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Auchan : « Les héros d’hier seront les chômeurs de demain »

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 03/05/2021 à 17:30

Tel est le titre du tract partagé par la CGT Auchan de Brives-Charensac. L’important Plan de Sauvegarde à l’Emploi en cours menace plus de 1 000 postes en France dont sept dans l’enseigne brivoise. « C’est un véritable vent de ras-le-bol qui est en train de souffler entre les rayons », selon un syndicaliste. Mais d'après Patrick Séghir, le directeur du magasin, neuf postes en CDI sont proposés aux sept personnes en question.

Le Plan de Sauvegarde à l’Emploi (PSE) dans le groupe Auchan, débuté des mois auparavant, est scindé en deux parties distinctes. « La première vague concerne les ressources humaines, la comptabilité, les caisses et le contrôle de gestion, détaille un adhérent à la CGT Auchan de Brives-Charensac. L’échéance de cette partie se termine à la fin mai. Rien que dans notre grande surface, cinq personnes se retrouvent ainsi sur un siège éjectable. »

Deux éléments des ressources humaines, un en caisse, un autre en administratif et un dernier au contrôle de gestion vont probablement devoir quitter le navire dans quelques jours. « Avant quand on avait un arrêt maladie, on passait par les deux filles RH, confie-t-il. Elles envoyaient alors tous les documents à la sécurité sociale, elles constituaient les fiches de paie, etc. Maintenant, les salariés devront se rendre sur une application numérique et tout faire eux-mêmes et avec le risque de se tromper ».

« Ces dernières sont vraiment dégoûtées du déroulement du Plan »

« Le PSE est toujours en cours, souligne le syndicaliste. On peut donc toujours s’attendre à un miracle. Mais toutes ces personnes ont déjà déposé leur dossier de départ. Ces dernières sont vraiment dégoûtées du déroulement du Plan. Il ne cherche pas à garder les gens et les compensations accordées sont juste le minimum légal ». Si les autres syndicats tels que la CFDT, FO,Sega, CFE CGC et CFTC ont signé ce Plan qu’ils qualifient d’historique, seul la CGT n’a pas apposé sa griffe. « Encore une fois, les dirigeants ont octroyé le strict minimum, pas plus, insiste le syndicat majoritaire. Il est très loin d’être historique comme certains le prétendent ».

« Nous avons neuf postes en CDI à proposer pour ces personnes. Elles ont jusqu'à la fin mai pour se prononcer »

Patrick Séghir, directeur d'Auchan Brives-Charensac, témoigne de son côté. « Au tout début, il devait y avoir 11 postes qui devaient être impactés par le PSE sur les 200 effectifs chez nous. Nous en avons donc sauvegardés deux. D'autre part, nous proposons des mesures pour aider les personnes concernées. Il y a des indemnités de départs volontaires et des indemnités supra-légales. Nous proposons des formations d'entreprise et des accompagnements psycho-sociaux.»

Il ajoute : « Actuellement, nous avons neuf postes en CDI à proposer pour ces personnes [majoritairement à Brives, Ndlr]. Elles ont jusqu'à la fin mai pour se prononcer ». Des fonctions dans le commerce, l'approvisionnement ou l'animation "satisfaction client" font partie des emplois d'échange. « C'est vrai que ce ne sont pas des postes similaires mais, pour quelqu'un qui ne veut pas partir d'Auchan, c'est une solution pour rester et exercer un métier différent ».

« C’est un véritable vent de ras-le-bol qui est en train de souffler entre les rayons. Nous avons presque un départ chaque semaine. Ces départs sont en plus des démissions. Ce qui veut dire que ces personnes partent sans rien, ayant trouvé mieux ailleurs. Le dernier en date avait plus de 20 ans de boite derrière lui » CGT Auchan Brives-Charensac

« La direction a enlevé leur poste de travail durant leur absence » 

Mais le cauchemar social ne s’arrête pas là car une seconde vague va succéder à la première, emportant deux autres personnes dans la tourmente. « La deuxième partie concerne le Service Après Vente (SAV), continue la CGT Auchan Brives-Charensac. À la fin du mois de novembre, il est quasi certain que les deux employés en question auront le même destin que les cinq premiers. Actuellement, ces deux éléments sont en congé maladie, leur moral totalement sabré pas les conditions de déroulement du PSE. » Il souligne : « Un signe qui tend à penser que leur départ est acté est que la direction a enlevé leur poste de travail durant leur absence. » Là, Patrick Seghir répond que c'est totalement faux : « nous utilisons une solution de remplacement pour nos clients jusqu'au retour de maladie du ou des deux personnes du SAV. Ils reprennent leurs postes dès leur retour de maladie jusqu’à la fin du PSE. »

Une hotline à la place des humains

En France, 9 centres SAV sur 11 du groupe Auchan vont fermer. Mais pourquoi une telle saignée dans cette activité là ? « Car les dirigeants ont prévu de mettre en place un système de hotline dématérialisée, s’insurge la CGT. Actuellement, avec de vraies personnes, on met environ un mois pour traiter et résoudre les dossiers. Ce qui n’est pas l’idéal, admet le syndicaliste. Mais à la place, il va y avoir un système sans humain qui permettrait, selon la direction, de réduire ces délais à 15 jours maximum pour la plupart des articles. Ce qui nous paraît juste impossible ! » D’après lui, à l’instar des caisses automatisées, le client s’occupera de tout du début à la fin.

« Le SAV ne sera pas supprimé mais digitalisé ! »

Sur le sujet, là aussi Patrick Séghir apporte ses explications. « Attention aux amalgames. Le SAV ne sera pas supprimé mais digitalisé ! Nous suivons un phénomène de modernité présent partout, que ce soit dans les grandes surfaces que dans bien d'autres entités. Le traitement se fera à domicile par le biais d'internet et le téléphone.» Il continue en ce sens : « Perdre son poste n'est pas simple, je le reconnais totalement. Mais nous devons suivre le mouvement de notre temps. Avec ce SAV dématérialisé, il nous faudra 15 jours de délais pour régler les problèmes contre plus d'un mois aujourd'hui ». 

« Certains n’avaient plus que 5 ans à faire avant d’être à la retraite ! »

Au total, ce sont donc sept personnes de l’enseigne Auchan Brives-Charensac qui recevront un chèque d’au revoir. « La plupart approche les 50 ans, souligne l’interlocuteur de la CGT. Certains n’avaient plus que 5 ans à faire avant d’être à la retraite ! Que vont-ils devenir ? Tout le monde sait que l’âge complexifie l’accès à l’emploi et ceci d’autant plus si les personnes sont restées à un poste précis pendant 20 ou 30 ans de carrière ».

 « Il y a certes des postes qui disparaissent mais aussi des postes qui se créent comme dans le secteur du Drive, par exemple » Patrick Séghir

Vers une automatisation des caisses d’encaissement

Loin de rassurer les employés du groupe, que ce soit à Auchan Brives-Charensac et partout en France, une politique de dématérialisation semble également marcher à grand pas dans les grandes surfaces. « Auchan national part sur un projet avec un nouvel encaissement où 70 % des caisses seront automatisées, se désole le représentant de la CGT locale. Seuls 30 % resteront donc mécaniques. On imagine bien la casse sociale que cela va impliquer. »
Mais le dispositif a été en quelque sorte « gelé » pour cause de... mal de dos : « En fait, trois ergonomes mandatés par le groupe Auchan ont validé la configuration des nouvelles caisses mécaniques, caisses qui font partie de ce projet d’envergure d’automatisation. Or, les hôtesses se sont plaintes à 100 % de mal de dos suite à leur utilisation. Du coup, le projet est en standby pour deux mois dans les magasins pilotes ».

« La modernisation transforme les métiers et génère forcément de la peur »

À propos de cette automatisation des caisses, Patrick Séghir s'appuie encore sur la modernité généralisée. « Il n'y a pas de licenciement et de perte d'emploi dans cette activité, lance-t-il. Sur Auchan de Brives-Charensac, il y a pour l'instant 4 caisses automatiques. C'est vrai que nous allons prochainement augmenter ce nombre pour se conformer aux nouvelles habitudes de consommation. Il y aura aussi la présence de scanettes avant la fin de l'année, un outil déjà installé dans beaucoup de grandes surfaces. Mais il y aura toujours des caisses mécaniques également ». Il termine ainsi :« Il y a certes des postes qui disparaissent mais aussi des postes qui se créent comme dans le secteur du Drive, par exemple. La modernisation transforme les métiers et génère forcément de la peur et des appréhensions ».