Effectifs complets au tribunal du Puy : "un bonheur de courte durée"

mer 06/02/2019 - 17:43 , Mise à jour le 27/11/2020 à 08:55

C'est bien l'une des premières fois que la traditionnelle audience de rentrée du tribunal de grande instance du Puy-en-Velay se faisait avec des effectifs complets, "et on s'en félicite sincèrement", appuie la Présidente Véronique Cadoret.

Effectifs complets : "un bonheur de courte durée"
Il faut dire que ces dernières années, on a compté jusqu'à quatre magistrats manquants. Alors même si "ce bonheur devrait être de courte durée" analyse avec lucidité la Présidente du Tribunal, compte tenu notamment du manque d'attractivité de la juridiction, "il faut en profiter et toujours s'assurer de rendre une justice digne".
Un nouveau juge a en effet été officiellement installé au cours de l'audience de rentrée ce lundi 4 février 2019 (il occupe en réalité ces fonctions depuis l'automne dernier): Nizar Samlal, père de famille de 39 ans, est originaire du Jura. Il récupère un poste qui était vacant depuis septembre 2016 et il s'agit de son premier poste dans la magistrature. Avant, il était inspecteur du travail. 

"Ça dénote à tout le moins une absence de responsabilité morale"
Le climat social de ces derniers mois a teinté de jaune le discours de rentrée des magistrats. Pour la Présidente, "ça nous rappelle ô combien la paix sociale est fragile", alors que le Procureur de la République Nicolas Rigot-Muller a tenu à rendre hommage aux forces de sécurité pour les événements qjui ont émaillé la Préfecture du Puy le 1er décembre (200 agents publics ont d'ailleurs été récompensés par le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l’Intérieur Laurent Nunez ce mardi).
"Les faits sont encore plus indéfendables", a-t-il déclaré, "lorsqu'une trentaine de personnels se trouvent à l'intérieur et que l'on empêche les secours d'intervenir". Si la Loi ne prévoit pas de "réprimer la complicité par passivité coupable", le Procureur de la République du Puy souligne : "ça dénote à tout le moins une absence de responsabilité morale".

----L'inexorable augmentation des comparutions immédiates (CI)
Selon le Procureur, les CI sont "la réponse la plus adaptée aux faits les plus graves". Pour bon nombre d'avocats, il s'agit au contraire d'une "procédure de justice expéditive" (statistiquement, elle aboutit à un plus grand nombre d'emprisonnements que les autres procédures correctionnelles). Au Puy, le nombre de CI a presque doublé en deux ans : de 36 procédures en 2016, on est passé à 63 en 2018.-----Des interpellations, des incarcérations mais des débats dans le respect et la sérénité
Toujours dans ce registre, l'institution judiciaire peut se féliciter qu'il n'y ait eu aucun appel sur les décisions rendues, alors qu'on relève quand même 27 suites judiciaires suite à la quarantaine d'interpellations, dont sept en comparution immédiate (CI) et quatre en comparution sur reconnaissance de culpabilité défèrement (le plaider coupable). On note notamment l'incarcération de deux hommes le 14 janvier dernier.
Nicolas Rigot-Muller tient à préciser que les débats se sont à chaque fois tenues dans le respect et la sérénité, malgré la présence de comité de soutiens. Enfin, il souligne qu'il n'y a "pas eu d'interpellations préventives, pas de défèrement comme réponse systématique et pas de poursuite au bénéfice du doute".

La Haute-Loire, toujours un sanctuaire de sécurité
Le terme peut paraître excessif mais force est de constater que le département demeure l'un des mieux classés en la matière : il se situe au 92ème rang (sur 96) des départements les plus tranquilles pour les atteintes aux personnes, alors qu'il était au 90ème rang l'an dernier. en revanche, pour les atteintes aux biens, la Haute-Loire passe du 92ème au 89ème rang. "Quand on se regarde on se désole, quand on se compare, on se console" a subtilement glissé le Procureur.
Tout comme la différence entre la température effective et la température ressentie, il y a parfois un important delta entre le sentiment d'insécurité et la réalité. Il paraît bon de rappeler que la Haute-Loire est privilégiée dans ce domaine.

----Trois femmes tombées sous les coups de leurs conjoints ou ex-conjoints
On estime qu'en France, les violences conjugales conduisent au décès d'une femme tous les trois jours. En Haute-Loire, trois faits sont à déplorer en 2018.

-----29 morts sur les routes : des contrôles renforcées à craindre, avec possibilité de perquisition
Autre thème abordée à l'occasion de cette audience de rentrée solennelle : la délinquance routière et "les 29 morts sur les routes (ndlr : soit une personne tuée tous les 12 jours) n'incitent pas à la clémence ou à l'angélisme", a mis en garde Nicolas Rigot-Muller tout en tempérant : "tous les accidents mortels sont différents, des procédures ont même été classées sans suite, en l'absence de faute du conducteur". 
Le Procureur a également mis l'accent sur la question des stupéfiants et suggère que lorsque des contrôles sont autorisés par le Parquet sur un créneau pour déterminer la consommation d'alcool ou de stupéfiants, les forces de sécurité doivent apprécier "si une perquisition du domicile ne serait pas opportune".

Encore des travaux
Enfin, pour terminer sur un note plus légère, notons que des travaux vont débuter au mois de juin (après une première vague initiée en 2012 et la réfection du box des accusés en 2013) au tribunal, "ce qui explique que vous ayez une dernière fois à souffrir de la qualité médiocre de l'acoustique et du style désuet des moquettes murales", a ironisé Nicolas Rigot-Muller. Les travaux (salles d'audience, élargissement du box des accusés, salle du Breuil, bibliothèque, salle des délibérés) devraient s'achever dans un an environ.

Maxime Pitavy

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