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Maison d'arrêt du Puy (1/2): Travailler pour subsister
Réformer le travail en milieu carcéral. C'est ce qu'a souhaité le garde des sceaux Eric Dupond-Moretti. Depuis le 1er janvier, 2023, le contrat d'emploi pénitentiaire est entré en vigueur. Reportage à la Maison d'arrêt du Puy.
Depuis le 1er janvier 2023, le contrat d'emploi pénitentiaire est entré en vigueur. Selon le ministère de la justice, ce document garantit notamment un minimum de rémunération, un emploi de temps stable et précise également une durée de travail hebdomadaire. L'objectif de cette réforme vise également à ouvrir de nouveaux droits sociaux pour les détenus travailleurs afin de faciliter leur réinsertion en ouvrant des droits à la retraite ou au chômage à l'issue de leur détention, des droits à la formation ou encore une couverture des risques professionnels. " Cela vient de se mettre en place il est encore trop tôt pour avoir un vrai avis sur la question. Le processus se développe par étapes", précise le chef d'établissement.
9 détenus employés pour des missions de service général
Selon le site du gouvernement, depuis le 1er mai 2022, une personne détenue qui souhaite travailler doit demander à être classée au travail par l'administration pénitentiaire. Celle-ci peut être recrutée par le service général de la prison ou par une entreprise extérieure. Le recrutement doit se faire via un contrat d'emploi pénitentiaire qui garantit les droits du détenu travailleur concernant la rémunération, les conditions de travail, le licenciement et la protection sociale.
Alors que certains suivent des formations pour apprendre la cuisine ou les métiers du bâtiment à la maison d'arrêt du Puy, d'autres travaillent."Avant la réforme du travail pénitentiaire, ils pouvaient d'ores et déjà travailler, on signait ce qu'on appelait un engagement de travail. Chaque détenu possède un compte nominatif géré par l'administration de l'établissement. Il peut l'utiliser pour envoyer de l'argent à sa famille, acheter des produits sur place ou même pour certains parfois payer leurs amendes", explique Cyril Mathieu, chef de l'établissement.
A la Maison d'arrêt du Puy, 9 détenus sont embauchés pour des missions de service général. Entretien des locaux, gestion de la buanderie, sortir les déchets... les détenus effectuent en fait des tâches du quotidien. Tout comme pour l'accès aux formations, les hommes sont choisis selon différents critères. " Il y a là aussi une commission disciplinaire unique en fonction des demandes. Forcément on tient compte du comportement du détenu mais aussi de sa catégorie pénale. On privilégie une personne sans ressources. On souhaite lutter contre la pauvreté", décrit Frédéric Rouvet, chef de détention. Ici, aucune entreprise ne propose d'emploi. " Nous n'avons pas de locaux adaptés dans l'établissement", précise le chef d'établissement.
" ça me change les idées"
Derrière les grilles de l'établissement, un jeune trentenaire rentré en juillet 2022 à la Maison d'arrêt du Puy tient un balai entre les mains. Ce jour là, il nettoie le rez-de-chaussée. Il a signé son contrat de travail pénitentiaire en octobre 2022, quatre mois après son arrivée. " J'ai fait la demande dès que je suis arrivé, je ne voulais pas rester enfermé dans ma cellule. ça me change les idées. Je me lève quand je veux et je fais mes heures au moment de la journée que je souhaite. Je nettoie les classes, la promenade", livre-t-il. Pour 2h30 de nettoyage par jour, il gagne environ 280 € par mois. "Je peux envoyer un peu d'argent à mes enfants, m'acheter du tabac aussi", poursuit ce détenu.
" on sort de la cellule et on a l'impression qu'on est plus libre", détenu travailleur
Un peu plus loin, un sexagénaire, arrivé en novembre 2022 à la Maison d'arrêt du Puy porte des sacs poubelles. Il doit les emmener à l'extérieur de l'enceinte de l'établissement. Seuls, certains détenus ont ce droit. "Je m'occupe des corvées extérieures depuis 3 jours. Je sors les poubelles, je les rentre. Je distribue les produits alimentaires commandés par les détenus", explique cet ancien serveur dans la restauration. Rentré depuis trois mois au sein de la maison d'arrêt, il a immédiatement demandé à travailler. " On sort de la cellule et on a l'impression qu'on est plus libre. On ne pense pas trop à la raison pour laquelle on est là. Je perçois un petit salaire et puis surtout ça m'occupe", confie-t-il. Ce sexagénaire avait tout d'abord postulé à la formation de CAP Cuisine mais elle était malheureusement complète lorsqu'il est arrivé. " En fait, je voulais surtout me changer les idées" conclut-il avec le sourire.
Nouveau contrat de travail, nouveaux logiciels, un casse tête pour les surveillants
Depuis le 1er février 2023 et suite à l'entrée en vigueur de la réforme du travail en milieu carcéral, de nouveaux logiciels de gestion de paie et des contrats ont été mis en place au sein des établissements pénitentiaires. Un changement que n'apprécie pas vraiment cette surveillante de la Maison d'arrêt du Puy. " C'est une véritable catastrophe. D'un seul logiciel, on passe à 3", se désole-t-elle. Désormais, cette quadragénaire se voit affecter de nouvelles missions qui s'ajoutent à celles qu'elle effectue déjà. " Je m'occupais déjà des fiches de paie mais là ça devient complexe. Ces logiciels engagent beaucoup de notre responsabilité. Je ne suis pas directrice des ressources humaines. Je suis la seule de l'établissement a avoir reçu une formation pour l'utilisation de ces logiciels", déplore-t-elle. Cette surveillante assure qu'elle abandonnera le poste si cela devient trop compliqué.
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