Demain, plus un médecin, plus un pharmacien, plus un labo à la ronde ?

, Mise à jour le 26/11/2020 à 19:24

Vous avez sûrement vu les draps pendus sur les devantures des laboratoires d'analyses médicales du Puy depuis ce mardi. Les biologistes ont défilé dans les rues du Puy ce mardi, aux côtés des pharmaciens qui avaient baissé le rideau pour l'occasion, protestant contre la déréglementation de leurs professions. Alain Gravier est pharmacien biologiste, directeur d'Altilabo, laboratoire multi-site qui gère quatre laboratoires sur le département au Puy-en-Velay, Brives-Charensac et Monistrol-sur-Loire. Pour lui, on s'oriente vers une financiarisation de la biologie de proximité. Ecouter.

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Aux côtés des pharmaciens et des biologistes, les médecins généralistes - qui ne sont pas concernés par la déréglementation - tiraient, eux, la sonnette d'alarme quant à l'avenir des soins de proximité, faute de moyens et de coordination institutionnelle. Ecoutez Roland Rabeyrin, le président de du syndicat de médecins majoritaire en Haute-Loire, MG43.

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Voici le communiqué de MG43 :

"Pour les généralistes le 30 septembre 2014 est un point de départ : celui d’un mouvement contestataire et revendicatif qui va prendre de l’ampleur dans les semaines et mois à venir.
Pourquoi ?
Parce que le virage ambulatoire de la politique de santé nationale annoncé par Marisol Touraine, mais aussi par le premier ministre, va une fois de plus accoucher d’une souris, et parce que l’effet délétère de certaines mesures va encore aggraver les conditions d’exercice des généralistes.
Parce que la politique de harcèlement des caisses de sécurité sociale vis-à-vis des généralistes et presque exclusivement vis-à-vis d’eux devient insupportable.

Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui pour une conférence de presse commune nos confrères biologistes et les pharmaciens qui sont deux de nos partenaires importants dans notre exercice quotidien. Si nos problématiques professionnelles sont différentes, et chacun d’entre nous s’en expliquera, le point de convergence qui nous réunit est celui de la sauvegarde des soins de proximité. Nos trois professions doivent faire face à des projets de loi qui hypothèquent clairement lors avenir, et qui organisent la marchandisation du secteur de la santé. Il n’y a aucune cohérence dans tout cela et nous ne comprenons pas. Si ce gouvernement ne revient pas sur ses intentions, ce sont encore les zones rurales qui vont le plus en souffrir avec la disparition programmée de tout un pan des soins de proximité.
Pour en revenir à la situation des généralistes, nous sommes de plus en plus excédés par la politique brouillon de ce gouvernement:
Parce ce qu’on nous trompe : on nous annonce le grand virage ambulatoire de l’organisation des soins, une organisation territoriale centrée autour du médecin traitant, la mise en place d’une vraie politique de médecine préventive… 
Dans les faits nous sommes en droit de nous demander si le gouvernement ne commence pas d’organiser ‘l’après médecine générale », en redistribuant des champs entiers de notre exercice quotidien vers d’autres professionnels : la vaccination par exemple serait réorientée vers les sages-femmes, les infirmières, les pharmaciens. Mais qui devra assumer la responsabilité du suivi vaccinal des patients ?
La conception de ce gouvernement de l’organisation territoriale des soins de proximité, c’est la mise place d’une administration des soins ambulatoires !  Nous n’en voulons pas ! Ce que nous demandons  c’est que des moyens financiers nous soient alloués pour mettre en place « l’Organisation » que nous aurons nous même défini avec nos partenaires au plus près des réalités de notre exercice quotidien. Nous acceptons bien sur l’idée d’une contractualisation avec nos tutelles, mais les masses financières qui seraient mobilisées pour la mise en place d’une nouvelle administration doivent être réorientées vers les acteurs du champ ambulatoire qui s’investissent.
Parce qu’on nous ment : il n’y aurait pas de marge financière pour investir sur le secteur ambulatoire.
La vérité c’est qu’à dépenses constantes on peut dépenser de façon bien plus pertinente. Il y a des gisements d’économies à réaliser :
en réformant l’organisation des soins et en supprimant les redondances : des missions claires pour chacun des effecteurs
en mettant un terme au projet SOPHIA de la CNAM qui est un gouffre financier pour un gain en termes de santé publique minime
en réformant la politique du médicament : les mêmes médicaments et parmi les plus prescrits, fabriqués par les mêmes laboratoires sont vendus jusqu’à dix fois moins cher chez certains de nos voisins européens (Exemple des Statines), les situations de monopole de certains laboratoires par rapport à des autorisations de mise sur le marché de produit onéreux font perdre des sommes colossales à l’assurance maladie ( Affaire Lucenthis et Avastin).

Parce que les caisses de sécurité sociale sont de plus en plus intrusives dans notre exercice quotidien :
Conditions de prescription de plus en plus complexes d’une panoplie de plus en plus large de médicaments, (la dernière trouvaille est la mise en place d’un automate sur les téléservices de la CNAM que les médecins devront aller renseigner, et c’est cet automate qui décidera in fine si certains médicaments sont pris en charge ou non par l’assurance maladie pour un patient donné !) . C’est en fait une véritable atteinte à la liberté de prescription des médecins qui est en train de se construire, et qui tôt ou tard aura des conséquences fâcheuses pour les patients.
Contrôles de plus en plus fréquents sur nos prescriptions d’arrêt de travail, de médicaments en fonction des AMM officielles mais souvent même pas actualisées avec les données de la science ou de l’expérience des professionnels. S’il est normal d’effectuer des contrôles, la méthode employée est insupportable, car s’appuyant sur le simple repérage de particularités statistiques de l’activité d’un médecin par rapport à ses proches confrères, le tout pouvant conduire à des pénalités financières.
De plus les généralistes sont la cible quasi exclusive de ces contrôles !

Les généralistes ne sont pas opposés au principe de réformes, au contraire, ils réclament de vraies réformes de fond depuis longtemps. Mais ils n’accepteront pas que les soins de proximité soient bradés et sacrifiés. Le ras le bol est manifeste dans la profession et la mobilisation va se poursuivre dans les semaines à venir."

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