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Garde à vue et audition : « La lutte des Sucs n’est pas morte. Elle est loin de l’être »

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 24/10/2022 à 06:00

Après la conférence de presse du 5 octobre sur le tracé de la déviation RN88, trois personnes de la Lutte des sucs ont été mises en garde à vue. Suite à ça, six autres membres du collectif ont été auditionnés par la gendarmerie. « Oppression ». « Intimidation ». « Muselage ». Tels sont les qualificatifs employés par les opposants au projet de la Région pour décrire l'opération.

Le mercredi 5 octobre, des militants de la Lutte des Sucs, des sympathisants et des propriétaires fonciers dont les terrains se retrouvent en sursis car localisés sur le tracé de la déviation RN88, se retrouvent dans le lieu-dit Rabuzac à St-Etienne-Lardeyrol.

Ce jour-là vers 16 heures, une vingtaine de gendarmes, dont une dizaine appartenant au peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG) interviennent sur les lieux. Devant eux, une trentaine d’opposants. Après avoir immobilisé les personnes présentes sur le site et relevé leur identité, les gendarmes place alors en garde à vue Renaud Daumas, agriculteur, élu écologiste au Conseil Régional Auvergne-Rhône-Alpes et deux autres personnes souhaitant l'anonymat.

« Si vous vous opposez, voici ce que vous récolterez »

Quelques jours après, six autres personnes ont la surprise d’ouvrir à des gendarmes munis d’une convocation pour une audition libre. « Nous sommes accusés d’entrave au travail pendant 1h30, témoigne l’une d’elle souhaitant garder l’anonymat. Je suis vraiment tombé de haut. L’opération a été psychologiquement très violente. Nous nous sentions comme de dangereux hors-la-loi, de grands criminelles recherchés ». La personne ajoute : « Le message était clair. Si vous vous opposez, voici ce que vous récolterez ».

« La Région tente de mettre la pression à tous ceux qui auraient un avis différent de la sienne. Son Président veut intimider quiconque le gène dans ses projets »

« Certains gendarmes étaient lourdement accoutrés, vraiment impressionnants, continue l’opposant. Pendant les 7 jours entre la venue des militaires chez moi et le jour de la convocation, je n’ai pas dormi, vraiment inquiet, ne sachant pas à quelle sauce nous allions être mangé ».

Le 19 octobre vers 15 heures, les personnes conviées à être entendues par les enquêteurs s’installent entre les murs de la gendarmerie de Saint-Julien-Chapteuil. Un attroupement se forme devant la caserne en signe de soutien.

À noter qu’une autre personne en audition libre avait, jeudi 20 oct, elle-aussi partagé à Zoomdici sa mésaventure. Elle a ensuite préféré retirer son témoignage par peur de pressions et de représailles.

« Nous avons tous bien compris que la seule pression était celle qui venait d’en haut »

« L’audition a duré environ une heure, confie la personne. Les gendarmes présents m’ont aussitôt rassuré. Même eux semblaient embarrassés qu’on soit là pour si peu de choses. Ils nous ont posé les mêmes questions (Questions et réponses dont nous ne saurons rien, l’enquête étant en cours, NDLR) ».

En dépit du contexte et de l’ambiance tendue générée par les lieux, la personne insiste : « Les gendarmes ont été extrêmement gentils et ont justifié notre présence parce qu’on leur avait dit d’agir comme ça. Qu’ils obéissaient juste aux ordres. A ce moment là, nous avons tous bien compris que la seule pression était celle qui venait d’en haut simplement pour nous faire peur ».
Elle termine ainsi : « Mais chose est certaine. La lutte des Sucs n’est pas morte. Elle est loin de l’être ! »

Le mercredi 19 octobre, la Lutte des Sucs a écrit et partagé un communiqué sur le sujet. Le voici dans son intégralité ▼

« Nous sommes tous face à des enjeux capitaux : le changement climatique, l'effondrement de la biodiversité et l'entrée de la société en périodes de crises énergétiques et alimentaires ! C'est face à ce triste constat que des citoyens s'opposent à un projet mégalomane, destructeur, coûteux et anachronique en cours sur le territoire de la Haute-Loire : le projet rn88 de la mise en 2x2 voies de la déviation du Pertuis et de Saint-Hostien. »

« Un "Grand Projet Inutile" »

« Dans le combat engagé avec la Région, c'est David contre Goliath qui se rejoue. D'un côté des citoyens.nes désabusés.es qui, face à la lenteur de la justice à étudier les recours dont le traitement a une nouvelle fois été repoussé, essaient par des actions pacifiques de faire reconnaître ce projet comme un "Grand Projet Inutile" (GPI), qui investit dans le réseau routier alors que le gouvernement appelle à la sobriété et qu'en parallèle la volatilité des prix des carburants annonce une réduction de l'utilisation du véhicule individuel. »

« Répression policière totalement démesurée »

« Et de l'autre côté, une Région qui fait pression sur les propriétaires non expropriés lors de la DUP, caduque depuis 2007, et cherche à museler ses opposants par le biais d'une répression policière totalement démesurée. A commencer par des mises en garde à vue lors d'une conférence de presse du mercredi 5 octobre après midi, visant à informer le public de la reprise du défrichement sur le tracé et de la non légitimité de cette reprise alors que les recours juridiques n'ont toujours pas été examinés ».

« Écraser une opposition grandissante »

« Ces arrestations ont été effectuées avant même le départ des journalistes. Alors que, parallèlement, deux semaines après le dépôt d’une plainte à Clermont-Ferrand d'une propriétaire d'un terrain dont les arbres ont été coupés illégalement sur sa propriété qui se trouve sur le tracé, cette dernière n'a toujours pas été prise en compte par les autorités locales. »

« Et maintenant par des convocations à des auditions libres qui n'ont pas d'autres objectifs que d'écraser une opposition grandissante. Force est de constater une justice toujours plus à double vitesse. C'est pourquoi nous souhaitons interpeller les citoyens.nnes sur ces faits et dénoncer cette injustice ainsi que d'apporter notre soutien à nos camarades convoqués pour ces auditions ».