« J’ai dit aux copains de vite m'amener aux urgences. J’avais trop mal »

Par Nicolas Defay , Mise à jour le 22/03/2023 à 06:00

Zoomdici a rencontré Nicolas Coffy qui est revenu sur cette soirée du 31 juillet 2022 où quelques secondes ont suffi pour changer sa vie à tout jamais.
 

31 juillet 2022. Les vacances estivales. Des températures brûlantes. Les boites de nuits assiégées. Nicolas Coffy, jeune agriculteur de 20 ans, installé à Polignac fait la fête chez une amie à Marnhac, la dizaine de filles et de garçons décide de poursuivre la soirée dans une discothèque sur les hauteurs du Puy-en-Velay. « Tout se passait bien, décrit Nicolas Coffy. Nous étions là, comme tous les autres jeunes, à passer un chouette moment. C’était une soirée normale dans une boite de nuit normale ».

Et puis à 4h30, ils décident de quitter les lieux. « Nous voulions prendre quelque chose à manger avant au snack installé à côté, continue Nicolas Coffy. Ils servent de la nourriture du genre fastfood. Sur le bar, il y avait un flacon de gel hydroalcoolique. Un collègue et moi, nous nous amusions avec et c’est vrai que nous l’avons fait tomber plusieurs fois par terre. Nous étions dans un état d'ébriété comme beaucoup de jeunes qui sortent de boite. La somme de tout ça a logiquement agacé la serveuse du snack. »

« Il m’a gazé avec du gel de poivre à quelques centimètres du visage »

S’il reconnaît l’énervement que cette attitude ait pu générer, jamais il n’aurait pensé à une réponse « aussi disproportionnée », selon ses termes. « Le videur est arrivé et a commencé à nous réprimander mais sans insulte ni geste violent. Et sans comprendre pourquoi, il a empoigné mon t-shirt au niveau de la poitrine. Quand j’ai voulu le repousser, il m’a gazé avec du gel de poivre à quelques centimètres du visage ».

La douleur est immense d’après Nicolas Coffy « J’ai ressenti un gros choc et une intense chaleur sur tout le corps et dans ma tête. J’ai cru que ma tête explosait ! »

« Elle avait peur qu’une bagarre générale éclate »

Sur place, ses amis tentent comme ils peuvent de le rassurer. « Ils ont voulu appeler les pompiers mais dans la précipitation personne ne l’a fait, livre Nicolas Coffy. La personne qui nous ramenait chez elle avait peur qu’une bagarre générale éclate en attendant. C’était un peu la panique. Elle nous a tous mis dans sa voiture et est partie aussitôt. » Il continue : « Une fois là-bas,  j’ai dit aux copains de vite m'amener aux urgences. J’avais trop mal ».

Le choc dû au gel de poivre a, selon les médecins, desserti les nerfs de l'œil droit.
Le choc dû au gel de poivre a, selon les médecins, desserti les nerfs de l'œil droit.

« Les analyses ont révélé que mon œil droit avait été crevé »

Au vue de l’état de santé de Nicolas Coffy, les médecins prévoient alors une intervention chirurgicale d'urgence le soir-même. Ses yeux sont si enflés que l’un des cocards se fend sous la pression. « Les analyses ont révélé que mon œil droit avait été crevé par le gel de poivre. Après l’opération, je suis resté aveugle des deux yeux pendant trois jours. Et des douleurs persistantes six jours durant ».

« Je ne vois plus de lumière. Je ne vois même plus le soleil »

Suite à l’opération, les médecins sont dans l’incapacité de faire des analyses plus poussées à cause de la trop grosse quantité de sang en fond d’œil. « Après 5 ou 6 semaines, ils ont enfin pu inspecter correctement, explique le jeune homme. Le bilan démontre que j’avais subi une rétrocession de la rétine de l’œil droit. Le choc avait rétracté les plis de la rétine tous en un seul point. Les conséquences sont l’obstruction totale de ma vue. » Actuellement Nicolas Coffy a perdu l'usage d’un œil. « Je ne vois plus de lumière. Je ne vois même plus le soleil ».

« Il m’avait pourtant arraché une partie de moi-même ce jour du 31 juillet 2022 »

À la question de savoir comment il vit maintenant ce drame huit mois après, Nicolas Coffy partage : « Physiquement, je m’adapte. C’est dur, surtout pour conduire des engins agricoles où il faut être parfois très précis. J'ai beaucoup perdu sur ce plan là ».

Quant à ses ressentis psychologiques, sa mâchoire semble hacher les mots. « C’est de la colère que j’éprouve profondément. Du dégoût. J’étais un habitué de cette boite de nuit et je connaissais le videur depuis un moment. On y était souvent. J’ai fait tomber du gel hydroalcoolique et j’ai perdu un œil ! Je vais devoir supporter ça toute ma vie, à chaque seconde, à chaque fois que je croiserai mon regard dans le miroir ».

Il termine ainsi : « J’ai aperçu le videur lors de la dernière audition au tribunal judiciaire du Puy. Je pensais qu’il serait venu me présenter ses excuses. Au moins ça. Mais rien. Il m’avait pourtant arraché une partie de moi-même ce jour du 31 juillet 2022 ».

Nicolas espère qu'une greffe de rétine sera un jour possible pour retrouver la vue.​

Quelques minutes après avoir été gazé, Nicolas Coffy en proie à des douleurs insoutenables
Quelques minutes après avoir été gazé, Nicolas Coffy en proie à des douleurs insoutenables Photo par DR

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