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Qui se cache derrière le petit train touristique du Puy ?

mar 02/09/2014 - 17:36 , Mise à jour le 26/11/2020 à 19:24

La passion se transmet parfois au fil des générations car Renée, aujourd'hui gérante à la retraite, partage le même intérêt pour son petit train touristique que sa fille, Carine, aujourd'hui directrice et seule salariée de la SARL (société à responsabilité limitée).

C'est le patriarche de la famille, Michel Chabrier, aujourd'hui décédé, qui avait initié le projet il y a bientôt trente ans, alors que les petits trains touristiques n'étaient encore que très peu répandus en France.

L'idée est venue d'un petit train faisant de la publicité
"Il y avait un petit train qui circulait en ville pour faire de la publicité", se souvient Carine Chabrier, "c'est ce qui a donné l'idée à mes parents de se lancer dans l'aventure". Aujourd'hui encore, comme à l'époque déjà, il n'y avait qu'un seul fabricant et il a bien encore fallu attendre neuf mois avant de le mettre en place, afin de respecter les diverses normes et homologations. "Quand on s'est lancé, il y en avait très peu : à Marseille, à Sète... mais ça nous est venu spontanément", ajoute la gérante à la retraite.
A l'époque, le petit train touristique fonctionnait avec un moteur de tracteur, mais il a depuis été remplacé par un moteur de camion, afin de respecter les normes européennes. "Aujourd'hui encore, on a des contrôles de sécurité chaque année, de pollution, etc. Ce sont les mêmes contrôles que pour un bus". Il faut d'ailleurs un permis D (transports en commun).

----Le train compte 45 à 60 places, en fonction de la corpulence des clients et il leur arrive parfois de refuser du monde car le petit train touristique est déjà plein. L'entreprise est 100 % privée. Elle reverse une redevance à la mairie du Puy pour l'occupation du domaine public. Le train fonctionne du 2 mai au 30 septembre tous les jours. Pour le reste de l'année, il demeure accessible pour les groupes et sous réservation.-----Carine a commencé à dépanner à onze ans
"J'avais onze ans lorsqu'on a débuté l'activité", se rappelle Carine, "faire le commentaire devant toutes ces personnes m'a ensuite bien aidé à l'école pour mes examens oraux, ça décoince bien !", lâche-t-elle dans un rire franc, avant d'ajouter : "c'est une bonne expérience pour les jeunes que l'on prend parfois en saison".
En période estivale, deux personnes viennent aider la directrice pour l'accueil des clients et le commentaire au micro, même s'il lui arrive parfois de se débrouiller seule et de conduire le véhicule en même temps. La femme qui l'assiste n'est d'ailleurs pas une étudiante, mais une professionnelle du tourisme aguerrie.

Un investissement à rentabiliser en sept ans
Michel et Renée tenaient un bar à l'époque au Puy. Quand ils décident de se lancer dans l'aventure (avec l'appui d'Yves devèze, aujourd'hui conseiller municipal du Puy), le risque est gros car il s'agit d'un important investissement, qui ne sera rentabilisé (le matériel seulement, qu'il faut ensuite renouveler) en sept ans.
"Dès la première année, ça a bien fonctionné", se remémore Renée, "on a bénéficié de la curiosité des Ponots, puis ça s'est stabilisé et il faut alors se développer, avec l'accueil des groupes ou encore la publicité". Si la clientèle est avant tout touristique, les Ponots sont toujours présents dans le petit train : "cette année encore, on a eu quelques uns, car ils n'étaient pas partis en vacances".

Des clients "souvent très pressés"
"Pour faire ce métier, il faut avant tout être commerçant", souligne Renée avant d'observer : "en plus, c'est un métier fatiguant, épuisant et stressant. D'une part, on ne compte pas nos heures et on a peu de vacances, et certainement pas en été, et d'autre part, nous sommes responsables de la sécurité de nos clients". En 30 ans, "on touche du bois", mais il n'y a jamais eu de mésaventure, que ce soit des accidents ou des blessés. "On va doucement mais on n'est jamais à l'abri", ajoute-t-elle.
Et bien qu'ils soient en vacances, les clients ne sont pas toujours de bonne humeur... "Ils sont souvent très pressés", observe Carine, "encore hier (ndlr : reportage réalisé le jeudi 28 août), un couple est venu à 14h et m'a averti qu'ils devaient être le soir même en Corse... Il fallait donc impérativement être de retour dans l'heure".

----"Il y a quelques années, on a des belges qui sont venus faire un tour de train. Ils étaient tellement contents qu'ils sont retournés en Belgique chercher des copains pour revenir aussitôt au Puy et refaire un tour ! ", nous confie Carine en guise d'anecdote.-----"Les touristes sont souvent bluffés par la beauté de la ville"
La réussite du petit train touristique est aussi liée à l'attractivité touristique de la ville qui l'accueille. Alors comment se porte le Puy ? "Malgré les nombreux efforts réalisés, ça reste une ville pas très bien connue", répond Carine. "Pourtant, après leur tour de train, les touristes sont souvent bluffés par la beauté de la ville... On en a même certains qui reviennent !", ajoute-t-elle.
Mais au bout de 30 ans, le métier ne devient-il pas trop répétitif ? "C'est vrai que c'est répétitf mais je ne m'en lasse pas", rétorque Carine. Le discours est mis à jour chaque année avec une base qui reste la même : "entre les expos à l'Hôtel-Dieu ou les travaux du musée, il faut bien se mettre à jour", souligne-t-elle.

En 28 ans, "je n'ai jamais vu si peu de monde que cette année"
"Cette saison a été très particulière, on a eu très peu de monde, notamment au mois d'août. Il y a certes l'aléa de la météo mais ce n'est pas que ça : le pouvoir d'achat est en berne, la gare SNCF a été fermée pour cause de travaux (lire)". En 28 ans de présence à bord du petit train, "je n'ai jamais vu si peu de monde que cette année, c'est une saison un peu chaotique".
Il faut au moins huit personnes à bord du petit train pour amortir le coût des charges et du gasoil. Sinon, le train ne part pas "mais ça n'arrive presque jamais et on n'est pas non plus un taxi !", conclut-elle en riant.

Reste à savoir si l'affaire continuera de se perpétuer au fil des générations. La fille de Carine est encore jeune : elle a tout le temps de se poser la question et de prendre le train en marche.

Maxime Pitavy