Ce vendredi 17 octobre, un jeune homme de 18 ans, défiguré par les ecchymoses, a passé la nuit à l'hôpital du Puy-en-Velay. C'est une riveraine qui serait venue au secours de l'adolescent et qui aurait appelé pompiers et policiers ; la victime explique avoir été passée à tabac et menacée de mort par trois hommes. Aujourd'hui, il a peur pour sa vie : ses agresseurs ont été remis en liberté.
« On va te crever »
Il est 21h30, vendredi, quand le jeune homme est roué de coups au niveau du quartier Ours-Mons, juste à côté du centre aqualudique La Vague. « Trois jeunes m'ont interpellé alors que je descendais au Puy à pied. Ils m'ont demandé une cigarette, je leur ai donné », explique-t-il. Là, les quatre garçons discutent « de tout et de rien » et rigolent même ensemble. « L'un me demande de sortir mon téléphone pour le faire sonner, ce que je fais. » L'adolescent raconte avoir ensuite repris sa route avant d'être appelé à nouveau. « Je fais demi-tour, je me dis que je dois avoir oublié des affaires. » Là, il aurait reçu un violent coup de poing, le premier d'une longue série. « Ils m'ont passé la lanière du sac autour du cou et on commencé à m'étrangler. » La victime explique avoir reçu un coup de couteau dans le dos – qui n'aurait « que » déchiré son blouson – et sur la main droite. Il a plusieurs points de suture à côté du pouce. Les trois agresseurs présumés auraient menacé de le tuer : « Comme t'as vu notre visage, on va te crever. »
Le visage recouvert d’hématomes
« Je me suis jeté dans le buisson d'à côté. J'ai commencé à hurler et ils ont pris la fuite. » Une riveraine entend les cris, sort de chez elle et appelle les secours. Pompiers et policiers arrivent rapidement sur place, prennent en charge l'adolescent et lui demandent d'expliquer ses blessures. Ce mercredi 22 octobre, son œil gauche est toujours imbibé de sang et son visage est couvert d’hématomes. Il passe la nuit de vendredi à samedi à l'hôpital et ne prévient ses parents que le lendemain matin. « Ils ont pris ma sacoche et mon téléphone, je ne pouvais pas les joindre. » Il explique que l'hôpital n'a pas eu à contacter sa famille parce qu'il était majeur. Le lendemain, le père et et son fils retournent sur les lieux de l'agression pour retrouver le téléphone, pensant qu'il serait peut-être simplement tombé de sa poche dans l'attaque. Stupeur : la victime reconnaît l'un de ses agresseurs, dans un immeuble en face, alors qu'il s'arrête devant une fenêtre ouverte. « J'ai pété un câble », confie le père qui veut venger son garçon.
Les agresseurs présumés relâchés
Il préfère finalement appeler la police et insiste pour que les agresseurs soient interpellés. Mais ces derniers réussissent à prendre la fuite. « On est retournés au commissariat dimanche et à partir de photos, mon fils les a identifiés », explique-t-il. Le lendemain, lundi 20 octobre, surprise : deux des trois agresseurs présumés se présentent au commissariat et sont placés en garde à vue. Mais à la stupéfaction de la famille de la victime, les deux hommes sont remis en liberté et leur procès est fixé le… 7 avril 2015. « J'ai peur d'aller au travail au pied, j'ai peur de marcher en ville », confie le jeune homme de 18 ans qui habite lui aussi le quartier de Mons. « J'ai peur pour ma vie. J'ai failli ne plus être là pour raconter tout ça. » Son père ne décolère pas : « On nous avait dit qu'ils devaient passer devant le tribunal [dans le cadre d'une comparution immédiate, ndlr] mardi matin ! »
L'enquête présente une toute autre version
Jacques Louvier, Procureur de la République au tribunal du Puy-en-Velay, explique que « personne n'a jamais parlé de comparution immédiate ». Deux faits ne justifient pas, pour le Procureur, un procès immédiat : d'une part, la victime a reçu une Incapacité totale de travail (ITT) n'excédant pas huit jours (cinq jours) et, d'autre part, « l'origine des coups » est encore floue. La circonstance aggravante de l'utilisation d'une arme blanche n'a, pour l'instant, pas été retenu dans le dossier. Jacques Louvier souligne que l'enquête fait état d'un « jeu » - appelé « tibia contre tibia » - entre la victime et l'un des agresseurs présumés. Selon les différents éléments recueillis, les deux hommes se seraient mis des coups dans les jambes de plus en plus fort, jusqu'à ce que cela dégénère. Mais le Procureur de la République tempère : « Je comprends tout à fait qu'il ait peur. Pour moi, des délais comme ça [à savoir un procès six mois après les faits, ndlr] c'est intolérable. » Le magistrat condamne un irréversible retard de 80 dossiers non-jugés au moment de sa prise de fonction, en septembre 2012.
« Le procès pourrait être avancé », termine Jacques Louvier.
A.L.