Au plus près d’une battue au renard

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:39

Depuis le 28 février 2016, impossible de chasser le renard en Haute-Loire. Six mois sont passés et l'arrêté préfectoral régulant la saison cynégétique établit la période d'ouverture générale de la chasse à tir, y compris la chasse à l’arc, dans le département, du dimanche 11 septembre 2016 à 7 heures au mardi 28 février 2017 au soir. L'hiver dernier, Zoomdici a assisté à une battue.

Chacun son rôle
Comme d’habitude, la matinée commence devant une tasse de café bien chaud dans la cabane des chasseurs. Elle est d’autant bienvenue que dehors il fait moins 5°C, et qu’une bise glaciale souffle sur la neige.
Le nombre de participants est réduit car, d’après l’un d’entre eux, certains membres de l’ACCA (Association de Chasse Communale Agrée), n’apprécient pas la chasse au renard, et ne trouvent aucun intérêt à tirer sur un animal qui ne se mange pas. Une fois que tout le monde s’est accordé sur le secteur à couvrir, les emplacements des tireurs sont attribués, et on me demande si je préfère rester au poste ou suivre un des rabatteurs avec ses chiens. Considérant le froid polaire, je me décide immédiatement pour la deuxième option. Le responsable de la battue récapitule, comme à chaque fois, les consignes de sécurité, puis il donne le signal du départ.

----Après le 1er janvier 2017, le tir du renard ne pourra se pratiquer qu'en battue organisée sous la responsabilité du président ou de son délégué ou au cours d'un acte de chasse à l'approche ou à l'affût du chevreuil ou du cerf.

-----Un départ dans le froid
Une fois arrivé sur place, je me dépêche de m’emmitoufler au mieux dans ma doudoune, le cou cerné d’une épaisse écharpe, la tête couverte d’un bonnet en laine et une paire de gants de ski sur les mains, plus l’inévitable gilet orange. Le paysage est remarquable. Nous progressons sous un ciel couvert, dont la transition avec le sol enneigé, qui craque sous nos pas, est assurée par des sapins couverts de neige, desquels émergent çà et là des bosquets de feuillus dépouillés qui me plongent dans l’ambiance particulière d’une matinée hivernale. Le lieu de départ a été choisi en fonction de la proximité d’une « cave » (terrier de renard) fréquentée, et après avoir parcouru quelques centaines de mètres sur une vieille coursière, nous ne tardons pas à trouver ce que nous cherchons en bordure d’un champ. Mon accompagnateur m’explique comment différencier les empreintes d’un renard de celle d’un petit chien : le goupil marche en laissant des traces en enfilade sur une seule ligne, tandis que le chien laisse des empreintes parallèles. Les explications sont interrompues par les premiers hurlements de la meute, longs et espacés. Mon mentor me dit que les chiens « rapprochent », c'est-à-dire qu’ils suivent une piste qui date d’un petit moment, et que les aboiements se feront plus courts et rapprochés lorsqu’ils seront à la poursuite de l’animal qui se dérobe devant eux.

Un résultat inattendu
Le rabatteur me dit que pour lui, l’intérêt de cette chasse est de faire travailler ses chiens sur un animal difficile à suivre, dont la réputation d’astuce est parfaitement justifiée. Puis il rajoute « il y a trop de renards dans le secteur, et comme c’est un excellent chasseur, ça pose un problème à tous les animaux qui se reproduisent au sol, les petits n’ont pas le temps de grandir assez pour leur échapper et font des proies faciles ».
Notre conversation est interrompue par deux coups de feu, puis trois autres quelques secondes après, alors que la meute se dirige dans la direction opposée. Tandis que nous arrivons sur les lieux des derniers tirs, nous entendons deux coups au loin dans le sens des chiens. Vingt minutes plus tard, la meute s’arrête.
Le premier chasseur que nous croisons a abattu une jeune femelle. Il nous informe que celle-ci n’était pas menée (c'est-à-dire poursuivie par les chiens), et il pense que le chasseur en contrebas a dû la rater. Nous rejoignons le deuxième, et nous avons la surprise de trouver la dépouille d’un jeune mâle devant lui. « C’est la première fois que j’en vois deux l’un derrière l’autre » déclare-t-il, puis il rajoute « ça m’a tellement surpris que j’ai raté l’autre ».
Nous partons là où la meute s’est arrêtée, et pour cause, un troisième animal, un mâle énorme, a été tiré alors qu’il se dirigeait vers son terrier. Le tireur m’explique que c’est un coup de chance, « on n’a pas toujours l’occasion d’en tirer d’aussi gros, car généralement, ils sont suffisamment malins pour échapper aux chiens et passer là où il n’y a personne ». Mon accompagnateur ramasse ses chiens et corne trois fois pour annoncer la fin de la première partie de la battue.

----Le déterrage, appelé aussi vènerie sous terre, est un mode de chasse consistant à déterrer l’animal chassé (renard ou blaireau), une fois qu’il a été acculé au fond de son terrier par un chien de taille adaptée. Cette pratique s’utilise aussi pour éliminer les nichées de renards.-----Un gibier très présent
Nous rejoignons tous les chasseurs au point de rendez-vous, et là nous apprenons qu’un autre renard a été aperçu, mais de trop loin pour être tiré. Les dépouilles sont remises à un membre du groupe qui les donnera à un empailleur.
Aucun autre animal ne sera tué pendant la deuxième partie de la battue, réalisée sur une autre partie du territoire de l’ACCA. En revanche, sept renards ont été vus, en plus de ceux qui ont été abattus, et ce sur un territoire total d’un peu moins de 80 hectares. « C’est la démonstration du problème de surpopulation que nous avons à gérer sur le territoire, quand un prédateur est surreprésenté, toutes les espèces susceptibles de constituer ses proies en font les frais, et leur progéniture en tête », conclut le président de l’ACCA.

N.S.

  • Pour ou contre la chasse au renard ?

Du côté des écologistes et des agriculteurs, le point de vue sur le renard est différent de celui des chasseurs. Les premiers demandent à ce que l’animal ne soit plus classé en nuisible, les seconds voient en lui un allié précieux contre les rongeurs, alors que les derniers le considèrent comme un gibier classé nuisible.   S'ils ne demandent pas l’abandon de la chasse au renard, les écologistes du REN43 (Réseau Ecologie Nature Haute-Loire) ne veulent plus que l’animal soit classé comme nuisible, comme ils l’ont demandé avant l’ouverture de la saison de chasse 2015-2016, ce qui mettrait fin au piégeage, au déterrage et aux battues après la fermeture.

Les arguments présentés
Pour appuyer sa demande, le REN43 réfutait les quatre critères invoqués pour la classification en espèce nuisibles, à savoir : L’animal ne représenterait aucune menace sur la santé et la sécurité publique, dans la mesure où il véhiculerait moins de maladies que les chiens et les chats, il éviterait même la propagation des épidémies. Il ne menacerait pas plus la protection de la faune et de la flore, son rôle serait plutôt celui d’un prédateur régulateur des populations d’herbivores, et en cela il participerait à l’équilibre naturel. Il ne causerait aucun dommage aux activités agricoles, forestières, et aquacoles. Il serait même un allié des agriculteurs, dans la mesure où son alimentation est surtout composée de rongeurs susceptibles de causer des dégâts aux cultures. Et enfin, les menaces et les dommages qu’il pourrait causer à d’autres formes de propriété, notamment les basses-cours, pourraient être aisément évités en adoptant des mesures élémentaires de protection des poulaillers.

Un animal utile aux paysans
Un agriculteur bio du plateau de La Chaise-Dieu nous a ainsi confié : « Pour moi, le renard est un prédateur utile, sa présence diminue sensiblement le nombre de rongeurs qui s’en prennent à mes cultures ». Interrogé sur l’éventuel impact négatif sur le reste de la faune, il répond : « c’est le problème des chasseurs, pas le mien ».

N.S.

Les modalités de chasse en battue du renard sont les mêmes que pour la chasse au "cerf" :
1. Battue
Sauf dérogation exceptionnelle et motivée délivrée par le Directeur départemental des territoires au titulaire du droit de chasse après avis de la fédération départementale des chasseurs, chaque équipe devra être composée d’au moins 5 chasseurs, avec un maximum de 7 équipes. Chaque participant devra, préalablement à la battue, signer le registre des battues obligatoirement obtenu auprès de la fédération départementale des chasseurs.
2. Approche, affût
A l’approche ou à l’affût, la chasse doit s’effectuer avec une seule arme de tir et sans chien. Le tir s’effectue avec une arme à canon rayé (carabine) ou un arc. Le chasseur devra être porteur au cours de l’action de chasse du ou des bracelets nécessaires, et de l’autorisation délivrée par le responsable du territoire de chasse, émanant obligatoirement du carnet obtenu auprès de la fédération départementale des chasseurs. 

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