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Laussonne

Le Chambon : un cercle de silence pour une famille albanaise expulsée

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:35

Une famille bien intégrée et volontaire. C'est ainsi que les associations la Cimade et Plateau Asile Solidarité, mais aussi les enseignants qui ont côtoyé les enfants, décrivent la famille Hoxha (NDLR : nom volontairement modifié).
Installée en France depuis environ deux ans, cette famille albanaise a été renvoyée dans son pays ce dimanche 5 juillet 2015. A 20 heures, environ une dizaine de gendarmes, dont un colonel, est venue exécuter l'obligation de quitter le territoire français qui avait été notifiée à la famille un mois plus tôt.
Si aucune violence n'a été exercée, les associations dénoncent la « brutalité de l'expulsion » réalisée « de manière indigne ». La préfecture de la Haute-Loire, elle, indique que depuis 90 jours cette famille domiciliée à Laussonne était assignée à résidence, devant pointer à la gendarmerie pour faire état de ses préparatifs de départ.

---------Une famille menacée chez elle
« Plusieurs offres d'aides au retour, avec billets d'avions et petit pécule pour l'installation, ont été faites », précise la préfecture. Toutes rejetées par la famille Hoxha qui souhaitait rester en France. Car en Albanie, elle craint les représailles de familles ennemies selon la loi ancestrale de la vendetta pour des conflits parfois très anciens, souvent liées à des propriétés.
Un motif insuffisant pour l'Etat puisque la famille Hoxha a épuisé tous les recours. Après avoir été admise au séjour en France à son arrivée et avoir été hébergée au Centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) du Chambon-sur-Lignon, la famille Hoxha s'est vue refuser sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Leur recours déposé auprès de la Cour nationale du droit d'asile a été rejeté ce qui leur a fait perdre le statut de demandeurs d'asile et donc leur hébergement en CADA. La famille était alors sous l'obligation de quitter le territoire français sous un mois. Elle a souhaité produire de nouvelles données. Données que l'Ofpra n'a pas jugées suffisantes.

----Perrine Barriol, de la Cimade 43, dénonce le "durcissement actuel" de la loi française. "Jusqu'à présent les obligations de quitter le territoire n'étaient pas appliquées aussi brutalement", estime-t-elle, anticipant avec crainte le texte de loi relatif au droit des étrangers en France qui sera soumis à l’Assemblée nationale le 20 juillet prochain.-----Pourquoi cette expulsion un dimanche soir ?
Même si la famille Hoxha s'attendait à un retour forcé, elle a été prise par surprise ce dimanche soir, à 20 heures, quand les gendarmes sont arrivés chez elle, dans son appartement de Laussonne. Les parents et leurs enfants ont dû faire leur valise et ont été amenés en centre de rétention à Lyon dans la soirée. On peut supposer que la préfecture ne donne pas de préavis pour éviter que les choses ne dégénèrent avec l'éventuelle mobilisation de personnes en soutien aux sans-papiers. Quant à l'horaire tardif, la préfecture explique qu'il s'agit de garder le moins longtemps possible les familles en centre de rétention. En l'occurrence, l'avion pour l'Albanie décollait lundi matin. Par ailleurs, la préfecture précise qu'elle a choisi d'attendre les vacances scolaires pour ne pas perturber la scolarité des enfants, scolarisés en Haute-Loire. La préfecture précise également qu'elle prend garde à ne pas séparer les familles, alors qu'elle n'y est pas tenue concernant l'aînée des filles, Ani, qui est majeure.

Un cercle de silence au Chambon ce samedi
Les camarades de classe d'Ani au lycée Simone Weil ont exprimé l'intention de monter un rassemblement pour réclamer son retour d'Albanie. Quant aux associations de soutien aux sans-papiers, la CIMADE 43 et Plateau Asile Solidarité organisent un cercle de silence, ce samedi 11 juillet 2015, à 10 heures, place de la Fontaine au Chambon-sur-Lignon.
La famille Hoxha ne peut pas reposer de demande d'asile pendant six mois. Si elle revient sur le territoire français, ce serait comme clandestins.

Annabel Walker

Selon le témoignage ci-dessous d'une enseignante qui donne bénévolement des cours de français langue d’étude (français langue étrangère) au Centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) du Chambon-sur-Lignon, la famille Hoxha est très investie pour s'intégrer en France. Ce témoignage, du 5 janvier 2015, a été écrit pour la préfecture.

« J’ai rencontré la famille Hoxha dès le début de mon activité au CADA. Ils étaient intégrés  dans mon groupe de débutants et ont fait de très importants progrès. Ils ont été très assidus, attentifs, chaleureux, persévérants et enthousiastes pour apprendre le français. Leur gentillesse et leurs rires, leurs interrogations et leur participation active ont beaucoup contribué à la bonne forme du groupe et au bon déroulement du cours. J’ai été conviée plusieurs fois dans leur appartement et reçue avec beaucoup de chaleur pour un café, un gâteau, un peu plus de chaleur et discussions. Leur volonté et leur capacité d’intégration me paraissent évidents. En ce qui concerne les enfants, j’ai surtout été en contact avec Ani : son français est de bon aloi et a fait un énorme bond en avant. Elle s’est de toute évidence fait de nombreuses amies à Yssingeaux et au Chambon sur Lignon, et je ne doute pas qu’il en sera de même au Puy. J’ai gardé un contact amical avec la famille, qui pour moi représente plus que  de simples « élèves » apprenant le français, leur soif d’intégration est vraiment touchante, leur capacité d’accueil et d’écoute très importante.  Le couple aspire à travailler et n’est pas resté inactif au Chambon : témoin, le magnifique potager entretenu dans les terrains du CADA, l’aide apportée à leurs enfants, pour l’école entre autres. Ils sont par ailleurs d’une grande générosité et d’une grande ouverture d’esprit, très curieux de tout ce qui concerne notre pays. Je leur souhaite de tout cœur de pouvoir s’installer parmi nous, il me parait évident que s’ils devaient obtenir la citoyenneté française, ils seraient très rapidement très bien intégrés. Je me tiens à votre disposition pour d’éventuelles questions. »