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Haute-Loire : une fin de grève passée sous silence

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:38

1048 € (en incluant le remboursement des frais kilométriques) pour 130h dont 18,5h de dimanches travaillés : c'est le constat que mettait en avant la CGT pour justifier ses deux principales revendications, à savoir une augmentation de 1,50 euro du taux horaire et l'instauration d'un treizième mois.
De son côté, la Direction Générale assurait qu'en 2014, le SSIAD affichait un résultat déficitaire et que les efforts entrepris en 2015 avaient permis de poser les bases d’un retour à l’équilibre budgétaire, avant de déplorer : "les revendications exprimées par la CGT viendraient mettre en péril le SSIAD (ndlr : service de soins infirmiers à domicile) et les emplois".

Un côté perdant-perdant... sauf pour les patients
Voilà pour le premier acte. Les médias locaux avaient bien relayé ce mouvement de grève mais depuis, plus aucune nouvelle... Un protocole de fin de conflit a bien été trouvé le vendredi 18 décembre au soir, mais personne n'a jugé utile de communiquer dessus. Et pour cause, aussi bien les salariées que la Directeur Général Rémi Bouvier reconnaissent à demi-mot le côté perdant-perdant de cette fin de conflit.
Mais il y a un point sur lequel s'accordent la CGT et la Direction Générale : la fin de grève était essentielle pour le bien-être des patients (ils sont 105 concernés en Haute-Loire et 85 n'avaient pas été visités le lundi, puis un service minimum avait été assuré). La CGT affirmait que les patients soutenaient les aides soignantes qui auraient cessé le mouvement "par conscience professionnelle" et pour "ne pas laisser les patients livrés à eux-même pendant cette période des Fêtes".

----De 13,5 mois à 12 mois
Autre aspect de cet accord (non abordé par le syndicat mais par la direction) : les aides soignantes étaient jusqu'alors payées sur 13,5 mois, elles le seront désormais sur 12 mois.-----Une augmentation six fois moindre à celle escomptée... et pas de 13ème mois
Pour les salariées, qui réclamaient une augmentation de 1,50 euro du taux horaire, la pilule est dure à avaler avec seulement 0,26 € obtenus, soit six fois moins qu'escomptés (c'est en réalité une augtmentation de 2,17 % de la prime de choix, soit 0,26 € en plus par heure). Cette mesure a bien un effet rétroactif au 1er janvier 2015 mais celà ne représente, au maximum pour celles qui ont le plus gros voume horaire (environ 110 heures par mois), que 30 € par mois...
On ne parle même pas du treizième mois, passé aux oubliettes. "On est loin des revendications", reconnaît Bruno Bergogne, secrétaire du syndicat CGT des organismes sociaux. Il assure qu'une communication devrait être réalisée, début janvier, et déplore pour conclure : "il y avait une grande déception de ne pas voir se déplacer le directeur, elles l'ont très mal vécu et ont considéré que c'était une attitude de mépris de sa part alors que le mouvement a duré une semaine".

----Pourquoi ne pas vous être déplacé en personne ?
"Ça aurait changé quoi ?", nous répond Rémi Bouvier, "il y a plus de 2 000 slariés dans nos établissements, et 15 d'entre elles veulent voir le directeur ?.. De toute façon, j'ai mandaté une personne compétente, en l'occurrence la Directrice Générale du secteur médico-social, qui gère plus de 15 EHPAD, 3 SSIAD et d'autres structures, donc je ne perçois pas le côté dévalorisant de négocier avec elle".-----"Ce qu'elles ont obtenu aurait pu l'être lors d'une simple négociation, sans mettre la structure en danger"
"On ne peut pas donner de l'argent que l'on a pas. Nous ne sommes pas une entreprise captalistique, on travaille avec l'argent que nous donne l'Etat et la priorité est de préserver l'emploi", assène d'emblée Rémi Bouvier, le Directeur Général, joint par téléphone ce mardi 29 décembre. Il reconnaît clairement que cette affaire lui laisse "un goût amer" car "on n'a pas été prévu et pour les patients, c'est globalement très catastrophique" et une chose l'agace particulièrement : "la grève, c'est toujours quand on n'est pas parvenus à obtenir un accord en première intention, et il n'y en a pas eu. C'est vraiment bête car ce qu'elles ont obtenu aurait pu l'être lors d'une simple négociation, sans mettre la structure en danger".
Le Directeur Général met en avant l'arrivée de deux "jeunes" délégués syndicaux qui "ne connaissaient peut être pas bien le fonctionnement et le mode de tarification des SSIAD". Rappelons que ce SSIAD perdait 80 000 euros l'an dernier. "Le secteur de la santé n'est pas florissant", ajoute-t-il, "et en comparaison aux autres structures, les salaires et conditions de travail sont plutôt honorables". 

De nouvelles négociations à l'automne prochain ?
Au final, les aides soignates sont donc bien loin de leurs revendications mais espèrent ouvrir de nouvelles négociations salariales lors des prochaines NAO (ndlr : négociations annuelles obligatoires), qui auront lieu à l'automne prochain. "On doit pouvoir trouver un terrain d'entente, sans conflit, sans grève", assure Bruno Bergogne, "même si on garde cette option de côté car malheureusement, on voit bien que ça ne bouge que comme ça".
Soulignons que ce seront les premières NAO depuis des années (il y avait déjà eu des accords d'entreprises) car elles nécessitent la présence d'un délégué syndical, ce qui n'était pas le cas ces dernières années. "On verra bien", conclut Rémi Bouvier, "mais quand vous regardez les hôpitaux publics en ce moment, il n'y a pas de négociations, puisqu'il n'y a pas d'argent".

Maxime Pitavy