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Danger sur les Zones de Revitalisations Rurales (ZRR)

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:41

40% des 36 682 communes françaises sont aujourd’hui concernées par le dernier classement ZRR en date, celui du 30 juillet 2014, et elles sont au nombre de 190 en Haute-Loire, soit 73% des 260 communes que compte le département.
A la mesure des enjeux de développement d’un pays qui est le plus vaste de toute l’Europe, ces dispositifs d’encouragement à l’implantation d’activités économiques, qu’elles soient ou non de nature marchande, contribuent puissamment au rééquilibrage entre espaces urbains et espaces ruraux.
Ce statut de ZRR est aujourd'hui menacé par les regroupement et l’agrandissement des intercommunalités. Cécile Gallien, Maire de Vorey et Conseillère départementale, avait déjà tiré la sonnette d'alarme cet hiver. Le député jean-Pierre Vigier, qui se proclame régulièrement "défenseur de la ruralité", lui emboîte le pas et vient d'interpeller le Ministre de l'Aménagement du territoire, de la Ruralité et des Collectivités territoriales, Jean-Michel Baylet, lors de questions orales sans débat, ce mardi 26 avril, à l’Assemblée Nationale.

Des avantages en ZRR pour compenser les obstacles 
Face aux multiples contraintes logistiques liées à l’éloignement des grandes métropoles, telles que le coût du transport, l’accès plus difficile aux services, ou encore l’insuffisante généralisation du très haut débit, ces dispositifs ZRR offrent la possibilité, non seulement à des entreprises industrielles et commerciales, mais aussi à des activités économiques de nature associative œuvrant dans des domaines tels que par exemple l’accueil de personnes âgées ou d’enfants, de compenser en partie ces obstacles par des exonérations ou des dégrèvements de nature fiscale sur les impôts commerciaux ou sociale sur les charges salariales.
Les professionnels peuvent bénéficier d’une exonération d’impôt sur les bénéfices et de taxe professionnelle. La taxe foncière peut également disparaître, tout comme les cotisations sociales sur les salaires. L'ensemble des détails à consulter ici. Les règles actuelles applicables aux ZRR prévoient également entre autres des facilités de financement pour la mise en place de maisons de service au public ou encore l’implantation de médecins, de dentistes, de pharmacies dans les espaces ruraux.

----Le dispositif actuel concerne plus de six millions de Français
Aujourd'hui, les ZRR couvrent 14 691 communes, soit près de 40 % du total des communes hexagonales, et concerne plus de six millions d'habitants. Le zonage obéit à trois critères depuis 2005 : un critère institutionnel, un critère de faible densité démographique (inférieure à 31 habitants au km², soit pratiquement le quart de la densité moyenne de la France Métropolitaine qui est de 118 hab/km²) et un critère socio-démographique. Pour savoir si votre commune est classée ZRR, le détail à consulter ici.-----Des territoires ruraux agrégés aux métropoles... et privés des avantages en ZRR
Tels qu’ils sont établis aujourd’hui, "les critères d’éligibilité au statut de ZRR sont globalement pertinents", selon Cécile Gallien. Ces critères sont brièvement rappelés dans l'encadré ci-contre. Le député Jean-Pierre Vigier avait proposé un dispositif plus resserré avec deux nouveaux critères en octobre 2014. 
"Ces précieux dispositifs de péréquation nationale sont aujourd’hui menacés par une des conséquences de la loi NOTR(e)", estime Cécile Gallien, "qui vise à étendre la superficie des intercommunalités et donc à en diminuer très fortement le nombre dans toute la France. Dans ce cadre, un grand nombre de territoires ruraux vont s’agréger autour de pôles urbains". 
Or le Projet de Loi prévoit d’attacher dorénavant le statut de ZRR à l’ensemble d’un territoire intercommunal et non plus à la seule qualité de commune. Ainsi une commune située à 40 km d’une ville moyenne, laquelle deviendrait dorénavant son chef-lieu intercommunal, serait amenée à perdre son statut de ZRR. Et par conséquence, ne plus être éligible au dispositif ZRR, et ne plus bénéficier des multiples avantages.

Sans les avantages des ZRR, les entreprises risquent d'abandonner les territoires ruraux
Pour la Maire de Vorey, "les conséquences seraient dramatiques pour les activités économiques essentielles à la vie de ces territoires. Les entreprises qui compensent aujourd’hui par des dégrèvements de charges fiscales et sociales attachés au statut ZRR, les surcoûts logistiques que l’éloignement des grands centres urbains leur occasionne, arbitreraient, une fois perdus ces maigres avantages, pour des délocalisations vers les pôles urbains".

Les collectivités ne seront plus en mesure d'absorber les renchérissements
Et si elles ne le font pas, ce sont leurs donneurs d’ordre à qui ces surcoûts sont refacturés, qui le leur imposeront. Et parmi ces « donneurs d’ordre », il convient de rappeler que figurent en bonne place les Conseils départementaux déjà fragilisés par l’explosion du RSA, "qui ne pourront pas absorber le renchérissement des prix de journée qui leur sera de ce fait réclamé par les établissements d’accueil de personnes âgées ou de handicapés, implantés dans les espaces ruraux et qui rendent service à l’ensemble de la population", prophétise la Conseillère départementale.
Il risque d'en être de même pour les Collectivités locales rurales aux budgets limités, qui se verront dans l’impossibilité de compenser les hausses de dépenses des crèches et autres établissements d’accueil de l’enfance, due à la disparition des exonérations ZRR. 

La balle dans le camp des parlementaires
Dans les départements ruraux de France, le revenu moyen des habitants est beaucoup plus bas (en Haute-Loire : 11 580 €) que la moyenne nationale (13 696 €), et la péréquation nationale telle la ZRR, leur permet d’être des territoires viables, habités, et parfois organisés autour de petits bourgs-centre offrant des services à la population, et engagés dans des actions de dynamisations.
Mais les communautés d’agglomération ou de communes ne disposant pas, de par la loi, de compétences régaliennes leur permettant de compenser, pour leurs communes membres, les effets de la perte du statut ZRR, "c’est à l’évidence à l’Assemblée Nationale et au Sénat d’en tirer rapidement les conséquences et à cet effet d’infléchir le texte en discussion pour maintenir la définition du statut ZRR à la maille communale et non intercommunale", conclut la Maire de Vorey.

"Des communes pourraient sortir de ce dispositif ZRR en 2017 alors qu'elles en ont encore besoin"
Lorsqu'il a interpellé Jean-Michel Baylet à l’Assemblée Nationale ce mardi, le député-maire de Lavoûte-Chilhac a souligné : "aujourd'hui, les élus et les acteurs de nos territoires sont très inquiets car des communes pourraient sortir de ce dispositif ZRR en 2017 alors qu'elles en ont encore besoin. Ceci pourrait être le cas en Haute-Loire. Cette crainte est renforcée dans un contexte où nos communes subissent une baisse des dotations de l’Etat sans précédent. Pour les communes rurales, chaque euro en moins de dotation, c’est un euro en moins pour nos investissements et donc pour notre économie locale".
Jean-Pierre Vigier assure que "les ZRR ont été créées pour soutenir notre développement". Pour la plupart des élus des territoires ruraux, tous attachés au maintien de ce dispositif, les ZRR sont un symbole des politiques d’équité des territoires. "Elles doivent donc évoluer pour continuer à servir leur rôle", a conclu Jean-pierre Vigier. Le Ministre Jean-Michel Baylet a confirmé que l’agrandissement des intercommunalités pourrait avoir une influence significative sur les ZRR, tout en rappelant les propositions du rapport parlementaire du député en 2014 sur les ZRR, il a assuré vouloir les considérer dans le cadre d’une réforme dont la réflexion vient de débuter désormais.

Maxime Pitavy 

- Photo d'illustration, lors d'une manifestation des agriculteurs contre les zones vulnérables - Archive Zoomdici.fr