Réforme des lycées pros : les élèves...« de la chair à patron » ?

Par Nicolas Defay , Mise à jour le 13/12/2023 à 04:00

Temps de lecture : 3 minutes

Ce mardi 12 décembre, plusieurs syndicats de l’Éducation nationale et des enseignants en lycées professionnels se sont regroupés devant l’Inspection académique au Puy-en-Velay. Les raisons de la colère ? La réforme Grandjean qui menace gravement, selon les manifestants, l’identité intellectuelle et professionnelle des élèves.

Ils sont une quarantaine à tenir drapeaux et discours devant les escaliers de l’Inspection académique au Puy-en-Velay. Aux côtés de Force Ouvrière, de la FSU, de la CGT, de Sud Solidaires et de la Snalc (Syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur), les « profs » des quatre lycées professionnels publics et des deux privés de Haute-Loire se dressent ensemble contre la réforme de Carole Grandjean, ministre déléguée à l’enseignement et la formation professionnelle.

« Ces formations seront au service du patronat local. »

Louise Pommeret, cosecrétaire départementale à la FSU, explique les trois « dérives », selon ses termes, de cette réforme. « La plus grave à mon sens est que la nouvelle carte des formations passera sous l’autorité du préfet, des sous-préfets, le tout en concertation avec les chefs d’entreprise ! Autrement dit, ce sont eux qui vont décider quelles filières pro devront être développées selon les besoins des entreprises départementales et celles qui disparaîtront. »

Son camarade de Force Ouvrière, Laurent Berne, complète : « C’est très grave car ces formations seront au service du patronat local. À la sortie de leur cursus, ils n’auront pas un diplôme qualifiant susceptible de leur ouvrir des portes et des possibilités diverses. Ils auront simplement un emploi, taillé sur mesure pour un poste bien précis et uniquement pour celui-ci ».

Louise Pommeret de la FSU et Laurent Berne du syndicat Force Ouvrière.
Louise Pommeret de la FSU et Laurent Berne du syndicat Force Ouvrière. Photo par Nicolas Defay

Moins de cours en classe, plus de stage en entreprise

Le deuxième point de crispation développé par les syndicats est la réduction des heures d’enseignement en classe pour les élèves au profit des stages en entreprise. « Ils vont perdre 170 heures de cours aussi bien dans le général que dans le professionnel !, déplore Louise Pommeret. Ça correspond à environ 7 semaines de cours sur l’ensemble du bac pro en trois ans ! »

Laurent Berne ajoute de son côté : « Ils sortiront avec un bac+1 et les formations ne seront reconnues ni par l’État, ni pas les conventions collectives. Au terme de leur parcours professionnel, ils ne seront qualifiés que pour occuper le poste dans l’entreprise qui a, en quelques sortes, commandé cet emploi ».

D’après les syndicats, les textes de la réforme GrandJean passeront au Conseil supérieur de l’Éducation nationale le 14 décembre pour une application pour la rentrée 2024

« Tout est dans le flou le plus total »

Le dernier « coup de gueule » porte sur la condition des enseignants. « Moins de temps en classe, c’est bien évidemment la crainte de suppressions de postes, soulève Louise Pommeret. C’est aussi la crainte de reconversions forcées. Les enseignants sont inquiets concernant leur emploi du temps et leurs horaires de travail. Et tout est dans le flou le plus total ».

Le militant de Force Ouvrière développe sur le sujet : « Des filières vont être supprimées donc, logiquement, des postes d’enseignants vont sauter. Et étant donné qu’il y aura plus de stages en entreprises et moins de temps passé en classe, les profs vont devoir des heures à l’Éducation nationale. C’est le statut tout entier des professeurs de lycées professionnels qui est remis en cause avec cette réforme ! »

Le corps enseignant devant le bâtiment de l'Inspection académique de la Haute-Loire.
Le corps enseignant devant le bâtiment de l'Inspection académique de la Haute-Loire. Photo par Nicolas Defay

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3 commentaires

mar 12/12/2023 - 20:12

Macron et le lycée pro 1) Les parents des élèves de lycées pro sont essentiellement des ouvriers et employés, les CSP moins comme on dit. 2) Pour amadouer les parents et fournir des jeunes motivés aux entreprises, on rémunère les stages avec de l'argent public. Quelques sous pour les pauvres.3) La refonte de la carte de formation selon le bon vouloir du patronat vis à enchainer des jeunes à un territoire et fournir un main d'oeuvre abondante et bon marché.4) On réduit fortement les heures d'enseignement car ça ne sert à rien la culture générale et les entreprises peuvent tout apprendre aux jeunes,y compris le droit du travail et l'économie. Rassurons-nous, les gosses de bonne famille auront toujours toute liberté pour faire les bonnes études et diriger les pauvres...

mar 12/12/2023 - 19:50

C'est horrible !! L'école va devoir préparer nos jeunes au monde du travail. Ce serait tellement mieux pour tous (enseignants et parents) si on les préparait à la paresse et à l'assistanat. SARCASME

mar 12/12/2023 - 17:26

EST il anormal que les entreprises fassent état de leurs besoins sur le terrain ? est il anormal que les enseignants aient des actions en entreprises au plus près du terrain cela suppose certaines remises en question ? qui embauche ? a quoi sert de préparer a des diplomes obsolètes qui feront des chomeurs diplomés reconnus par l'Education nationale. Enfin cette dernière assure des contrôles en apprentissage dans les CFA çà fonctionne alors ou est le problème ? Les LP sont ils à même de compenser les manques dus au sytème scolaire en peu d'années la culture du diplôme ce mal bien français