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Rénovation du lycée Roche Arnaud : les dessous d'un "joli papier cadeau"

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:42

Toute la presse locale était conviée ce lundi 20 juin 2016 devant l'établissement scolaire ponot pour annoncer le lancement des travaux de rénovation du lycée Roche Arnaud.
"Une priorité qui devient réalité" pour Laurent Wauquiez, le Président de la Région Auvergne Rhône-Alpes, qui a donné le coup d'envoi des travaux ce lundi matin pour la première tranche des travaux, qui devraient débuter le lundi 11 juillet 2016 et s'étaler jusqu'au premier semestre 2019.

Laurent Wauquiez appose sa griffe sur les travaux
Seul couac : il s'agit d'un projet voté par l'ancienne mandature, ce qui explique également que les travaux n'attaquent que cet été (ils étaient prévu au début du printemps mais ils n'auraient pas porté la signature de Laurent Wauquiez si proche de son début de mandature). Pour marquer de sa griffe les travaux, l'ancien maire du Puy a donc sorti de son chapeau un chèque de huit millions d'euros supplémentaires, ce qui permet de pratiquement doubler le coût total de l'opération. 
Une somme qui sera dédiée à la remise en l'état de l'intérieur de l'établissement, de l'internat aux salles pédagogiques, en passant par les ateliers. Une bonne nouvelle pour le lycée ponot, même si on peut s'interroger sur la teneur de la promesse et la méthode (aucune étude de faisabilité ni de devis pour l'instant, un dossier pas encore abordé en commission ni en conseil d'administration du lycée...).

Il pleut en classe, de l'amiante à portée de main...
Cette première tranche de travaux concerne l'isolation et la mise en accessibilité aux personnes à mobilité réduite. Il s'agira notamment de reprendre les façades et les boiseries, améliorer l'isolation et procéder à des mises aux normes, sans oublier le déploiement de la fibre optique dans l'établissement. Notons que l'établissement date des années 1970 et que sa vétusté commençait à sérieusement déranger.
Valentin, un élève du lycée ponot nous raconte les situations les plus aberrantes auxquelles les lycéens doivent faire face à cause de la vétusté des locaux : des élèves auraient pris des appartements en ville tant les dortoirs sont en mauvais état, l'accueil des personnes à mobilité réduite n'est pas effectif, la pluie qui tombe en classe ou encore des ouvertures dans les murs où il suffisait de tendre le bras pour saisir de l'amiante...

Laurent Wauquiez ne se fait pas prier pour tacler l'ancienne majorité
"Roche Arnaud attendait ces travaux depuis très longtemps", déplore le député de Haute-Loire. Il est vrai qu'ils devaient débuter il y a un an et demi déjà, selon les annonces de René Souchon, l'ancien Président du Conseil régional d'Auvergne. Et Laurent Wauquiez ne se fait pas prier pour le tacler : "c'est l'un des lycées les plus laissés à l'abandon depuis des années". Son sucesseur à la mairie du Puy, Michel Chapuis, insiste : "en moins de six mois, Laurent Wauquiez a remis sur les rails un projet au point mort depuis des lustres. C'est une excellente nouvelle pour Le Puy qui se verra doté d'un lycée digne de notre territoire".
Laurent Wauquiez est le Président de la Région Auvergne Rhône-Alpes. Vous avez le sentiment que ce lycée est en très mauvais état car la mandature précédente a abandonné ce lycée ponot ? Vous estimez que vos prédécesseurs n'ont traité le problème qu'en surface ? Quelle seront alors les travaux entrepris ? À Quelle échéance et à quel coût ?

"Laurent Wauquiez a stoppé tous les travaux prévus pour les sortir, un par un, au fur et à mesure de ses annonces"
L'ancienne mandature socialiste étant tant décriée, Zoomdici a pris le soin de contacter Anna Aubois (PS), qui était vice-présidente du Conseil régional d'Auvergne en charge de la Jeunesse, du Sport et de la Vie associative sous la mandature de René Souchon, jusque fin 2015. Aujourd'hui, elle est élue minoritaire au Conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes, et siège à la commission lycées. Au sein de cette commission, elle assure que le dossier du lycée Charles et Adrien Dupuy n'a pas été évoqué jusqu'à présent. "Mais, ça ce sont les méthodes habituelles", lâche-t-elle, "Laurent Wauquiez annonce mais rien n'est jamais écrit ou voté". Pour elle, ces travaux ne sont que la mise en application des 10M€ déjà alloués pour le lycée dès avril 2014 sous l'ancienne mandature.
Mais, selon Laurent Wauquiez, les 8 millions d'euros qu'il annonce pour la première tranche des travaux viennent s'ajouter à une enveloppe globale qui s'élèvera, in fine, à 15 à 20M€. "Jusqu'à preuve du contraire, je ne sais pas qu'il y a 8M€ supplémentaires", insiste Anna Aubois qui rappelle que les travaux devaient commencer aux vacances de Noël et que "quand Laurent Wauquiez a été élu [Ndlr : en janvier] il a décidé de stopper tous les travaux prévus dans les lycées de la Région pour les sortir, un par un, au fur et à mesure de ses annonces"

----Un lycée plein de débouchés
"C'est un lycée qui a pour moi une vocation très importante en Haute-Loire", nous confie Laurent Wauquiez, "car c'est dans la tradition le lycée scientifique, or ce sont des domaines où nos étudiants trouvent ensuite le plus facilement du travail et il y a aussi la partie enseignement professionnel qui correspond à des métiers dans lequels on sait que lorsque nos étudiants s'orientent, à l'arrivée ils trouvent un job. Quel dommage de laisser ensuite un outil de travail en ruines".-----Roche Arnaud "en reconquête" des effectifs
Par le passé, le lycée ponot a recensé jusqu'à plus de 900 élèves. Aujourd'hui, on en dénombre 773 en comptant les BTS. Et en parrallèle, l'autre lycée public de la commune, Simone Weil, est passé de 1 000 à presque 1 200 élèves dans le même temps. L'objectif est donc clairement avoué par Philippe Trefelle, le proviseur du lycée Charles et Adrien Dupuy : "on est en reconquête".
Pour y parvenir, le chef d'établissement explique : "on a besoin d'une réfection globale des locaux, mais aussi d'une réflexion globale pour les plateaux techniques et électrotechniques, mais aussi la redisposition des salles de science, pour avoir enfin des salles qui soient à la hauteur de la qualité pédagogique de nos enseignants". Il estime que la vétusté des locaux nuit à l'image d'un lycée qui est pourtant "en pointe au niveau scientifique, mais aussi dans le domaine des arts comme le théâtre ou les lettres".
Philippe Trefelle est le proviseur du lycée Charles et Adrien Dupuy. De quand date ce lycée et pourquoi se trouve-t-il dans cet état aujourd'hui ? Ce manque d'entretien constitue-t-il un frein aux inscriptions d'élèves dans l'établissement ?

"Pas de rénovation majeure depuis les années 1970" alors que Simone Weil a bénéficié de 30M€
Isabelle Fichet est la présidente du conseil local FCPE (Fédération des Conseils de Parents d'Elèves des Ecoles Publiques). Elle n'a pas été invitée à la conférence de presse de lundi et n'était pas au courant de ces dernières évolutions, non évoquées en conseil d'administration du lycée. Elle avait insisté sur la nécessité de la rénovation intérieure des bâtiments (murs fissurés, amiante), et pas seulement extérieure, auprès de Laurent Wauquiez en janvier. Elle devrait donc être satisfaite.
Quant aux 8M€ supplémentaires, "c'est nettement mieux" selon elle, mais "ça ne suffit pas quand on sait que Roche Arnaud n'a pas connu de rénovation majeure depuis sa création dans les années 1970". Et d'évoquer les 30M€ dont a bénéficié le lycée Simone Weil du Puy, "sans vouloir monter les lycées les uns contre les autres". Elle fait valoir la double casquette de Roche Arnaud en tant que lycée général et professionnel : "On nous dit que c'est l'avenir, mais on laisse à l'abandon ! ". Elle veut pour illustration, parmi d'autres, la fermeture de la classe préparatoire aux écoles d'ingénieurs qui n'a duré "que trois ou quatre ans".

"Tout semble avoir servi de prétexte : travaux plus urgents ailleurs, devis sous évalués, retard du permis de construire, lots non pourvus, etc"
Alors pourquoi Roche Arnaud est toujours passé sous la pile du dessous, depuis 25 ans ? "Je ne sais pas", répond-elle, "les équipes de direction successives du lycée n'ont pas peut-être pas été assez offensives... La Région, sous l'ancienne mandature, voulait faire des économies... Pourtant, on avait même Arlette Arnaud-Landau [vice-présidente de la Région alors] au conseil d'administration, elle nous disait qu'elle faisait ce qu'elle pouvait...".
Il y a deux ans, les parents d'élèves ont « forcé la main » pour organiser une table-ronde avec la rectrice et le président de Région d'alors René Souchon. Finalement, "après avoir traîné les pieds", 10M€ ont bien été débloqués en avril 2014 pour attaquer les travaux début 2015. Alors pourquoi tant de retard ? "On avait oublié qu'il fallait remplacer le toit", puis "tout semble avoir servi de prétexte : travaux plus urgents ailleurs, devis sous évalués, retard du permis de construire, lots non pourvus, etc". Aux dernières nouvelles, le début des travaux, prévus au 1er mai, a été repoussé à début juillet pour cause d'examens. Alors, ces travaux, Isabelle Fichet n'y croira que quand elle les verra. 

Pas de portique de sécurité à l'horizon
Laurent Wauquiez avait annoncé la mise en place de portiques de sécurité dans une quinzaine de lycées avant de rétropédaler. Comme nous l'avions expliqué au moment de l'annonce, Vu les temps de passage, les lycéens ont intérêt à se lever tôt. Selon nos calculs, en prenant une moyenne de 440 élèves (rapport entre le nombre de lycéens divisé par le nombre de lycées de la région), l'équivalent d'un très petit établissement, on arrive déjà à une file d'attente de 73 minutes en prenant une moyenne de dix secondes par élèves...
Laurent Wauquiez est le Président de la Région Auvergne Rhône-Alpes. Petite parenthèse taquine pour finir : pas de portique de sécurité dans ce lycée ? Est-ce que c'est techniquement réalisable dans un lycée ouvert comme celui-ci ? 


Maxime Pitavy