Esclavage : une leçon d'histoire un peu spéciale

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:34

Une période sombre dans l'histoire des nations. En 1848, la France abolissait enfin et définitivement l'esclavage. Ce lundi 11 mai 2015, une centaine de collégiens de Haute-Loire ont assisté à la cérémonie commémorative en préfecture. Un événement qui n'a pas forcément lieu tous les ans, comme le regrette le préfet, Denis Labbé, très sensible à la question de l'esclavage puisqu'il a été en poste plusieurs années dans les territoires d'Outre-mer (Guadeloupe, Guyane, La Réunion).
Une poignée de jeunes ont lu des textes*, comme Louis, Lucas, Manon et Jules, des collèges Saint-Joseph, Saint-Régis et Jules Vallès du Puy-en-Velay. Ils sont choqués par le sort réservé aux esclaves.

Entre deux textes lus par les élèves, le préfet a fourni des petites « explications de textes » aux jeunes rassemblés en demi cercle sur les parquets grinçants de la préfecture. Dans un langage accessible et simple, il a insisté sur la « tache que représente l'esclavage sur le drapeau de nombreuses nations, dont la nôtre ». Car si l'esclavage institutionnalisé remonte à l'Antiquité, il a perduré jusqu'au XIXème siècle. « Ce n'est pas si lointain, a fait remarquer le préfet, seulement six ou sept générations. » D'autant que le siècle des Lumières était passé par là. Mais même Voltaire investissait dans la traite. Or, la France a aboli l'esclavage en 1848, soit 15 ans après l'Angleterre. Mais avant les Etats-Unis (1865), le Brésil (1888) ou Cuba (1898).
Pourtant, la première abolition française de l'esclavage date de 1794. Mais, les dirigeants successifs l'ont rétabli (Louis XIII, Napoléon Ier). C'est finalement à Victor Schœlcher, fabriquant de porcelaine horrifié de ce qu'il avait vu en voyage commercial aux Antilles, que l'on devra en grande partie l'abolition définitive de 1848.

Pas qu'une question de couleur
Soulignant la complexité de la question, Denis Labbé s'est aussi employé à dissocier, dans la psyché populaire, l'association entre « esclave » et « peau noire ». Pour cela, il a pris pour exemple le mot « slave », qui vient du mot esclave car, à l'Antiquité, l'empire romain utilisait les pays d'Europe de l'Est comme un réservoir d'esclaves. « Aujourd'hui, tout le monde doit avoir très lointainement un ancêtre esclave », ajoute le préfet. Et de rappeler que certains métis possédaient des plantations et des esclaves à Saint-Domingue notamment (aujourd'hui Haïti).

18 millions d'Africains déportés
Ce qui n'enlève en rien l'horreur de la traite des Noirs. Ainsi, on estime que 18 millions d'Africains ont été déportés dans le commerce triangulaire. Et la France y a largement participé, depuis les ports de Bordeaux, Nantes, La Rochelle, Saint-Malo et Le Havre. Mais là encore, Denis Labbé rappelle la complexité du sujet : « les rois africains vendaient leurs esclaves, puis ils ont fait guerre pour vendre leurs prisonniers, puis ils ont vendu leurs propres sujets ».

Trafic des migrants
Enfin dans son discours, le préfet a fait un parallèle, comme François Hollande, entre l'esclavage et le trafic de migrants aux frontières de l'Europe. Depuis le début de l'année, plus de 34 000 clandestins ont débarqué en Italie et 1 770 ont péri en mer méditerranée, selon l'Organisation internationale des migrations.

Annabel Walker

  • Les textes lus par les élèves*

I have a dream de Martin Luther King
Peau Noire, Masques Blancs de Frantz Fanon
Extrait de voyage à l'île de France (aujourd'hui île de la Réunion) par Jacques-Henri Bernardin de Saint Pierre
Extrait du décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848.
Auxquels on peut rajouter cette recommandation « que tout le monde devrait lire » selon le préfet, La Case de l'oncle Tom d'Harriet Beecher Stowe.

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