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Prud'hommes : une rentrée revendicative

, Mise à jour le 26/11/2020 à 17:49

Au cours de cette audience solennelle de rentrée, les juges prud'homaux étaient plutôt remontés et de nombreux dysfonctionnements ont été pointés du doigt.
Comme chaque année, et selon le principe d'alternance, la présidence a changé de mains : Gérard Margerit, représentant le collège des employeurs, a remis les clefs de la juridiction à Jean Presumey, représentant le collège des salariés.

Une augmentation des saisines de 30 %
Le Président sortant, Gérard Margerit, a observé : "d'une manière générale, les années de présidence employeur, le nombre de saisine augmente et les années de présidence salariée, il diminue. Cette tendance a été confirmée en 2013 avec une progression du nombre de saisines de 30 % par rapport à 2012". Il faut toutefois relativiser cette hausse car sur la moyenne des 15 dernières années, le nombre de saisines est en baisse. Pour Gérard Margerit, l'augmentation du nombre de saisines en 2013 est surtout imputable aux "décisions non motivées de certains chefs d'entreprise, quelquefois de pseudo-entrepreneurs", même s'il a tempéré quant à la méconnaissance du Code du travail : "par une accumulation de nouveaux textes, il a pris une épaisseur incommensurable".
----En droit, la saisine est l'appel ou le recours à un organe juridictionnel ou à une autorité de police (agent ou un officier de police judiciaire en France). La saisine peut, par exemple, être constituée par un dépôt de plainte ou un flagrant délit (flagrance).-----Autres éléments chiffrés de cette audience de rentrée : la durée moyenne de traitement des affaires est restée stable à 9,3 mois. Le tribunal s'est également félicité du faible pourcentage de ses décisons qui ont été frappées d'un appel, en l'occurence 15 % contre 58 % au niveau national. Enfin, concernant les ruptures conventionnelles, 845 ont été homologuées en Haute-Loire en 2013, une progression de 5,62 % certes, mais une progression en baisse par rapport aux années précédentes (+6,95 % en 2012 et +9,50 % en 2011). Rappelons enfin qu'en France, environ 200 000 affaires sont traitées chaque année par les conseils des prud'hommes et 98 % des demandes émanent des salariés.

Manque de personnel
Un autre problème qui a été souligné par le Président sortant lors de cette rentrée, c'est le manque d'un poste au greffe : "il est nécessaire que le ministère prenne des décisions urgentes à propos du fonctionnement de notre greffe". En effet, depuis la suppression du poste de directeur du greffe en 2010 et un départ à la retraite, le conseil fonctionne avec deux ETP (Equivalent Temps Plein) alors qu'il en avait 3,8 il y a trois ans.
Un courrier a bien été adressé à la garde des sceaux mais il est resté sans réponse... On attend donc toujours une décision "pour une bonne administration des services", même si "beaucoup ont le sentiment que le service public est assuré, grâce aux efforts de tous".

----Le coût du fonctionnement des élections prud'homales est évalué à 100 millions d'euros tous les cinq ans, auquel il faut ajouter la formation des juges pour 40 millions d'euros tous les cinq ans, soit un coût total de 28 millions d'euros par an. "La fraude fiscale, c'est 50 milliards d'euros par an", cite Jean Presumey en comparaison.-----"Une atteinte à la démocratie" pour faires des économies
Au coeur des incertitudes en cette rentrée : la composition des conseils prud'homaux à partir de la prochaine mandature, en 2016. En effet, à la demande de Christiane Taubira, un groupe de travail planche sur cette question et propose de remplacer l'élection des conseillers prud'homaux par une désignation en fonction de l'audience nationale des différentes organisations patronales et syndicales. Le gouvernement s'appuie sur le faible taux de participation à ces élections (environ 25 % des inscrits en 2008) et souhaite réaliser des économies (voir encadré).
Pour la CGT, réunie vendredi matin à cette occasion, "c'est une honte et une atteinte à la légitimité de cette juridiction". Jean Presumey, le nouveau président du conseil des prud'hommes et représentant le collège des salariés, s'oppose à cette proposition, assurant que la majorité des 14 500 conseillers hexagonaux souhaite le maintien de cette élection. Pourtant, Gérard Margerit, du collège des employeurs, a déclaré ce lundi matin : "je ne suis pas opposé à la désignation, comme d'ailleurs certaines organisations syndicales salariées l'ont déjà également affirmé". Ecouter la position de Jean Presumey au micro de Zoomdici. {{audio1}}

Des solutions quand même dans chaque collège
La Haute-Loire compte 44 conseillers prud'homaux. Rappelons que ce ne sont pas des juges professionnels et qu'il s'agit d'une des rares juridiction où ils sont élus et non désignés. Dans le projet du gouvernement, l'échevinage est également envisagé à moyen terme (c'est à dire l'intégration de juges professionnels dans la prise de décision).
Sans bercer dans le fatalisme, chacun des deux collèges a des propositions pour améliorer la situation. Gérard Margerit penche pour le rapport préconisé par Jacky Richard en 2010, qui consiste en une élection au second degré avec un corps électoral renouvelé : "ça aurait le mérite de faire voter les 300 000 délégués du personnel représentant les 13,2 millions de salariés travaillant dans des entreprises ayant un effectif supérieur à dix salariés".
Pour Jean Presumey, ce n'est qu'une affaire de volonté politique et le taux de participation à cette élection pourrait reprendre de l'ampleur si les pouvoirs publics le souhaitaient en modifiant le cadre législatif. Ecouter. {{audio2}}

 

Maxime Pitavy