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L'accusé condamné à 25 ans de prison : une "erreur judiciaire" pour la défense
22h36, magistrats et jurés font leur retour en salle d'audience après cinq heures de délibération. À la majorité, Saber S. a été reconnu coupable du meurtre de Mahieddine Zaz, dont le corps a été retrouvé carbonisé, sur la banquette arrière d'une voiture en flammes, le 20 septembre 2011 sur la commune de Saint-Victor-Malescours (Haute-Loire). L'accusé a été condamné à 25 ans de réclusion criminelle et cinq ans de privation des droits civiques, civils et de famille. Sa condamnation est assortie d'une peine de sûreté de 15 ans.
"C'est le crime d'un lâche"
Pour la famille et les proches de la victime, c'est la délivrance. Ce verdict, ils l'attendent depuis trois ans. Tout au long de cette semaine de procès, les deux sœurs et et la mère de Mahieddine Zaz ont assisté aux débats dans le plus grand silence. Pendant cinq jours, elles n'ont laissé échapper que quelques sanglots, quand cela devenait vraiment trop dur. « J'essaie d'imaginer les dernières images qu'a pu voir Mahieddine Zaz avant d'être massacré. Un mur, une porte, un pare-brise », soupire Me Philippe Scrève, avocat des parties civiles. « C'est le crime d'un lâche. » L'avocat lyonnais s'adresse aux jurés : « La preuve, c'est la raison, c'est la conjonction des éléments dirigés contre l'accusé. Vous avez une telle conjonction d'éléments que le doute n'est pas permis, que le doute n'existe pas. Vous ne prenez pas le risque de commettre cette erreur judiciaire. »
Les parties civiles en sont convaincues et ont réussi à convaincre : Saber S. est un meurtrier. « Tout ce que je vous dis pour l'incriminer est confirmé », insiste Me Jean-François Canis, second avocat de la famille Zaz. « Tout ce que [Saber S.] utilise pour se défendre a été démenti. Mais cet homme a un bagou extraordinaire, je pense qu'il est très fort au poker. Si vous jouez contre lui, vous n'avez aucune chance. »
Un téléphone retrouvé dans sa cellule, ce vendredi matin
Un joueur, manipulateur. C'est le portrait qu'a été tiré de l'accusé tout au long de cette semaine de procès d'assises par le conseil des parties civiles. Un portrait que le principal intéressé a contribué à construire, malgré lui. L'homme, condamné à huit ans de réclusion criminelle en 2002 par la cour d'assises des mineurs de la Loire pour des faits de viol en réunion, est un habitué de la case prison. Derrière les barreaux, il n'a jamais réussi à se conformer aux règles imposées par le système carcéral. Saber S., à de multiples reprises, a été surpris avec des téléphones, des clefs USB ou des stupéfiants dissimulés dans ses affaires.
Ce vendredi 21 novembre, le matin même du verdict, un portable a été encore une fois retrouvé dans l'une de ses chaussettes, dans sa cellule de la maison d'arrêt du Puy. Il explique l'avoir utilisé tous les jours de la semaine pour prendre des nouvelles de ses amis, de sa femme et de son fils malade. Problème : sa conjointe est témoin dans l'affaire qui l'amène à comparaître au tribunal. Il n'est pas autorisé à communiquer avec elle. Pour les avocats de la famille Zaz, c'est la cerise sur la gâteau.
"Si ce n'est pas lui, qui est-ce ?"
La touche finale d'un tableau qu'ils ont peint ensemble ce vendredi matin. « Il y a un mobile qui a poussé Saber S. à tuer Zaz, c'est le seul à en avoir un. Les gendarmes n'en ont pas trouvé d'autre », insiste Me Canis. L'avocat clermontois évoque les 80 000 euros que l'accusé devait à Mahieddine Zaz. « On a cinq témoignages concordants, tous différents, qui évoquent une dette, un conflit entre les deux hommes. » De son côté, Me Scrève s'est efforcé de reprendre avec minutie la chronologie des événements, retracée grâce à l'usage des téléphones portables des différents acteurs de cette sanglante soirée. D'une algarade entre « Didine » et l'accusé devant un cinéma stéphanois aux frénétiques appels de Saber S. à ses « complices présumés », pour l'assister et pour l'aider dans la construction d'un alibi – un poker improvisé postérieur à l'heure du décès –, tout l'accable.
« Si ce n'est pas lui, qui est-ce ? La thèse du mystérieux bourreau, parachuté, qui aurait intercepté Mahieddine à la sortie du cinéma ? » Aucun des témoignages ne mentionne un différend entre la victime et quelqu'un d'autre que son meurtrier présumé. ? « On est en pleine fantaisie, on est en plein délire ! Il tente de vous manipuler comme il manipule tout le monde, comme il a manipulé les témoins ! Ce n'est plus un faisceau d'indices, c'est une convergence. C'est une certitude. »
"Moi, la certitude, je ne l'ai pas"
Une certitude qui, en toute logique, n'est pas partagée par la défense, représentée ce vendredi par Me David Metaxas et Me Mehdi Mahnane. « Mes confrères vous ont présenté un homme qui est un accusé. Un homme qui, moralement, ne vaut pas grand chose parce qu'il a déjà été condamné pour des faits abjects. Mais à l'heure où je prends la parole, cet homme n'est rien d'autre qu'un accusé devant une cour d'assises. Un accusé qui bénéficie encore de la présomption d'innocence. Un accusé qui nie les faits pour lesquels il est jugé », rappelle Me David Metaxas.
« Qui a donné volontairement la mort ? J'ai la certitude que vous ne le savez pas. Je sais pertinemment que vous ne le savez pas. » Dans une plaidoirie intense, le magistrat déblatère : « Dans le camp de l'accusation, j'ai entendu deux ou trois versions possibles. On a du mal à s'accorder sur une version. Moi, la certitude, je ne l'ai pas. Saber S. n'est pas jugé pour avoir appelé des copains pour tuer quelqu'un. Il n'est pas non-plus jugé pour complicité. Il est jugé pour avoir volontairement donné la mort. » Pour conclure, Me Metaxas rappelle aux jurés la réponse apportée par l'Officier de police judiciaire (OPJ), en charge de l'enquête, à la question qu'il lui avait posée : « Qui a égorgé Mahieddine Zaz ? » - « Je ne sais pas », lui avait-il répondu.
Évoquant le bénéfice du doute, il demande la relaxe. Il ne sera pas suivi, au contraire : le président est allé au-delà du réquisitoire de l'avocat général (20 ans de réclusion criminelle avec une peine de sûreté de 14 ans) en prononçant cette peine de 25 ans d'emprisonnement. « Une erreur judiciaire » pour David Metaxas qui a d'ores et déjà annoncé qu'il ferait appel de cette décision dès lundi :
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De leurs côtés, Me Canis et Me Scrève embrassent la décision prise par la cour d'assises de Haute-Loire :
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A.L.
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