Lundi 28 avril, près de 130 personnes se sont réunies sur le parvis de l’hôpital Émile Roux pour soutenir l’équipe d’endoscopie et tirer la sonnette d’alarme sur l’état inquiétant de l’hôpital public. Un rendez-vous pacifique, mais bruyant a eu lieu, en écho aux mouvements de soutien aux soignants pendant la crise sanitaire.
Cette mobilisation intervient alors qu'une affaire de comportement inadapté d’un praticien, révélée dans un précédent article, est désormais entre les mains de la justice après plusieurs plaintes déposées.
Un climat de souffrance au travail
Le rassemblement a été marqué par des discours engagés, dénonçant non seulement la situation dans le service d’endoscopie, mais aussi l’état global de l’hôpital public.
Le docteur André Gilbert, surnommé "le grincheux du CHER", a ouvert la série d’interventions. Il a rapporté un échange troublant avec la direction de l’établissement. « On a muté les infirmières, mais dans leur intérêt », déclara t-il, déclenchant un concert de casseroles, de cris et de sifflets.
Avec émotion, il a témoigné de l’atmosphère délétère qui règne dans l’établissement « beaucoup d’infirmières ont peur et n’osent plus parler. C’est dire le climat qui règne ici. » Le Dr André Gilbert a mis en garde contre un risque dramatique « il ne faudra pas dire qu’on n’était pas au courant. »
Amandine Rabeyrin, secrétaire de la CGT hospitalière d’Émile Roux, a rappelé que « Une procédure de danger grave et imminent a été déposée. » Elle précise également que « la médecine du travail aussi met en évidence une telle souffrance au travail. »
La direction reste silencieuse
« Elles ne cherchaient pas le conflit, elles demandaient juste que leur douleur soit reconnue. Ce qu’elles ont reçu en retour, c’est le silence, le déni, l’exclusion »
Les syndicats ont saisi l'Ordre des médecins et signalé la situation au procureur. Pour autant, jusqu’à présent, la direction n’a pris que peu de mesures concrètes selon les syndicats.
Carine Quitin, de FO, a dénoncé un déni de la souffrance exprimée par les soignants « Elles ne cherchaient pas le conflit, elles demandaient juste que leur douleur soit reconnue. Ce qu’elles ont reçu en retour, c’est le silence, le déni, l’exclusion », elle évoque « une violence institutionnelle inacceptable ». Amandine Rabeyrin ajoute que « la seule initiative qui a été prise par la direction a été d’évincer nos collègues infirmières du service, même si cela a été annoncé comme une mesure de protection, ça a été vécu comme une punition. »
Des soignants solidaires mais prudents
Sur place, de nombreux soignants ont tenu à manifester leur soutien, parmi eux, Marie-Odile Fichelle, infirmière retraitée après 20 ans de service à Émile Roux était présente.
Elle a eu connaissance des difficultés rencontrées par les anciennes collègues en poste, « les faits ne sont pas reconnus, les victimes ne sont pas écoutées » dit-elle. Si elle garde de bons souvenirs de ses années d’exercice, elle constate amèrement que « les choses ont changé et tout doit aller plus vite aujourd’hui. »
Une infirmière du service vasculaire ORL, actuellement de nuit, est arrivée un peu plus tôt avant sa garde pour soutenir ses collègues. Elle décrit une dégradation continue « tout est fait pour rendre l’hôpital rentable, au détriment des conditions de travail devenues invivables. »
Une autre infirmière, souhaitant conserver l’anonymat décrit des « conditions de travail chamboulées ». Elle a changé de poste suite à la mutation d’une infirmière du service endoscopique. Elle confie également avoir travaillé dans le secteur privé et déplore « Je pensais que l’hôpital public offrait une meilleure prise en charge, mais ce n’est pas le cas, ni pour les patients, ni pour les soignants », selon elle « ils font en sorte de supprimer l’hôpital public. »
Malgré nos sollicitations, la direction de l’hôpital Émile Roux ne souhaite pas s'exprimer.