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Laurent Wauquiez demande à tous de lutter contre le gaspillage alimentaire dans les lycées

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 16/12/2022 à 12:00

Cette lettre du Président de Région en date du 1er décembre, destinée aux parents de lycéens et aux proviseurs, semble être accueillie par deux sentiments contraires. L’indifférence et l’indignation. Si la lutte contre le gaspillage alimentaire dans les cantines est compris par tous, c’est le contexte qui fait grincer certaines mâchoires.

Le courrier en question a été adressé aux proviseurs des lycées des 12 départements de la région Auvergne-Rhône-Alpes qui l'ont eux-mêmes transféré aux parents des lycéens. « Que votre enfant déjeune occasionnellement ou de façon plus régulière au restaurant de son lycée, je souhaitais partager avec vous les constats faits en termes de gaspillage alimentaire ».

Après des données chiffrés sur la moyenne des aliments gaspillés par assiette, la lettre signée de Laurent Wauquiez souligne alors : « Dans un contexte de pouvoir d’achat contraint, en complément d’un prix de repas encadré, je me dois d’engager, en Auvergne-Rhône-Alpes, pour chacun des 280 restaurants lycéens, un effort plus marqué sur la réduction de ce gaspillage. (…). Les économies générées viendront atténuer en partie les surcoûts que nous subissons tant sur les matières premières que sur l’énergie ».

Selon la Région AuRa, un repas de 750g dans l’assiette engendre 144g de déchets alimentaires qu’ils soient issus de la préparation, des retours plateau et du non consommé (absence des élèves).

« À nous culpabiliser de la sorte, je trouve ça lamentable ! »

Le combat est louable. Le contexte un peu moins selon certains. « Comment peut-il oser demander à tous de faire des efforts en ce sens alors qu’il organise des dîners à plus de 100 000 euros pour quelques convives ?, déplore une maman brivoise, parent d’un lycéen au Puy. Quand j’ai lu ce courrier, je me suis sentie presque méprisée finalement. »

Elle assène : « Il est bien évident que tout le monde est sensible sur le gaspillage alimentaire ou autres par nécessité écologique et financière. Que le Président de Région s’efforce à nous montrer du doigt, à nous infantiliser ainsi et nous culpabiliser de la sorte, je trouve ça lamentable ! ».

« N’est-on pas là sur des intentions de favoritisme ? »

Une autre maman d’une lycéenne à Simone Weil ajoute, le verbe acéré : « Donner ainsi des leçons de moral aux parents et enfants me perturbe particulièrement. Surtout en ce moment. Est-ce à nous de nous soucier de l’économie de la Région et d'absorber les abus des grands ? »

Elle ajoute : « La Région semble demander des comptes aux proviseurs. Certes, c’est le Conseil régional qui finance les lycées. Mais les proviseurs dépendent de l’Éducation nationale et se doivent de répondre uniquement aux attentes du Rectorat »
Pour terminer enfin : « Quand je lis sur le courrier que les lycées participants seront récompensés...N’est-on pas là sur des intentions de favoritisme ? »
 

Le courrier du Président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes dans sa totalité ▼

« La lettre n’a rien changé dans notre façon de travailler ou de penser »

Nous avons tenté de contacter plusieurs lycées pour s’exprimer sur le sujet. Deux ont accepté de répondre. D’autres n’avaient pas le temps. Le lycée Simone Weil au Puy-en-Velay, fort de 1 000 repas par jour, partage « que la lutte contre le gaspillage est une préoccupation que nous avons tous professionnellement parlant. Nous avons tous envie de réduire le gaspillage. La lettre n’a rien changé dans notre façon de travailler ou de penser. »

De leur côté, le gaspillage alimentaire dans leur restaurant est principalement généré par la non consommation des élèves sur place. « Quand un élève n’aime pas, il ne mange pas ce qui lui est servi, précise le service du lycée général. Ça, c’est un vrai problème. »

Il soulève aussi : « Néanmoins, nous n’avons pas ou très peu de gaspillage pour la production des repas. Le lycée possède des outils qui permettent de resservir le soir et le lendemain les mets qui étaient proposés à midi grâce à des cellules de refroidissement ».

Il termine enfin : « Le 12 janvier, nous allons faire une pesée du gaspillage afin d’avoir des analyses précises sur le sujet. Durant ce mois également sera mis en place un système de petite, moyenne et grosse faim. L’élève indiquera l’un de ces trois choix aux personnels de la cantine avant de prendre son assiette ».

« Il n’y a pas lieu de polémiquer ! La Région nous a toujours aidé sur plusieurs dossiers et notamment sur celui du dispositif du self participatif ». Pierre Souveton, lycée Léonard de Vinci

« L’élève choisit lui-même ce qu’il veut manger et la quantité souhaitée »

D’après le lycée Simone Weil, l’établissement le plus innovant en la matière est le lycée Léonard de Vinci à Monistrol-sur-Loire. « Depuis le 29 avril 2019, le lycée est équipé d’un service par self participatif, explique Pierre Souveton, gestionnaire comptable de la structure scolaire qui sert 930 repas à midi et une centaine le soir. L’élève choisit lui-même ce qu’il veut manger et la quantité souhaitée ».

En résumé, les étudiants prennent une entrée parmi une dizaine de choix possible. Ils s’installent une première fois pour manger. Une fois l’entrée terminée, ils se relèvent pour les plats chauds. « En fonction de son état de satiété, l’élève décidera alors de la quantité qu’il veut à ce moment-là », explique Pierre Souveton. Et idem pour les desserts.

Du gaspillage divisé par dix

Résultat ? « Quand les élèves déposent à la fin leur plateau sur les dessertes, ils sont en général vides, affirme le gestionnaire. Le principe du ‘On est jamais mieux servi que par soi-même’ fonctionne parfaitement ! »

D’après lui, 30 kg de denrées étaient gaspillés chaque jour avant le 29 avril 2019. Ce chiffre a été divisé par dix. « Les trois kilos d’aujourd’hui sont les épluchures des pommes ou des bananes, par exemple. Ce reliquat finit ensuite au composteur pour fabriquer du terreau ».

En guise de conclusion, le courrier de la Région se termine par cette promesse : « La Région accompagnera chaque établissement dans cette démarche et les lycées engagés en manqueront pas d’être récompensés pour la pertinence des initiatives prises ».