Décision en délibéré pour Madama Diawara

Par L.Du , Mise à jour le 05/10/2021 à 13:00

Se tenait ce mardi matin 5 octobre, le procès de Madama Diawara, jeune Malien réfugié à qui il a été refusé le droit de séjour sous prétexte de présentation de faux papiers. C'est d'ailleurs pour ce motif que le tribunal le jugeait ce matin, en l'absence du prévenu.

L'année 2021 avait été marquée par les nombreuses manifestations de soutien pour Madama Diawara au Puy-en- Velay. En effet, le jeune adolescent était arrivé en 2018 après un périple difficile qui l'avait fait quitter son pays d'origine, le Mali, en passant par la Libye et récupéré in extremis dans les eaux de la Mer Méditerranée. Il avait trouvé refuge dans une famille d'accueil, attribuée par la juge pour enfants. Le 1er janvier 2020, Madama Diawara a 18 ans et veut rester sur le territoire français; doit fournir ses papiers afin de continuer ses études. Procédure compliquée pour le jeune homme qui ne sait pas écrire et parle très mal le français. Eric Durupt et Véronique de Marconnay, famille d'accueil, le soutiennent et l'accompagnent dans ses démarches. Tous trois se heurtent à l'administration française, présentent des papiers qui sont qualifiés de faux.
Madama Diawara comparaissait ce mardi matin afin d'être jugé de ces accusations.

 

Deux mois de prison avec sursis simple demandés par le Procureur

La Cour était désolée de l'absence du jeune Malien. Son avocate Maître Cécile Linossier ajoute : "Il a été acculé à entrer en clandestinité, jeté à la rue". Effectivement, Madama Diawara est sur le coup d'une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) : "Il n'a droit à rien, ce dossier possède une dimension humaine avant tout" précise-telle.

"Une audience sans prévenu est toujours particulière", Nicolas Rigot-Muller, Procureur de la République

Les poursuites contre Madama Diawara arrivent après un rapport d'expertise de la Police aux frontières (PAF), estimant que les documents présentés étaient faux. Le cachet n'est pas référencé et l'officier de l'état civil indiqué sur le document n'était pas en poste le 1er janvier 2002, date de naissance de Madama Diawara. De plus, le procureur insiste sur le manque de coopération du jeune homme qui énonce un voyage très flou, ne peut pas montrer sur une carte où se situe son village de naissance, reste très vague sur la perte de son frère aîné lors de son périple. Mais le procureur ajoute "qu'il peut être probable que quelqu'un d'autre ait falsifié ses papiers". Une seule certitude selon lui, les documents sont faux, "les faits sont caractérisés, il n'est pas possible de bâtir une nation sur un mensonge", conclut Nicolas Rigot-Muller en demandant deux mois de prison avec sursis simple.

"Madama Diawara n'est pas un escroc", Maître Linossier

L'avocate de Madama Diawara, Maître Cécile Linossier retrace rapidement le parcours de son client en insistant sur le fait que "Madama n'est pas un escroc, il a payé dans sa chair". Confié à Eric Durupt et Véronique de Marconnay, tous deux professeurs au Lycée, par la juge pour enfants en janvier 2019, "qui n'a jamais remis en doute sa minorité", Madama Diawara avait déjà un acte de naissance à cette date, reconnu par la Cimade (association de solidarité active et de soutien politique aux migrants, aux réfugiés et aux déplacés, aux demandeurs d'asile et aux étrangers en situation irrégulière). En janvier 2020, confiante, la famille d'accueil envoie ces papiers à la préfecture. Cette dernière les fait parvenir à la PAF qui dit qu'ils pourraient être faux et demande de nouveaux documents authentiques afin d'examiner de nouveau la situation de Madama Diawara. "Nous connaissons tous la situation de conflits que vit le Mali et les difficultés que traversent leur administration", précise l'avocate. De nouveaux papiers arrivent et le 25 février 2021, ils sont déposés par Eric Durupt à la préfecture. Le même jour, la PAF fait un nouveau rapport et déclare que "ces documents présentent des caractéristiques de faux".

Relaxe demandée par son avocate

Selon Maître Linossier, les documents en question "ne passent pas par les mains de Madama". Le jeune homme présentait des difficultés à son arrivée en France, il a été vu par une orthophoniste qui a conclu "qu'il souffrait de problèmes cognitifs et d'une fatigabilité anormale", sans remettre en question son âge. Les membres du comité de soutien du jeune Malien le présentent comme un garçon doux, gentil et souriant, "incapable de gérer l'administration", selon son avocate. De plus, un bilan psychologique avait été réalisé par l'inspection académique qui a démontré que Madama ne dépassait pas le niveau CP/CE1.
L'avocate conclut que "l'élément intentionnel fait défaut" et demande la relaxe.

Le Président du tribunal, Patrice Rodriguez, a mis sa décision en délibéré, elle sera prise le 2 novembre prochain.

 

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