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Marc Boléa: "Lynchage médiatique et acharnement"

Par . . , Mise à jour le 22/03/2021 à 07:00

Alors que l’horizon semble s’éclaircir jeudi pour Marc Boléa avec l’énoncé d’un jugement de relaxe dans une affaire de proxénétisme hôtelier, l’élu départemental a appris vendredi dans la presse que le parquet avait décidé de faire appel du jugement. Il a accepté d'en parler, de même que son avocat Antoine Vey, qui évoque un acharnement judiciaire incompréhensible.

Les faits relevés à l’encontre de Marc Boléa et de sa compagne ont fait depuis leur révélation en décembre 2020 les choux gras de la presse et des lecteurs du bassin ponot mais aussi de nombreux journaux nationaux. Notre propre article sur Zoomdici, en date du 9 décembre 2020, est l’un des plus lus depuis la rentrée.

Les premiers mots que livre l'élu départemental par téléphone samedi 20 mars en fin d’après-midi évoquent d’abord cet emballement médiatique et les conséquences sur les faits qui lui ont été opposés et qu’il a du mal à s’expliquer.  “Tout cela, tout cet emballement et tout le déballage se fait  au détriment de la vie de vraies personnes ma compagne, ma famille et moi-même", explique-t-il d’un ton désespéré.

Lynchage médiatique et acharnement

De son côté, son défenseur, maître Antoine Vey, fait une analyse identique : Finalement qu’est-ce qu’on reproche à mon client ? Pas grand-chose. Ce sont des infractions [Le recours aux services de prostitués à deux occasions au cours de la mise sous surveillance judiciaire, Ndlr] qui ne concernent pas ses mandats mais qui sont de l’ordre de la vie privée. Il n’y a aucune victime, aucun préjudice. Depuis quand est-ce qu’on mobilise des écoutes et engage des dépenses aussi importantes pour des affaires d’une aussi faible envergure ?  Est-ce qu’il y a eu atteinte aux personnes ou une atteinte aux biens ? Non. Les enquêteurs ont fait fausse route, ils se sont trompés sur le cas de mon client. Cela arrive, mais ce qui est inacceptable c’est le lynchage médiatique et l’acharnement.”

Dans cette affaire, Antoine Vey avait évoqué en audience les anomalies procédurales qui avaient généré l’emballement de la presse. Celui-ci est instantané quand les noms des protagonistes, et particulièrement celui de Marc Boléa, élu de poids au niveau local par ses responsabilités au sein du Conseil départemental de Haute-Loire, sont transmis à la presse dès le début de la procédure.

Nous avons déposé une plainte car on a bafoué la présomption d'innocence en violant le secret de l’enquête, en nourrissant la presse d’informations qui n’auraient jamais dû quitter le bureau du procureur.

Dès le moment de leur arrestation qui va conduire à 96 heures de garde à vue dans les locaux du SRPJ de Clermont-Ferrand, les journaux locaux publient les informations, généralement très difficiles à obtenir, qu’ils reçoivent au fil de l’eau.

Nous demandons à Antoine Vey s’il a été informé de cette procédure d’appel du jugement

A.V. : "Non, même pas, c’est à nouveau les journalistes qui m’ont appris que le procureur de la République avait « l’intention » de faire appel. Ce qui signe les échanges informels que le parquet entretient avec la presse, sur cette affaire depuis le début. J'ai reçu un appel de l'Eveil qui me demandait de réagir à une information que je n'avais pas encore. Le problème est que cette procédure a des conséquences graves  pour la vie de mon client et que derrière ces rebondissements diffusés par voie de presse, il y a des vraies personnes contre lesquelles on a utilisé des méthodes en général réservées à la grande délinquance. Les violations du secret ont conduit à un véritable emballement médiatique, de niveau national. Nous avions déjà, à l’époque, déposé une plainte pour violation du secret de l’instruction et j’envisage désormais de saisir le conseil de la magistrature".

"J’envisage désormais de saisir le conseil de la magistrature" 

Il poursuit : "Cela est déraisonnable alors qu’il n’ y a absolument rien dans ce dossier contre Marc Boléa. On nous explique à longueur d’années qu’il n’y a pas d’argent dans la justice et qu’il faut faire des économies mais on met là en place des mesures qui sont extrêmement coûteuses et des moyens considérables pour découvrir... rien ! Mon client a été placé sur écoute, surveillé par la police... Ça a un coût. On va rejuger cette affaire, là encore, ça a un coût. C’est à croire qu’il n’y aurait rien de plus intéressant à instruire... rien ne justifie cet acharnement ".

Nous l'interrogeons sur le nouveau procès

Antoine Vey : "Lors de la première audience, on a mobilisé une après-midi complète pour cette seule affaire. On a eu le temps de parler et d’analyser chaque sujet et d'interroger les personnes concernées. Qu’est-ce qu’on va chercher à démontrer de plus dans ce procès d’appel ? Il n’y a aucune difficulté juridique, les juges d’appel ne pourront faire que les mêmes constatations et prononcer la même décision. Sauf si la justice est une loterie... Au final, ce qu’on va obtenir, c’est d’avoir démoli un homme, en ayant démoli sa réputation".

"Le fait d’être élu est sans lien avec les infractions poursuivies et rien ne justifiait la médiatisation de l’enquête".

Un peu plus tard dans la journée, nous obtenons de Marc Boléa qu'il nous livre son sentiment. L'homme avec qui nous parlons est totalement abasourdi par ce qui vient de lui tomber dessus et il est totalement abattu. Il confirme lui aussi, que c’est dans la presse  qu’il a découvert la plupart des éléments qui les concernaient lui et sa compagne.

Marc Boléa et J-P Marcon, octobre 2017 Photo par Zoomdici.fr

"On m’a déjà complètement démoli, je suis au bord du gouffre"

Il dénonce lui aussi le fait que certains éléments de sa vie privée, sans rapport avec les faits recherchés, ont été “déballés” sans précautions, sans attention pour sa vie personnelle mais aussi pour celle de ses proches et particulièrement de sa maman âgée qui lit encore la presse locale tous les  jours. 

M.B. : J’étais allé la voir pour lui expliquer jeudi le jugement avant et là, elle lit que finalement ce n’est pas fini ! Comment je lui explique ça,? D’ailleurs, comment j’explique quoi ? Je ne comprends pas moi-même ce qui se passe. Je lis dans la presse que je serais allé accompagner trois ou quatre fois Marie Line rue de la Gazelle. Les rapports de police ont reconnu que je ne suis même pas descendu de la voiture. On perquisitionne chez moi, on écoute mes conversations pendant des mois, pour quelles révélations finales ? Aucune.
On a fouillé dans mes affaires et on a trouvé de l'argent liquide. On me le séquestre pour finalement me le rendre quelques jours plus tard quand on a vérifié que je l'avais bien retiré au distributeur pour payer des vacances que nous avions prévu de passer ensemble. C’est ce que j’avais dit".

Nous avons demandé à Marc Boléa ce qu'il en était de ce retour en politique qui a été annoncé à la sortie du tribunal

"Alors, sur ce sujet, on me dit que j’aurais mieux fait de fermer ma G... C’est vrai que j’ai fait une erreur de communication. A la sortie du tribunal, il y avait de nombreux journalistes et d'un point de vue personnel je ressentais un gros soulagement. Un journaliste m’a demandé si je songeais à revenir en politique alors c’est vrai que j’ai dit que j’y réfléchirais mais c’est sorti comme ça de façon irréfléchie. Je n’y avais même pas pensé avant, j’étais loin de ça. Je suis un ancien sportif et un compétiteur, c’est sorti comme ça. C’est sûrement une grosse erreur de communication".

"Le retour en politique, une erreur de communication et la suite, je ne la vois pas"

Nous lui demandons comment il voit l'avenir

"Je suis complètement abattu et je me dis qu’il va falloir encore tenir pendant tout ce temps. C’est horrible. Je me dis que derrière tout ça c’est moi qu’on vise. Je ne sais plus quoi penser et je peux vous dire que j’ai pensé au pire depuis le début de cette affaire et que j’y pense encore. On m’a déjà complètement démoli, je suis au bord du gouffre et j’apprends dans la presse que finalement rien n’est fini ! Que c’est reparti ! Mais pour combien de temps ? Un procès d’appel, c’est les deux prochaines années de ma vie qui sont mises en jeu alors qu’on a bien dit que je n’avais rien fait".

"Je me demande si les gens qui prennent de telles décisions imaginent la vie des gens qui les reçoivent."

Dans cette histoire, il y a aussi une autre personne à considérer, sa compagne dont il accepte aussi d'évoquer la situation. La décision du tribunal, si elle l'a condamnée à des peines de sursis (12 mois), a ordonné la confiscation de l'immeuble de la rue de la Gazelle dans lequel se sont produits les faits de prostitution. "Je pense aussi à ma compagne à qui on décide de prendre son outil de travail et sa seule source de revenus. L'hôtel Le Régional a connu un incendie au cours de l’été, il n’est plus utilisable pendant au moins un an, elle n’a plus de revenus. Comment elle fait ?"

"Elle n’a plus de revenus. Comment elle fait ?"

Alors, on va se réunir par téléphone dès lundi pour savoir ce qu'on va faire mais c’est vrai que peut-être qu'avec son avocate, elle va sans doute décider de faire appel de ce jugement qui est allé au-delà des réquisitions."