21 septembre 1980 : témoignages d'un dimanche tragique

ven 18/09/2020 - 18:25 , Mise à jour le 27/11/2020 à 09:08

Il avait très fortement plu toute la nuit et le dimanche matin s’annonçait bien malgré les abondantes averses. Le Club du 3 ème âge était parti en cours de matinée pour déjeuner dans la cafeteria de Mammouth.
En fin de matinée de ce dimanche maudit, les habitants de Brives-Charensac regardaient depuis la digue les flots rageurs qui offraient un spectacle exceptionnel. Quand brusquement une vague de grande hauteur a surgi et toute la Ville de Brives-Charensac a été submergée.
Les personnes massées en grand nombre sur la digue ont été instantanément trempée jusqu’aux genoux et elles ont fui en courant. Dans une rue brusquement transformée en torrent.

40 ans plus trad, il est apparu intéressant et utile de demander à un certain nombre de Brivois quel était leur ressenti, quels étaient leurs souvenirs.

Maryse, 70 ans, Brives-Charensac :
« Souvenirs de la crue. Habitant sur un côteau de Brives, je regarde la Loire monter comme elle l’a fait d'autres fois. Puis, très rapidement, le bruit s’amplifie. Les arbres et les véhicules qu'elle charrie offrent un spectacle effrayant. Et il y a la peur pour mes enfants qui sont dans Brives. La Loire saute la digue, la route de Coubon est inondée. Impossible d'aller dans le centre de Brives. Mon amie me téléphone, paniquée, me supplie de venir chercher ses enfants. Et toujours le bruit puis plus de téléphone, plus d’électricité. Et l'isolement, une nuit difficile et le lendemain l'angoisse, le chaos, la boue dans les rues de Brives et tous les morts. Il reste toujours la peur lorsqu’il y a de fortes pluies ou des orages, on ne peut pas oublier. Il y a aussi l'odeur de la boue et du fioul qui s’est répandue dans toute la Ville. »

Lucette, 96 ans, Chadrac :
« Ce dimanche, nous nous rendions en voiture dans le quartier des Ribeyres où résidait alors une partie de notre famille. Mon mari conduisait et nous avions ma belle-mère comme passagère. Quand, soudain, au milieu de l’Avenue Charles Dupuy, notre voiture se retrouve au milieu d’une arrivée d’eau massive. L’Avenue a pris brusquement pris l’aspect d’un vaste torrent dont le volume croit à grande vitesse. Ma belle-mère s’écrie alors : « abandonnons vite la voiture et montons nous réfugier dans une maison ». Ce que nous avons fait en vitesse. Nous nous sommes retrouvés au 3 ème étage d’une maison au début de la Rue de Charensac. Beaucoup d’autres personnes s’y étaient déjà réfugiées. Je me souviens qu’en entrant dans cette maison située à 50m de notre voiture, nous avons assisté à une scène incroyable : des dizaines de voitures dévalaient l’Avenue Charles Dupuy. Emportées par la force de ce torrent inattendu. Nous avons passé la journée dans cette maison dont les propriétaires nous ont fort aimablement accueillis et réconfortés par des paroles chaleureuses. Du haut de ce refuge improvisé, nous avons assisté à ce désastre inouï. »

Andrée, 70 ans, Brives-Charensac :
« J’étais au travail dans un établissement du Puy-en-Velay quand j’ai appris qu’une catastrophe se déroulait. Je n’ai pas pu rentrer chez moi le soir car les routes étaient impraticables. Mes enfants m’ont relaté la scène terrible à laquelle ils ont assisté depuis notre maison de la Rue de la Besse : des chevaux avaient été emportés par les flots. Ils ont souvent reparlé de cet évènement traumatisant ».

Sébastien, 42 ans, Solignac sur Loire :
« Nous habitions Brives-Charensac. J’avais un peu plus de 2 ans lorsque la crue nous a surpris sur la route de Coubon. Ma mère conduisait la voiture et a vu arriver beaucoup d’eau en face d’elle. Dans un excellent réflexe, elle a pris une rue montante sur la droite, pour échapper au torrent qui envahissait la route. Dans la minute qui a suivi, une énorme vague est arrivée et a emporté les voitures restées sur la route. Le souvenir qui m’a marqué, malgré mon très jeune âge, c’est l’entrée d’eau dans notre voiture. Je me souviens parfaitement avoir vu le plancher se recouvrir d’eau. Etant dans le siège auto, je n’ai pas pu voir ce qui est arrivé à d’autres automobilistes mais mes parents m’en ont parlé par la suite ».

Retour en photos sur cette journée tragique
Zoomdici vous propose de revenir en images sur cette crue extraordinaire d'il y a quarante ans. Photos signées Georges roche, d Brives-Charensac.


"Les élus sur le terrain sont les yeux de la cellule de crise"
Pour ne plus jamais revivre pareil drame, les pouvoirs publics ont depuis mis en place un Plan Communal de Sauvegarde et une cellule de crise. Joint par téléphone la semaine dernière, le maire de Brives-Charensac Gilles Delabre explique :
« Lundi soir et comme chaque année avant la période des pluies cévenoles, les élus et les services ont réalisé un exercice crue. Cet exercice permet de simuler une situation de crise provoquée par une crue en mettant en application les dispositions du Plan Communal de Sauvegarde et notamment l’activation de la cellule de crise. Cette année, cet entrainement était d’autant plus important du fait de l'arrivée de nouveaux élus ayant rejoint l’équipe municipale. Chacun doit apprendre les exigences de son poste afin d’être opérationnel au moment venu. C’est aussi le temps de poser des questions et d’expérimenter les différentes procédures, selon l’importance de la crue. C’est aussi le moment d’apporter certains ajustements au regard des constats de terrain.
Sur la base d’un scénario préétabli, les membres de la cellule de crise ont lancé l’automate d’appel, répondu à des appels fictifs (de la Préfecture, de particuliers, de la presse, de parents d’élèves inquiets) pendant que d’autres étaient sur le terrain pour repérer les points stratégiques de surveillance du niveau d’eau, vérifier le matériel nécessaire au barrage des routes ou se rendre chez les Brivois ne répondant pas au téléphone.
Les élus sur le terrain sont les yeux de la cellule de crise et sont en contact permanent avec le PC de crise. A partir du PC crise où chaque mission est clairement identifiée, des appels automatiques sont envoyés à la population la plus à risque, le niveau de l’eau à Goudet est observé via Vigicrues et les différentes équipes d’intervention sont coordonnées par la cellule de crise. Les équipes techniques et de communication étaient en état d’alerte, prêtes à agir en fonction des directives données. Face au risque inondation, la sécurité des personnes reste la priorité des élus et des services de la mairie ».

G.R.

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