Département : un contrat avec l'État "inacceptable"... mais adopté à l'unanimité

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:53

Ce contrat est défini dans le cadre de la Loi de programmation des finances publiques. Il impose à 321 grandes collectivités, dont le Département de la Haute-Loire, de limiter les dépenses de fonctionnement pour les trois années à venir (2018,2019 et 2020) à 1,2 %, "sans tenir compte de l'inflation", souligne le chef de file de l'exécutif départemental Jean-Pierre Marcon.
Bien que péniblement et après moult reproches, les élus du Département ont finalement accepté, à l'unanimité ce lundi 25 juin 2018, de signer ce contrat avec l'État (la signature est prévue ce samedi 30 juin 2018 avec le préfet).

----Si le Département faisait le choix de ne pas signer (certaines collectivités ont fait ce choix), une sanction financière immédiate en découlerait, de l'ordre de 100 % du dépassement éventuel des 1,2 %.-----"Ils feraient mieux de balayer devant leur porte"
Face à cette décision très verticale de l'État, qui n'a guère pris en compte les spécificités de chaque territoire et qui n'a pas laissé de marge de manoeuvre dans les négociations, certains élus ont tenu des mots durs dans l'assemblée, parlant de "diktat" ou encore de "prise d'otages".
"On peut comprendre l'exaspération des élus", les défend le président du Département Jean-Pierre Marcon, "ils sont persuadés d'avoir bien travaillé pendant quatre ou cinq ans pour diminuer l'endettement du Département". Mais aujourd'hui, on leur demande de continuer l'exercice alors que ça devient de plus en plus compliqué. Une demande difficile à digérer, "surtout venant de la part de certains organismes qui feraient mieux de balayer devant leur porte avant de nous expliquer comment il faut faire", ponctue le président de la collectivité altiligérienne.

"Il aurait mieux valu être le frère de l'enfant prodigue dans cette affaire"
C'est avec une pointe d'ironie que Jean-Pierre Marcon s'appuie sur cette référence biblique car il estime que pour le désendettement, l'objectif est déjà rempli depuis des années : "nous réalisons des économies ; d'habitude, on met sous tutelle les gens malades, or nous, nous sommes en bonne santé". Finalement, la collectivité départementale serait victime de sa bonne gestion des années précédentes et "l'État privilégie ceux qui n'ont pas fait d'effort jusqu'à présent".

Reconnaître la situation singulière de notre département
Des discussions se tiennent ainsi avec le préfet depuis plusieurs semaines et aussi des consultations au plus haut niveau national. "Le problème, c'est que ce contrat prévoit aussi les dépenses d'aides sociales et celles-ci dépassent allègrement les 1,2 % car elles relèvent de dispositifs nationaux que nous sommes dans l'obligation d'appliquer et sur lesquels nous n'avons pas de maîtrise", ajoute le président Marcon.
La spécificité de la Haute-Loire, c'est notamment une population vieillissante et à faible revenu qui conduit à une explosion des dépenses sociales, de l'ordre de +4 % par an (contre 1,2 % en France). Les élus ont donné leur feu vert à Jean-Pierre Marcon pour qu'il adresse un voeu au président de la République afin de reconnaître la situation singulière de la Haute-Loire. 

"On prend de plein fouet tout ce qui dépassera les 1,2 % ; c'est très lourd pour notre département"
La précipitation des AIS (allocations individuelles de solidarité), qui comprend l'APA (allocation personnalisée d'autonomie), le RSA (revenu de solidarité active) et la PCH (prestation de compensation du handicap) fait 2 % en Haute-Loire, "un peu plus que les 1,2 % mais c'est un petit avantage que l'État nous donnait", reconnaît le président du Département.
En revanche, les autres dépenses sociales ne sont pas limitées et donc "on prend de plein fouet tout ce qui dépassera les 1,2 % ; c'est très lourd pour notre département car ces dépenses augmentent chez nous en moyenne de 4 % par an depuis déjà plusieurs années". Pour respecter les prérogatives du contrat, la collectivité devrait ainsi trouver 7,6 millions d'euros d'économies en trois ans.

Où réaliser des économies ?
Lorsqu'une économie doit être réalisée, il y a forcément des postes de dépenses qui sont revus à la baisse. On pense dans un premier temps au monde associatif où la collectivité devrait réduire son volume de subventions. Les regards se tournent ensuite vers l'investissement mais "paradoxalement, on ne devrait pas le réduire puisqu'il n'y a pas d'exigence particulière de l'État, si ce n'est de garder une marge brute d'autofinancement suffisante, ce que nous avons déjà fait depuis maintes années. On va continuer sur cette lancée", assure le président Marcon.
L'autre levier que les élus souhaitent activer pour réaliser des économies, ce ne sera pas celui de la fiscalité ("on se l'interdit", nous confie un élu) mais celui de la traque aux fausses déclarations, avec en particulier dans le viseur les bénéficiaires du RSA (Revenu de solidarité active).

----Pavillon numérique : réponse à la rentrée
Concernant le dossier du pavillon numérique (une vitrine touristique sans précédent qui pourrait attirer 100 000 visiteurs par an), il faudra finalement attendre la prochaine session à la rentrée avec la décision définitive de lancer l'appel d'offres à ce moment. Les études avaient besoin d'être complétées et d'être comparées avec des investissements similaires dans d'autres territoires pour être le plus précis possible et bien éclairé sur ce dossier.
-----RSA : un emploi vient d'être créé pour débusquer les situations anormales
"Nos marges de manoeuvre sont limitées car il s'agit de dépenses sociales obligatoires", constate le chef de file de l'exécutif départemental, "on se contente d'appliquer la loi et on peut simplement effectuer quelques contrôles afin que certaines dépenses puissent être minorées, notamment pour le RSA". Un emploi vient ainsi d'être créé au Département spécialement pour débusquer les situations anormales. "On sera sans complaisance", assure Jean-Pierre Marcon, "il faut que ces gens aient peur". Le versement du RSA pourrait être suspendu en cas de non-présentation dès la deuxième convocation.
"Comment accepter une hausse du nombre de bénéficiaires du RSA quand tant d'emplois sont non pourvus ? ", interroge Michel Brun, conseiller départemental et maire de Saugues. Ainsi, dès la rentrée, de nouveaux dispositifs seront mis en place dont un qui concernerait une centaine de personnes et qui viserait à les former à des métiers qui ont été ciblés en fonction des demandes des entreprises. Des formations professionnelles et des stages complèteraient ce dispositif.

Maxime Pitavy

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