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Aiguilhe

Confinement : qu'en est-il des jardins partagés ?

lun 23/03/2020 - 16:54 , Mise à jour le 27/11/2020 à 09:04

Sous un soleil radieux ce lundi 23 mars 2020, nous arpentons les rives de la Borne, sur la commune d'Aiguilhe, limitrophe avec le Puy-en-Velay.
Tout le long de la rive droite, dans ce méandre naturel de la Borne, une soixantaine de parcelles se côtoient entre arbres fruitiers et saules pleureurs, sur une terre fertile et généreuse, qui dispose en plus d'un petit canal d'irrigation. 
Il s'agit de jardins ouvriers à l'origine, devenus au fil du temps des jardins partagés. Ils appartiennent à un propriétaire privé qui les loue. 

Plus de sept français sur dix ont un jardin
En cette période de confinement, le jardinage fait partie des activités plébiscités, surtout que la météo est plutôt de la partie pour l'instant. Savez-vous combien de Français disposent d’un jardin? 7 sur 10. Un chiffre forcément plus élevé en Haute-Loire. La majorité le considèrent comme un espace de détente, mais d’autres aiment y bécher, y semer, y planter.
17 millions de Français cultivent plus d’un million d’hectares de jardin. Chacun à sa façon : 38% ont par exemple un coin potager. En majorité, ce sont les hommes qui s’occupent de planter les légumes. Pour les fleurs, à 76%, ce sont les femmes.

"On n'est pas très nombreux, on voit des jardins à l'abandon"
Le hic, c'est qu'en cette période de confinement, se pose la question des jardins partagés. Ils ne sont pas intégrés à la propriété et impose donc un déplacement (qui manifestement n'est pas de première nécessité). De plus, ils sont par définition partagés et la convivialité fait partie de l'essence même de ces lopins de terre. Alors peut-on encore cultiver son jardin ?
Gérard habite au Puy, "à environ 500 mètres" de son jardin. Il n'a pas la réponse mais continue d'entretenir ses 100 m² de potager depuis le début di confinement. "On n'est pas très nombreux, on voit des jardins à l'abandon", témoigne-t-il. Locataire depuis six ans, il a semé carottes, radis et salades. "On échange quelques impressions de jardinier, mais de loin", s'amuse-t-il. il va continuer à venir, tous les jours, estimant que ses légumes ont "une autre saveur"... et puis "ce serait dommage de tout devoir jeter".


Au pied du rocher, ces jardins offrent un charme incomparable / Photo DR Maxime Pitavy / Zoomdici

"En cette période, théoriquement, 80 % des jardins sont occupés"

Un peu plus loin, on rencontre Laurent, locataire depuis 2006, habitant à quelques centaines de mètres également. C'est la première fois de l'année qu'il se rend à son jardin. "Je ne sais pas si je vais venir régulièrement, avec le virus, ça fait peur", lance-t-il à travers la grille. Poireaux, tomates et courgettes sont au menu mais "ce sera moins joli que les autres années" car l'entretien sera moindre : il n'a prévu de venir que une à deux fois par semaine.
Pourtant, il a "beaucoup de boulot" sur ses 250 m² de jardin : il faut "déjà nettoyer, puis retourner la terre et ensuite semer", énumère-t-il. "En cette période, théoriquement, 80 % des jardins sont occupés", témoigne-t-il. Ce lundi après-midi, le taux d'occupation avoisinait plutôt les 5 %...

"On va quand même continuer de l'entretenir un peu, mais moins que les autres années"
En continuant notre chemin, nous tombons sur un troisième jardinier. Almindo habite avenue Foch et il a dans sa voiture son attestation de déplacement dérogatoire. "Comme c'est interdit de se déplacer, on hésite", débute-t-il avant de nous montrer sa douzaine de poules, qu'il a achetée avant l'arrivée de l'épidémie. "Il faut bien les entretenir un peu", souffle-t-il.
Depuis 20 ans, il loue ce lopin de terre de 30 m² et cette année, il a prévu de planter radis, salades haricots et oignons. "On ne sait pas trop si on a le droit alors on va quand même continuer de l'entretenir un peu, mais moins que les autres années", ajoute-t-il, alors qu'el envisage de venir y passer une heure ou deux chaque jour. Enfin, il assure qu'il se tient bien à l'écart des autres jardiniers et qu'il vient ici "avant tout pour me vider la tête et être tranquille".


Almindo exploite son potager depuis 20 ans / Photo DR Maxime Pitavy / Zoomdici

----N'appelez plus la police !
Submergée d'appels pour des questions de la vie courante liées au confinement, la police du Puy rappelle qu'il existe une plateforme dédiée sur le site du Gouvernement pour répondre aux questions, ainsi que le numéro vert 0 800 130 000. -----"On ne va pas donner de PV pour ça mais ça reste de l'appréciation"
Reste à répondre à la question initiale : les mesures de confinement permettent-elles d'entretenir son potager lorsqu'il s'agit de jardins partagés ? Impossible d'avoir un interlocuteur à la préfecture alors nous avons contacté la mairie, guère plus en mesure de nous répondre. "On s'interroge", nous répond le maire Michel Roussel, "un arrêté municipal n'est pas exclu, mais il faut qu'il ne soit pas attaquable. On doit se rapprocher de la préfecture pour savoir quelle réponse apporter à cette question".
C'est finalement le directeur adjoint du commissariat de police M.Bouny qui a la clef. "On ne va pas donner de PV pour ça mais ça reste de l'appréciation. Ils peuvent accéder à leur jardin tant qu'ils sont à proximité", répond-il, sauf que cette proximité est justement floue : on parle de un à deux kilomètres en zone rurale, sans qu'il n'y ait de de "limite kilométrique précise parce qu’on en appelle à la responsabilité des gens", a déclaré le ministre de l'Intérieur.

"Le problème, c'est si ils circulent en voiture et viennent de plus loin"
En théorie, il faut donc pouvoir s'y rendre à pied car "le problème, c'est si ils circulent en voiture et viennent de plus loin", constate M.Bouny, "alors ils ne rentrent plus dans les mesures prévues par l'attestation de déplacement dérogatoire". Mais ils ne devraient pas être verbalisés, tant qu'ils respectent les distances de sécurité et se tiennent à distance, qu'ils évitent les contacts et respectent les gestes barrières.
En d'autres termes, tant qu'ils cultivent leurs jardins, il n'y a pas de problème. Si ils se retrouvent pour boire l'apéritif dans une cabane, alors ils seront verbalisés. "Il faut avant tout du bon sens, et tout ira bien", conclut le directeur adjoint du commissariat de police du Puy.

Maxime Pitavy