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Laurent Wauquiez : « Mon message est clair ! Ne touchez pas à nos vaches ! »

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 02/06/2023 à 17:00

Le 22 mai. Une date qui suscite colère et indignation dans le monde agricole en France. Un rapport annuel de la Cour des comptes conseille de réduire le cheptel bovin dans tout l’Hexagone. À quel dessein ? Sauver la planète en diminuant la quantité de méthane produit par les flatulences des ruminants à corne.

Ce vendredi 2 juin, les deux députés de la Haute-Loire, les deux sénateurs, la Présidente du Conseil départemental ou encore le Président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, se sont rendus au Gaec du Clapou à Saint-Germain-Laprade.

Sur place, le patron de l’exploitation agricole Jordan Liotard ainsi que le Président de la Chambre d’Agriculture Haute-Loire Yannick Fialip les attendent dans un contexte particulièrement tendu. Dans leur tête et celles de milliers d’agriculteurs spécialisés dans l’élevage bovin, les lignes d’un rapport de la Cour des comptes se répercutent de toute part. « La réduction des émissions de méthane dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique amène (...) à préconiser une réduction de l’élevage bovin, de la consommation de viande et de lait.», est-il mentionné.
Réduire les émissions de méthane est donc crucial pour lutter contre le réchauffement climatique.

Plus d'un tiers du cheptel bovin français dans le viseur 

Selon l’accord international Global Methane Pledge (GMP), une réduction des émissions de méthane de plus de 30 % d’ici à 2030 par rapport au niveau de 2020 est recherchée. S’il s’avère impossible de trouver en façade des données chiffrées dans le rapport de la Cour des comptes, il faut plonger dans l’épais marais des annexes pour dénicher les ratios qui font mal.

Ainsi, en page 116, annexe n° 16, il est dévoilé : « L’un des scénarios de l’étude GESEBOV est centré sur la baisse de la consommation intérieure de viande et de lait, associée à une baisse du cheptel bovin (...). Ce scénario est le seul qui permette d’atteindre des baisses des émissions de GES compatibles avec les engagements du GMP. Il projette une réduction des troupeaux laitiers et allaitants de 37 % et 39 %, respectivement ».

Pour parcourir les 137 pages du rapport de la Cour des comptes intitulé "Les soutiens publics aux éleveurs de bovins", cliquez sur ce LIEN

« Il faut se pincer pour croire que de telles inepties aient pu être formulées »

Le méthane un gaz à effet de serre puissant

il joue un rôle significatif dans le réchauffement et il est 25 fois plus puissant que le CO2 et bien que la durée de vie du méthane dans l'atmosphère soit plus courte que celle du CO2, il a un potentiel de réchauffement plus élevé à court terme. Il piège la chaleur émise par la Terre et empêche une partie de celle-ci de s'échapper dans l'espace. Les principales sources naturelles sont les marais, et les éruptions volcaniques. Les principales sources humaines sont l'agriculture, en particulier l'élevage de bétail et la riziculture. .

Laurent Wauquiez, Président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, ne cache pas une colère manifeste envers les responsables de ce rapport, caractérisant la Cour des comptes comme une entité « incapable », « totalement déconnectée du terrain », « s’appropriant d‘enjeux qui ne lui appartiennent pas ».

Il leur lance un message acide : « Ne touchez pas à nos vaches ! Des centrales à charbon rouvrent en Allemagne, le gaz de schistes se développe de façon incontrôlable aux États-Unis, nous importons des quantités démentielles de denrées en tout genre aux quatre coins de la planète...et la Cour des comptes estime que la pollution mondiale est causée par les limousines qui pâturent derrière nous ? Des fois, il faut se pincer pour croire que de telles inepties aient pu être formulées ! »

« Ce n’est pas Paris qui commande ici. On est en Haute-Loire. On est dans notre région Auvergne-Rhône-Alpes. Et on sait ce qu'on a à faire ! » Laurent Wauquiez

Bras croisés et visage fermé à l'évocation du rapport de la Cour des Comptes.
Bras croisés et visage fermé à l'évocation du rapport de la Cour des Comptes. Photo par Nicolas Defay

« On va mettre en place des tickets de rationnement ? »

Sur le sujet des importations alimentaires qui se veulent de plus en plus massives, Laurent Wauquiez souligne aussi : « Si vous voulez agir pour la planète, la seule chose à faire est d’acheter français. Si le produit est importé, vous la détruisez. Mais ça aussi, c’est complètement passé à côté des experts de la Cour des comptes ! »

Avant de terminer, remonté : « Si on diminue le cheptel français, on achète où ? Ils sont extraordinaires quand même ces gens. Ils nous disent de moins consommer. On va mettre en place des tickets de rationnement ? On va dire aux gens de moins acheter ? On en a marre d'avoir des gens à Paris, qui n'y connaissent rien, et qui donnent des leçons à tout le monde avec des absurdités pareilles ! »

« Nous n'avons pas un département qui permette de faire des reconversions en grandes cultures, en maraîchage ou en fruitiers. Ce n’est pas possible ! » Marie-Agnès Petit

« Que la Cour des comptes s'occupe de ses affaires et les vaches seront ainsi bien gardées »

La Présidente du Conseil départemental Marie-Agnès Petit est animée par la même indignation : « Mesdames, messieurs, je ne demande qu'une chose, c'est que la Cour des comptes s'occupe de ses affaires et les vaches seront ainsi bien gardées ».

Elle continue en des termes acerbes : « Ce rapport, ni entendable, ni concevable, préconise de baisser le cheptel bovin et invite les éleveurs à se reconvertir. Dans notre département, ce n’est pas possible. Mais pour savoir ça, il faut de temps en temps sortir de son bureau parisien ».

« Quand vous faîtes traverser des paquebots entiers avec de la viande provenant du Brésil, d’Australie, de Nouvelle-Zélande...je ne pense pas que ce soit une bonne façon de raisonner pour diminuer la pollution planétaire ». Laurent Duplomb

« C'est une politique qui marche à l'envers »

Laurent Duplomb, Sénateur et Président du Groupe d'études Agriculture et alimentation, s’inquiète d’une « souveraineté alimentaire française à la dérive ». « Faire disparaître le cheptel bovin pour ouvrir un peu plus grande la porte aux importations démontre que c'est une politique qui marche à l'envers. Un quart de la viande bovine en France est importé. 72 % pour les fruits. 85 % du coulis de tomate provient de Chine. 56 % concernant la viande ovine. Plus de 80 % du poulet en restauration sont également importés ».

L’homme politique et agriculteur à Saint-Paulien conclue avec ce dernier élément : « Le troupeau laitier représente 20 milliards de litres de lait produits en France. Dix milliards sont exportés rapportant 7,5 milliards d'euros positif chaque année. Est-ce alors raisonnable de réduire de plus d’un tiers notre cheptel et fragiliser tout autant cette manne financière ?

Parlementaires et élus du département et de la grande région sont présents.
Parlementaires et élus du département et de la grande région sont présents. Photo par Nicolas Defay