Ophis : un rapport inquiétant de la Chambre régionale des comptes

, Mise à jour le 31/05/2023 à 14:00

La Chambre régionale des comptes a publié un rapport d'observations accablant sur les exercices 2015 et suivants de l'Ophis, l'un des plus gros bailleurs sociaux du Puy-de-Dôme.

L'Office Public de l'Habitat et de l'Immobilier Social (Ophis) a été crée en 1951 par le Conseil général du Puy-de-Dôme. Depuis, au gré des changements de législations, il est devenu un office public d'aménagement et de construction en 1977, puis un office public de l'habitat en 2007. Le patrimoine de l'Ophis est conséquent. Il couvre 192 communes dans le Puy-de-Dôme et une dans le Cantal (à Saint-Flour). Au total, l'organisme possède 16 628 logements sociaux, ce qui en fait le deuxième du département derrière HLM Auvergne Habitat. L'Ophis emploie 300 agents et dispose de recettes annuelles de 100 millions d'euros. 

Tout naturellement, la Chambre régionale des comptes a tout pouvoir pour contrôler cet organisme. Et la Chambre, basée à Lyon, a rendu un regard critique sur les exercices de l'Ophis à partir de 2015.

Des problèmes humains

La Chambre choisit de débuter son constat sur les problèmes de personnel qui ont émaillé l'organisme sur la période. On se souvient de la grève de près de 150 salariés du bailleur social en juin 2019, puis en octobre 2021, qui dénonçait une dégradation des conditions de travail et une baisse de proximité avec les locataires. Baisse de contacts qui se retrouve chez les locataires. André, de la résidence Les Marronniers à Issoire confirme :"Il y a quelques années, on avait un problème, quelqu'un nous répondait immédiatement au téléphone. Aujourd'hui, c'est impossible d'avoir quelqu'un."

Le point de vue de la Chambre des comptes évoque plus les changements à la tête de l'Ophis. "L'organigramme a été profondément remanié sur une courte période à deux reprises, en 2017 et 2020, ce qui a généré une instabilité perturbatrice du fonctionnement interne et une dégradation des conditions de travail." Dans des résidences, comme à Chamalières, on déplore : "le départ du gardien, adorable, investit, et de toutes les personnes qui se sentaient proches des locataires". Là aussi, la Chambre des comptes livre son verdict : "Elle est aussi caractérisée par une vague de départs au sein de l'équipe d'encadrement et un renouvellement important du personnel (110 départs depuis la réorganisation de 2017, soit un tiers des effectifs renouvelé)."

Le siège social de l'Ophis à Clermont-Ferrand.
Le siège social de l'Ophis à Clermont-Ferrand. Photo par Creative Commons

Un problème d'organisation ? 

Loin des yeux des locataires, le rapport pointe des problèmes d'organisation interne. "Dans ce contexte instable, la chambre relève que les directeurs généraux de l’OPHIS ont mis en place, avec l’accord du conseil d’administration, des délégations de pouvoirs en cascade, ce qui a généré une dilution du centre de décision et une atomisation des décideurs (120 acheteurs en 2019). (...) En outre, avec une large permissivité du système d’information et une absence de dispositif formalisé de contrôle interne, l’encadrement de l’OPHIS avait très peu de visibilité sur  "qui fait quoi"."

Ou de la malhonnêteté ? 

Les manques du bailleur social ne se limitent pas à une période d'instabilité.

Le paragraphe de la Chambre des comptes est consternant : "En 2019, un conducteur de travaux à l’OPHIS a ainsi été condamné par le tribunal correctionnel pour escroquerie au préjudice de l’établissement. L’intéressé établissait de fausses factures qu’il validait lui-même (préjudice de 250 k€). La direction générale aurait dû alors être incitée à mettre en place une véritable politique de contrôle interne (comité de pilotage, cartographie des risques, plan de contrôle interne, revue des droits et délégations, etc.). Or cette affaire n’a suscité que peu de changements dans les pratiques internes, par ailleurs, marquées par des situations ponctuelles de conflits d’intérêts que la chambre relève dans son rapport."

Poursuivant sur sa lancée, la Chambre des comptes enfonce le clou. "Alors que les loyers représentent 90 % des produits d'exploitation, soit près de 87 Millions en 2020, la qualité de service rendu aux locataires n'est pas au rendez-vous". Dans les résidences, on est d'accord avec ce point. "Il y a beaucoup plus d'insécurité dans les résidences qu'avant, et personne ne fait rien. On arrive à avoir personne, je ne sais pas comment vous le décrire, et quand on a quelqu'un, ils ne s'en préoccupent pas vraiment". La Chambre a l'explication au manque de réponse. "L'Ophis ne répond qu'à un appel sur deux, en raison de son important sous-dimensionnement, un emploi équivalent temps plein pour 3500 locataires "!

Le rapport accablant enchaîne sur des décision d'affectation de logement pas égalitaire, une baisse de l'investissement, de la réhabilitation des logements, préférant investir dans des placements que dans les bâtiments. La Chambre des comptes conclut par un regard critique : "Pour la chambre, en tant que service d’intérêt économique général (SIEG), la vocation première des fonds mis à la disposition de l’office doit rester la construction et la réhabilitation de logements sociaux générateurs de revenus locatifs, et non l’arbitrage entre placements générateurs de produits financiers."

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