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St-Hostien : « Ce qu’ils ont fait hier soir est honteux ! »

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 25/05/2021 à 14:30

Dans la nuit du lundi 24 au mardi 25 mai, les deux structures en bois construites à Ouillon par les anti-déviation de la RN 88 ont été totalement rasées. Dans le champ saccagé par les engins, quelques débris de verre et des morceaux de panneaux témoignent de la violence de l’opération.

Durant tout le week-end de la Pentecôte, ils ont été des centaines à se retrouver sur cette parcelle de terrain privée pour parler de ce combat qui les oppose au grand chantier de la Région, la déviation de la RN 88 entre Saint-Hostien et le Pertuis. Avec l’accord du propriétaire du champ, ils ont fusionné leurs compétences pour construire deux cabanes charpentées. Pendant trois jours, défenseurs de la nature et du territoire, agriculteurs et sympathisants, associations et collectifs, ont ainsi bâti ce qui devait être, d’après eux, le symbole d’une résistance face aux machines et au goudron.

Les cabanes avant leur destruction. Photo par Nathalie Collet

« Avec ce qu’il vient de se passer, nous avons atteint un niveau de mépris incroyable ». Celline Gacon

Il n’a fallu que quelques heures pour que ce symbole s'accompagne d’un autre : « Les cabanes représentaient une installation éphémère, légère, quelque chose qui se voulait être un symbole fort pour nous avec un impact faible pour la nature, explique, la voie tremblante, l’élue municipale du Puy-en-Velay EELV Celline Gacon. Le donneur d’ordre de cette destruction est de montrer la toute puissance des machines. » Elle ajoute : « Mais qu’est-ce que cela va générer ? Un réveil de la colère et une plus grande détermination de la Lutte des Sucs. Car, avec ce qu’il vient de se passer, nous avons atteint un niveau de mépris incroyable ».

« Ils nous ont fouillés et sortis de la parcelle privée pour nous mettre sur la voie publique. Une fois sur la route, ils nous ont dressés une amende de 135 euros pour non respect du couvre-feu sur la voie publique ». Julien

La préfecture à l'origine de la destruction

Nous avons demandé à la préfecture des explications sur l'opération nocturne en question. Voici le message :

"A l'issue de la manifestation du week-end et contrairement aux engagements des organisateurs de laisser les terrains tels qu'ils les avaient trouvés, des structures légères en bois ont été érigées et non démontées. Après vérifications effectuées auprès des services compétents, il s'avère que la parcelle sur laquelle ont été érigées ces structures, a fait l'objet d'une promesse de vente avec prise de possession immédiate par l’État. Il a donc été procédé à leur déconstruction."

« On avait peur que des pro-déviation y mettent le feu »

D’après l’une des deux personnes présentes dans les cabanes en question, les premiers gyrophares bleus ont éclairé le champs vers 21 heures ce lundi 24 mai. « Avec un ami, nous avions décidé de rester sur place pour surveiller les cabanes, explique Julien. On avait peur que des pro-déviation y mettent le feu. À 21 heures 05, tout un attroupement de gendarmes a envahi la parcelle. Ils étaient entre 30 et 40 autour des cabanes et autant sur la route. »

Julien indique encore : «  Ils nous ont vus et nous ont contrôlés aussitôt. Ils nous ont fouillés et sortis de la parcelle privée pour nous mettre sur la voie publique. Une fois sur la route, ils nous ont dressés une amende de 135 euros pour non respect du couvre-feu sur la voie publique ».

Il ajoute : « Les gendarmes nous ont escortés sur le haut du site pour que nous ne puissions pas filmer. La destruction des cabanes a commencé après. Il y avait deux pelleteuses Mécalac et un camion d’une entreprise du Chambon-Feugerolles pour récupérer les matériaux. Vers 3 heures du matin, ils sont repartis, laissant le champ complètement saccagé par les chenilles. Tout était détruit ».

Le champs rasé. Photo par Nicolas Defay

« Car on nous a clairement forcés la main ! Que si nous ne signions pas, l’affaire allait se terminer devant le tribunal et qu’on serait exproprié quoi qu’il en soit ». Jean-Michel Simon

« Il est marqué que l’État pouvait en faire ce qu’il voulait même si la vente n’était pas effective »

Le lieu où ont été montées les structures appartient à Jean-Michel Simon, agriculteur à Ouillon à Saint-Hostien. Il a donné l’autorisation au Collectif des Sucs de bâtir ces cabanes dans sa parcelle de 2 000 m². « Le 20 octobre 2020, j’ai signé une promesse de vente de ce terrain à l’État, livre-t-il. Je croyais encore être le propriétaire mais apparemment ce n’est pas le cas. Sur le document, malgré la simple promesse de vente, il est marqué que l’État pouvait en faire ce qu’il voulait même si la vente n’était pas effective. » Il s’offusque des méthodes engagées lundi 24 mai par les forces de l’ordre : « Ce qu’ils ont fait hier soir est honteux ! Et ils ont fait ça après le couvre-feu pour que personne ne puisse intervenir. Ils ont tout anéanti. C’est n’importe quoi ! »

Marcel Simon et son fils Jean-Michel sur leur terrain à présent saccagé. Photo par Nicolas Defay

« J’aurais dû résister et tant pis si je devais subir une fois encore leurs méthodes indignes »

Fervent défenseur de ce territoire depuis plus de 20 ans, Jean-Michel Simon explique pourquoi il a tout de même promis à l’État son terrain à la vente. « Car on nous a clairement forcé la main ! Que si nous ne signions pas, l’affaire allait se terminer devant le tribunal et qu’on serait exproprié quoi qu’il en soit. C’est pour ça que j’ai signé. » Il confie encore : « Maintenant, je pense avoir fait une grosse bêtise. Ils m’ont déjà exproprié de mes terrains en 2007. J’aurais dû résister et tant pis si je devais subir une fois encore leurs méthodes indignes ».

Il était écrit : "La Région soutient votre combat" Photo par Nicolas Defay