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La tentative de viol est reconnue : dix ans de prison pour l'agresseur du faubourg Saint-Jean

, Mise à jour le 15/10/2021 à 06:19

Ce jeudi 14 octobre était la dernière journée de procès pour la tentative de viol aggravé et la détention d'armes aux Assises de la Haute-Loire. A 20h40, le procès touche à sa fin. La responsabilité est reconnue, l'agresseur a bien tenté de violer sa victime, ce soir du 11 novembre 2019 au Puy. Il écope d'une peine de dix ans d'emprisonnement. 

Une journée qui a débuté par l’étude de la personnalité de l’accusé, le témoignage du témoin oculaire et qui s'est terminée par les plaidoiries de la partie civile et de la défense. 

Photo d'illustration Photo par CD

Le bilan psychologique de l'accusé dressé par les experts

Mémoire sélective, déni ou occultation des faits. C'est la question que posera Viviane Robin, experte psychologue et psychologue clinicienne qui, chose rare, a eu la victime et l’accusé en entretien. Elle raconte sa rencontre avec cet homme de 32 ans quelques mois après les faits. Pour elle, il est entre le déni et l'occultation des faits.« Il ne se reconnaît pas dans la tentative de viol », explique-t-elle, ses propos faisant écho à ceux prononcés la veille par cet habitant de Roche-en-Régnier.

L'expert psychiatre, lui, certifie que l'individu n'est pas atteint de troubles neuropsychiques. Le Dr André Coutanson estime que son état mental ne compromet pas l'acte et il ajoute : "le fait qu'il ait consommé de l'alcool ne saurait excuser sa conduite". Il certifie que l’accusé n’a pas de maladie évolutive sur le plan psychique mais qu’il présente des troubles importants. Les deux experts sont d'accord sur la nécessité du suivi sur le plan psychologique.

Un dernier témoignage d'Adrien grâce à qui le viol a été évité

Près de deux ans après les faits, Adrien témoigne à la barre (en visio) : "je suis encore perturbé que personne d'autre n'ait appelé à ce moment là". Ce qui le marque encore aujourd’hui : "le sang sur les mains et le cou de la victime". Ceci ajouté à l'image qui lui reste encore aujourd'hui de la position à califourchon de l'agresseur sur la victime suffisent à Adrien pour affirmer qu'il s'agissait bien là d'une agression sexuelle. 

- commencement de l’exécution
- absence de désistement volontaire : là est toute la complexité de l’affaire. Ce moment-là, où l’individu, à califourchon sur la victime, croise son regard et au même moment les policiers arrivent. Deux versions diffèrent. S’est-il désisté volontairement, comme il l’indiquait à la barre ? Ou est-ce l’arrivée des forces de l’ordre, visibles par les gyrophares bleus qui provoque son désistement ?

Au retour de la pause déjeuner, c’est au tour des avocats de plaider, et à l’avocat général, représentant de la société civile, de se prononcer sur ses réclamations.

« (L'accusé) était une bombe, qui a explosé ce 11 novembre »

"Ce couteau viole l’intimité d'Alice" déclare Maitre Cédric Augeyre, avocat de la partie civile

Il poursuit : « Parce qu’avec ce couteau, il est à califourchon sur elle, il passe un coup sec. La pointe arrive au-dessous du cou. Dénudé du haut. Plus de chemisier, plus de t-shirt. On n’est pas là simplement pour donner de l’argent, pour donner une gifle. On est là pour porter atteinte à l’intimité. » « La victime crie, il répond "ferme ta gueule, déshabille toi" », s’exclame l’avocat, avant de poursuivre : « Il ouvre la ceinture et dégrafe le bouton de son pantalon. Là on ne peut pas parler simplement d’agression sexuelle mais de tentative de viol. »

Ajouté à cela, le baiser forcé avec la langue suffit selon lui à caractériser la tentative de viol à intention coupable. « Vous jugez d’un crime. Lorsque Alice – on nommera la victime ainsi – l’a regardé dans les yeux, elle a vu un violeur prêt à tout. »

La tentative de viol réfutée par la défense

En face, Me Aurélie Chambon. Elle est l’avocate de la défense et elle plaidera non pas pour une tentative de viol, mais pour une agression sexuelle. « Défendre un accusé d’une telle violence, c’est une charge lourde », admet l’avocate de la défense. « Mais juger en est une encore plus lourde », interpelle l’avocate à destination de la Cour.

« Non, je ne vais pas tout faire pour justifier l’impossible », déclare Maitre Chambon

« Il y a des choses qui doivent appeler votre attention », poursuit-elle. L’arrivée de la police discrètement pose débat selon la défense : alors que la victime et le témoin principal disent avoir vu les gyrophares bleus de la police, l'accusé dit ne pas les avoir vus.

Le côté de la défense et le box de l'accusé au Tribunal judiciaire du Puy Photo par CD

L'avocate insiste sur son rôle qui est selon elle de « dire qu’il faut condamner l’accusé pour ce qu’il a fait et non ce qu’il aurait pu faire.» Elle poursuit : « Alors pour être juste, vous devrez vous intéresser aux éléments de personnalité de l’accusé.» En résonance avec les propos entendus ce jeudi matin par les experts psychologues et psychiatres consultés par l’accusé, Maître Chambon plaide qu’ « aujourd’hui, (l'accusé) est un homme à qui on peut accorder une certaine confiance, c’est un garçon intelligent qui arrive à comprendre un certain nombre de choses.»

Les réclamations de l’avocat général de la Cour, représentant de la société civile

Le choix de la durée de la peine comprend la prise en compte des circonstances violentes, le syndrome de stress post traumatiques et les antécédents judiciaires de l’accusé. L’avocat général requiert une peine de dix ans d’emprisonnement criminel, sanction qu’il qualifie être « à la hauteur de l’acte ». Il requiert aussi la possibilité d’une libération conditionnelle à mi-peine. Mais surtout, le représentant de la société civile veut que l’accusé comprenne que les faits commis méritent une peine de dix ans minimum. Enfin, le représentant de la société civile requiert un strict suivi socio-judiciaire.

20H40, le verdict tombe

Après plus de trois heures de délibération, la présidente de la Cour d'Assises, les deux juges assesseurs (un homme et une femme) et les membres du juré finissent par entrer pour énoncer leur verdict.

La première question porte sur la culpabilité de l’accusé des faits de violence et de tentative de pénétration qu’il aurait stoppée pour des raisons indépendantes de sa volonté. La deuxième question de l’avocat général évoque l’usage de l’arme pour commettre le délit reproché à la première question. Ensuite, les trois autres questions portent sur la culpabilité de l’accusé concernant les délits dits « connexes », c’est-à-dire ceux portant sur les armes trouvées dans la voiture, la possession et le transport d’armes de catégorie B et D sans autorisation. 

En réponse à ces questions la Présidente du juré se prononce : « à la majorité d’au moins six voix, le jury répond "oui" à toutes les questions posées par l’avocat général. En conséquence, la Cour vous condamne à la majorité absolue à la peine de dix années d’emprisonnement et de cinq années de soins. En cas de non suivi de ce suivi socio judiciaire, la peine d’emprisonnement est fixée à quatre ans maximum. »

L’accusé est reconnu coupable de tentative de viol et écope d’une peine d’emprisonnement de dix ans. En peine complémentaire, il lui est assigné une interdiction de port d’armes pendant 15 ans et une inéligibilité pendant 10 ans. En ce qui concerne la partie civile, l’agresseur de la victime lui devra 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral. Le désigné coupable a dix jours pour faire appel.

Après cette annonce, Maître Chambon réagit : « Cela ne me semble pas être le reflet ni des débats, ni de ce qui s'est passé », déplore-t-elle. Quant à Maitre Augeyre, l'avocat de la partie civile, la condamnation est pour lui la reconnaissance de la réalité et un soulagement pour sa cliente.