mar 05/07/2022 - 13:11

hm 05/07/2022 13h03: Comment faire pour sécuriser légalement de tels rassemblements?. Ce jugement va faire jurisprudence et va sevir aux différentes associations écolos pour collecter facilement d'importantes sommes d'argent. Etre Maire, une fonction à haut risque, de quoi décourager et dégoûter ces responsables d'organiser ces manifestations qui apportent du lien social nécessaire à la vie rurale.