En grogne, les médecins généralistes appelés à claquer la porte de leurs cabinets

Par Enzo Martinet , Mise à jour le 08/02/2023 à 06:00

L’accès direct à certains infirmiers, kinésithérapeutes et orthophonistes, sans passer par un médecin généraliste c'est bientôt possible depuis l'adoption à l'unanimité en première lecture de la loi Rist à l’Assemblée nationale le 19 novembre dernier. En contestation, Roland Rabeyrin, président du syndicat MG43, premier syndicat des médecins généralistes du département, appelle à la grève et aux fermetures des cabinets de médecine générale à partir de ce mercredi 8 février.

Cette loi Rist, votée par l'Assemblée nationale, vise à ouvrir la consultation médicale à plusieurs professionnels de santé sans passer par un médecin. Roland Rabeyrin, médecin généraliste au Puy-en-Velay et président du syndicat MG43, dénonce le mirage que constitue ce texte comme réponse aux difficultés d’accès aux soins.

« La médecine générale subit une agression politique d’une violence inégalée », a lancé Roland Rabeyrin

En conséquence, ce dernier appelle à la grève et aux fermetures des cabinets de médecine générale les soirs de semaine à 18h ainsi que les samedis matin à partir de ce mercredi 8 février. Il demande aussi une grève de toutes les tâches administratives des soignants et surtout une fermeture de tous les cabinets le mardi 14 février prochain, dans le cadre d’une journée d’action nationale.

« On craint une désorganisation de l'offre de soins. »

« Sous prétexte que 10 % de la population a des difficultés à accéder à un médecin traitant, le gouvernement pousse certains projets qui vont complètement détruire le concept du médecin traitant et du parcours de soin. On va évoluer vers une libéralisation de tout. On a même vu apparaître des prémisses dans certains textes qui annoncent une volonté politique de supprimer le médecin traitant. On a un système qui fonctionne pour 90 % de la population et on propose de le détruire parce qu’il y a un problème pour 10 % », a lâché le président de MG43

Roland Rabeyrin président du syndicat MG43
Roland Rabeyrin président du syndicat MG43 conteste la loi Rist devant la presse. Photo par Martinet Enzo

Cependant selon l’association UFC Que-Choisir qui avait partagé en novembre 2022, une longue enquête sur la répartition des médecins généralistes et spécialistes dans le département, commune par commune, le constat était un peu plus alarmant. En effet, un quart des habitants (25,1%) ont un accès difficile à un médecin généraliste et 5,5 % nagent en plein désert. « Compte tenu de l’inquiétante proportion de déserts médicaux s’expliquant aussi bien par une mauvaise répartition géographique des médecins que par l’aggravation des dépassements d’honoraires, notre association presse les parlementaires de porter des mesures ambitieuses pour permettre un égal accès aux soins » avait alors alerté UFC Que Choisir Haute-Loire.

Surtout le sud et l'ouest du département en manque de généralistes d'après la carte.
Surtout le sud et l'ouest du département en manque de généralistes d'après la carte. Photo par UFC Que Choisir 43

« Il y a un manque de médecin, on le subit. Ce n’est pas de notre faute puisqu’on nous l’a imposé par le numerus clausus. C’est une situation qui a été voulue sur le plan politique. Et aujourd’hui on veut punir les médecins parce qu’ils ne sont pas assez nombreux et qu’ils n’arrivent pas à faire le job. C’est franchement insupportable ! », a râlé Roland Rabeyrin.

Un poste d’assistant, une solution ?

« On demande qu’un poste d’assistant médical soit financé. C’est une solution qui permet au médecin de déléguer certaines tâches, comme chez le dentiste, et donc de pouvoir se libérer du temps médical pour gérer plus de patient », a expliqué le président de MG43.

De plus, le syndicat réclame une hausse du prix des consultations à 30 € pour suivre l’inflation ou encore la création de consultations majorée spécifiques à certaines situations.

« Par rapport aux autres spécialités, la médecine généraliste reste dans le bas de l’échelle au niveau de la rémunération médicale. »

La caisse nationale d'assurance maladie vient de proposer en ce début de mois de février une revalorisation du tarif de la consultation médicale à 26,50 euros, soit 1,50 euros de plus qu'aujourd'hui. « Une humiliation » a conclu Roland Rabeyrin :

« On demande la consultation à 30€ pour rattraper l’inflation. Aujourd’hui, un médecin généraliste gère une entreprise médicale. Oui, les médecins généralement gagnent bien leurs vies, mais c’est parce qu’ils font des heures colossales. On est sûrement l’une des professions qui travaille le plus en nombre d’heures par semaine. Si je ramène mon activité à 35h, je suis mal payé. De plus, le prix de l’électricité augmente, mais aussi tout à un tas de frais comme nos abonnements informatiques. On est comme tout le monde. Ce qu’on demande n’a rien d’extraordinaire, mais il faut quand même qu’on puisse maintenir notre niveau de rémunération et notre chiffre d’affaires pour pouvoir faire tourner l’entreprise. »

Le 14 février prochain, la proposition de loi Rist sera examinée devant le Sénat.

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4 commentaires

mer 08/02/2023 - 21:25

Pourquoi défendre son pré carré. Qu'avez vous à craindre ? La concurrence ?

Je n'ai plus de médecin traitant depuis bientôt 2 ans. Et vous refusez de me soigner car je ne suis pas votre "CLIENT", pas patient dans ce cas. Le serment d'Hippocrate ? Où est-il ?

J'aimerai être augmenté de 100% comme vous le demandez. Êtes vous réaliste ?

Merci, aux médecins hospitaliers et au personnel soignant qui malgré un hôpital en déliquescence ont leur conscience  et la vocation de nous considérer comme des PATIENTS !

mer 08/02/2023 - 20:02

comme un goût de déjà vu notamment chez les agriculteurs on fait des heures peu de vacances il faut des aides des aides!!je serais curieux de savoir ceque la sécu verse pour le matériel, les consults, les assistants, ne parlons pas des impôts !!! les cabinets sont injoignables les  WE et ferment de bonne heure en ville. Tout a changé et ils ont bien le droit de vivre mais de grâce arrêtez les pleurnicheries qui a dit qu'un auxilliaire remplacerait le médecin crainte de concurrence ?

mer 08/02/2023 - 19:20

Les kinésithérapeutes et les autres auxiliaires médicaux ne prétendent pas remplacer les médecins. Par contre ils connaissent mieux leurs métier que les médecins et ne sont pas de simples "exécutants". Ils savent ce qui fait partie de leurs champs de compétence (quelles sont leurs indications ou non) et quand est ce qu'ils doivent renvoyer aux médecins. Dans les autres pays et dans les régions tests pour l'accés direct en kinésithérapie, aucun événement indésirable signalé...

Les médecins (certains) se plaignent d'avoir trop de travail et ne pas pouvoir faire leur travail correctement mais par contre ils ne veulent surtout rien lâcher de leur pouvoir aux autres professionnels. Cherchez l'erreur

mer 08/02/2023 - 15:45

On nage en pleine démagogie. Non, un kinésithérapeute, une infirmière n’ont pas le même bagage médical qu’un médecin. Des tâches peuvent leur être déléguées, mais il faut d’abord une expertise du médecin qui fait un diagnostic et négocie avec le patient la thérapeutique. La loi RIST constitue un recul de la qualité des soins.