Vins et œuvres d'art : une alliance qui coule de source

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:59

Ces drôles de dames sont trois artistes de trois disciplines différentes mais qui, à bien observer et écouter, s'entremêlent dans les émotions les plus profondes. Cette expérience qu'elles proposaient vendredi soir en est la preuve.
Tout commence par un simple regard
Le rendez-vous était donné au salon de tatouage Skellington créé par Solenne Cuenin et Gérald Holzheuer il y a deux ans. Accrochés sur les murs blancs du long couloir d'entrée, des tableaux dont les couleurs captent le regard. Mais sans s'approcher, difficile de définir une image, une forme. Et déjà, l'expérience commence car il faut se concentrer, s'extirper du superficiel pour observer toutes ces formes qui jaillissent de ces murs. Ces oeuvres, ce sont des mandalas réalisés par Emilie Paulhe, une artiste originaire de Vorey-sur-Arzon. Du spectacle vivant -- Emilie a fait beaucoup de théâtre, elle était également la chanteuse du groupe altiligérien La Bande à Ponots -- aux arts graphiques, le chemin n'a pas été long. Son inspiration s'est d'abord portée sur la confection de licornes en origami. Puis, passionnée par la photographie et la nature, elle se met à capturer tout ce qui peut attirer son regard lors de ses balades au gré des chemins de la Haute-Loire en l'occurrence. Des images qu'elle stocke dans son ordinateur et retravaille à partir d'un logiciel. Mais un jour, la souris glisse, en la rattrapant son doigt clique sur un bouton, elle découvre par le plus grand des hasards la fonction kaléidoscope.
"Au moment où je ressens quelque chose, je sais que c'est la bonne image"
Une fonction qui multiplie par deux millions les possibilités sur une seule image. Et là, plus question de faire confiance au hasard. "J’ai appris à voir ce qu’on appelle la géométrie sacrée qui a des effets sur le corps, l’esprit, sur tous les aspects de l’être. Quand je compose mes images, je bidouille mes petits boutons et au moment où je ressens quelque chose, je sais que c'est la bonne image, qu’il y a une ouverture vers l'invisible, vers les sensations, l'intériorité et que je peux emmener les gens plus loin", confie Emilie Paulhe.
"Imaginaire pour certains, inconcevable pour d’autres"
Claudine Beaudouin, chef-sommelier de l'équipe de France de Gastronomie, a rejoint ce duo (Solenne et Emilie) pour mettre son savoir-faire au service de l'art et proposer au public d'associer un vin à une oeuvre d'art. Une expérience réalisée pour la toute première fois en 2004 au Brignon, qui "peut paraître imaginaire pour certains, inconcevable pour d’autres", s'amuse Claudine, gérante de la Cave de la Chèvrerie. Si elle s'en amuse, d'autres rient jaune. Car l'art et le vin sont, parmi d'autres, deux disciplines qui posent beaucoup de questions aux non-initiés : ai-je les références qu'il faut pour comprendre ce que l'on veut me montrer, me faire goûter ? "Comme pour l'art, on n’est pas obligé d’avoir appris le vin pour pouvoir l’apprécier. Nous, les sommeliers, parfois on s’étale beaucoup sur des descriptions bien définies, avec un langage particulier qui peut faire peur à certaines personnes. Moi, j’ai plutôt envie de savoir ce que les gens ressentent. Pour démocratiser, pour dire que le vin c’est ouvert, c’est du plaisir et du partage."


(Claudine Beaudouin face à l'oeuvre "Light and Dark" d'Emilie Paulhe. Photo © Zoomdici)

----L'exposition "Mandalas de lumière" d'Emilie Paulhe de l'Atelier des lumignons, est à voir chez Skellington, jusqu'à fin décembre. (Entrée libre)-----Face à la première oeuvre de l'artiste voreysienne intitulée "Light and Dark", c'est elle qui partage son ressenti. "J'y vois un côté mystique, puissant, lumineux, généreux, profond, tranchant. J'associe cette oeuvre à des vins plutôt dans la puissance et dans la générosité donc les rouges, et le côté tranchant dans son caractère avec l’acidité et le moelleux. Je suis donc partie sur un vin de Porto qui porte le nom de Lagrima." Solenne et Emilie ont alors plongé leur nez dans le verre pour sentir les arômes fruités de ce Porto rouge, puis leur regard dans l'oeuvre, pris une gorgée** étonnées par ce velouté en bouche. "Ça vient accentuer l’aspect sensitif de l’expérience. C’est de l’immersion. Ça ouvre sur l’intérieur grâce au vin et sur l’extérieur grâce au regard", réagit Emilie. Et Claudine de conclure : "Avec les artistes, on peut avoir le même langage, avec des mots qui correspondent à l’art, à la peinture, à la photographie, à la littérature et au vin." Sa prochaine expérience aura lieu le 28 novembre prochain à la Distillerie, cette fois-ci sur l'accord mets et whiskies.
Stéphanie Marin

** « L'abus d'alcool est dangereux pour la santé »

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