Un cortège funéraire accompagne la cérémonie des vœux de l'hôpital du Puy

, Mise à jour le 27/11/2020 à 09:01

"L'année 2020 s'annonce à l'image de la précédentes : une année de luttes. de luttes avec un S", insiste Amandine Rabeyrin, secrétaire CGT santé du centre hospitalier Emile Roux. Après que le cortège funéraire ait déambulé sur le parking de l'hôpital, il est entré dans le self de l'établissement, où se tenait la cétrémonie protocolaire. 
L'occasion pour la leader syndicale de prendre le micro et rappeler le malaise que traverse la profession depuis déjà de nombreux mois : "le miracle de Noël n'a pas eu lieu. Nous sommes toujours épuisés par les économies qu'on nous impose, nous sommes en insécurité permanente, notre travail n'a plus de sens". 

"Il y a urgence... avant que tout le monde ne rende réellement sa blouse"
c'est le mot d'ordre d'Amandine Rabeyrin, qui a répertorié les demandes syndicales : l'arrêt des suppressions de postes, et même des créations "afin de permettre le remplacement de toutes les absences". Car le personnel ne cesse de le crier haut et fort : face à l'augmentation de l'activité, il faut renforcer les effectifs.
Syndicats et Gilets jaunes ont alors commencé à entonner des chants (l'hôpital dans la galère, le personnel dans la misère, de ces conditions là : on n'en veut pas !) jusqu'à être invité à quitter la salle. L'alarme incendie s'est alors déclenchée... Au bout de longues minutes, le directeur de l'établissement Jean-Marie Bolliet a débuté son discours, avant que l'alarme ne se déclenche à nouveau, et que les manifestants n'investissent à nouveau le réfectoire. Finalement, le calme est revenu et la cérémonie a pu débuter. 

Découvrez ci-dessous en vidéo les manifestants qui protestent au terme de l'intervention syndicale : 


"En discutant, on peut trouver des lignes de crêtes, même si elles sont assez étroites"
C'est ce que nous confie en aparté le directeur Jean-Marie Bolliet, qui assure être "dans une forme de dialogue social permanent" puisque les syndicats sont reçus  toutes les semaines à la direction des ressources humaines pour évoquer les situations particulières. "On essaye de faire avec les syndicats bonnne fortune sur nos capacités de remplacement, on sent qu'en discutant, on peut trouver des lignes de crêtes, même si elles sont assez étroites", ajoute-t-il.
L'hôpital du Puy est à l'équilibre financier, il peut investir et "on est dans une dynamique de progrès", estime le chef d'établissement qui précise qu'il aurait d'ailleurs pu annuler la cérémonie des voeux comme l'ont fait d'autres hôpitaux "mais j'ai tenu à ce que ces forces syndicales puissent s'exprimer, je regrette simplement que des éléments extérieurs à l'hôpital aient pu venir au-delà de ce que l'élégance du dialogue pouvait accepter".

La baisse des tarifs hospitaliers menace la santé financière de l'hôpital public
Depuis 2010, la baisse des tarifs hospitaliers, associée à une augmentation du coût de la vie, a conduit à un décrochage de près de 17 % de la valeur des prestations que l'hôpital public produit. "Pouvez-vous trouver un seul exemple d'une prestation dont le prix aurait baissé, toutes choses égales par ailleurs, de 17 % depuis 2010 ?", interroge le directeur de l'établissement vellave.

"S'il y avait certainement des pistes de rationalisation et d'économie à l'hôpital, je crois que là, on arrive à l'os"
Encore une fois, c'est Jean-Marie Bolliet qui fait ce constat et on voit bien qu'une partie du diagnostic est partagé avec les syndicats. "On ne peut plus se permettre de dégrader les capacités d'effectifs dans les services sans véritablement toucher à la qualité des soins", poursuit-il, "c'est dans ce trait de plume où il faut bien se méfier de ne pas dégrader au-delà du raisonnable l'hôpital public". Car le nerf de la guerre, c'est toujours la question financière, même si la particularité de l'hôpital du Puy, c'est qu'il est depuis des années à l'équilibre, voire à l'exédent.
Interrogé sur ses points de convergences avec les syndicats, ikl répond : "nous avons la même éthique de conviction mais pas la même éthique de responsabilité. Avoir la responsabilité d'un établissement, c'est donner des crédits aux personnels pour qu'ils puissent travailler dans de bonnes conditions, ce qui signifie aussi l'acquisition de matériel et comme notre budget est contraint, si on met tout sur le personnel, on n'a plus de matériel technologiquement entretenu et adapté aux normes".

----La solution pour un budget moins contraint ?
"Elle commence à apparaître", répond Jean-Marie Bolliet, "puisqu'en 2020, pour la première fois depuis neuf ans, les tarifs hospitaliers vont augmenter. On a aussi obtenu une aide substantielle de l'ARS de 500 000 € pour acheter du matériel courant, qu'on ne pouvait pas se payer autrement".
-----"On ne peut pas investir que sur le matériel, il faut aussi de l'humain"
Jointe par téléphone au terme de la cérémonie, Amandine Rabeyrin balaie d'un revers de main cet argument : "il y a peut être un budget contraint mais ici, on est exédentaire depuis plusieurs années donc les finances pourraient permettre des embauches". Autre désaccord : la nature des investissements. "On ne peut pas investir que sur le matériel, il faut aussi de l'humain, les robots ne remplacent pas les hommes, les machines ne peuvent pas compenser le manque de personnel", lance-t-elle.
Le directeur de l'hôpital du Puy rétorque que depuis 2016, entre départs et arrivées, il a un solde positif de 10 postes de médecins et se félicite surtout de l'apport sur le personnel paramédical, avec 76 ETP (ndlr : équivalent temps plein) non médicaux "pour porter nos projets".
Là encore, la leader syndicale n'est pas convaincue. "Ce n'est qu'un effet d'annonce car ces 10 postes ne compensent pas l'augmentation de l'activité de l'hôpital, de 5 à 10 % chaque année (ndlr 9 % en 2019). En plus, on développe de nouvelles activités qui nécessitent de nouveaux personnels, donc ces dix postes ne compensent absolument pas les manques et on ne les retrouve pas du tout dans nos conditions de travail".

Maxime Pitavy

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