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Des vœux de résilience par la Confédération paysanne de Haute-Loire

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 18/10/2021 à 00:00

David Chamard, porte parole départemental de la Confédération Paysanne, tient à rassurer les paysannes et paysans du département. « Nous pouvons reprendre en main nos outils de production mais nous ne devons jamais céder à la fatalité », partage-t-il.

Aux côtés de deux autres producteurs de la Haute-Loire, David Chamard porte la voix de la Confédération paysanne concernant la situation du monde agricole et de leurs acteurs. Malgré un constat sombre du secteur, il encourage néanmoins à ne pas lâcher prise et partage les solutions qui, selon lui, permettraient aux différentes filières de sortir la tête de l’eau. « Cette année 2020 a été très compliquée avec la crise sanitaire sans précédent qu’on vient de passer et qu’on subit encore, lance-t-il. Mais nous voulons sincèrement apporter des vœux de résilience et d’espoir pour l’ensemble des producteurs agricoles du département ».

« Il faut modifier profondément la politique publique »

« On insiste pour confier ces vœux car, trop souvent, le monde agricole apparaît être la dernière roue du carrosse, partage David Chamard. On nous dit qu’il faut faire avec les marchés. On nous dit que nous ne pouvons pas avoir de marge de manœuvre en termes de rémunération. On nous dit qu’il faut produire et produire encore pour nous en sortir en dépit de prix de vente moins élevés que nos coûts de production ».
Il appuie : « Il n’y a pas de fatalité ! Un modèle unique n’est pas indestructible et on peut avoir des prix par filière rémunérateurs. Pour cela, il faut modifier profondément la politique publique. ».

Surproduction et prix de vente en berne

David Chamard livre quelques éléments d’informations pour expliquer la saignée dont le monde agricole et l’ensemble de ses spécialités souffrent. « En Haute-Loire, pour trois départs, il y a une seule installation, déplore-t-il. Souvent, on entend beaucoup parler dans les médias de ce nouvel arrivant mais rarement de ce ceux qui partent. Pourtant, c’est une des sombres réalités du secteur. La population agricole se tarit lentement. »

David Chamard continue : « On va constamment sur un système de surproduction avec des filières saturées comme celles de la production de bovins ou d’ovins. Les prix de vente continent de baisser. Et les principaux gagnants ? Ce sont les industriels. Les marges de produits sont récupérées par les grands distributeurs et les transformateurs ».

JP Portal, A Gomez et D Chamard Photo par Nicolas Defay

50 % de rémunération par les aides de l’Etat

Adria Gomez, jeune producteur (26 ans) d’ovins, illustre ce fossé entre le prix de vente final et le coût de production. « La rémunération qui m’est proposée pour mes agneaux est de 6,5€ par kg. Or, cette production me coûte 10€ par kg. Sans les aides publiques, il est impossible pour mes consœurs, confrères et moi de vivre de notre travail. » Il indique un ratio étonnant : « La moitié de ma rémunération est issue des subventions de l’État. Mais nous ne demandons pourtant pas ça ! Nous demandons la possibilité de vivre uniquement de notre travail ! »

« La marge se fait au profit des trusts de la grande distribution »

À côté de lui, Jean-Paul Portal, producteur de vaches allaitantes à Saint-Jean de Nay, complète ses propos : « Cela fait une trentaine d’années que les prix agricoles stagnent, voire baissent alors que les consommateurs paient toujours plus cher. La marge se fait au profit des trusts de la grande distribution où ils fixent eux-mêmes les prix de vente des produits agricoles. La concurrence ne peut plus se faire car tout est régi par eux ». Il pose alors la question : « Qui paie l’addition au final ? C’est le producteur agricole. Et concernant le gaspillage alimentaire, c’est la même chose. Quand ça part à la poubelle, c’est de la marchandise qui ne nous est pas payée ».

Quelques chiffres

  • Prix de vente du lait 350€ pour 1 000 litres. Coût de production en zone montagne 490€
  • Prix de vente de la viande d’ovin, 6,5€/kg. Coût de production 10€/kg
  • La rémunération pour 1/3 des producteurs est de moins de 350€/mois
  • Un paysan se suicide tous les deux jours en France
  • Trois départs par une installation

Fixer un quota de production

Pour les solutions, David Chamard en liste plusieurs. « Il faudrait tout d’abord accompagner la mise en place d’outils de régulation afin de réduire la surproduction qui est l’une des causes des prix bas. L’idée serait de mettre en place des quotas de production comme on a connu avec le lait. Il faut que les premiers litres de lait, les premières bêtes, les premiers hectares bénéficient d’un prix rémunérateur afin d’inciter à rester sur de petites exploitations. Après, il est possible de produire plus. Mais il faut qu’il y ait déjà une rémunération suffisante à la base ».

Pour une rémunération digne

Prendre en compte le coût de production des matières premières pour que cela entre en compte pour les rémunérations des paysans est la deuxième revendication de la Confédération paysanne de Haute-Loire. « Enfin, il faut également orienter la relocalisation des productions afin de maîtriser les filières sans dépendre du bon vouloir des industriels, martèle David Charmard. Effectivement, c’est un changement de politique drastique. Mais si on veut une rémunération digne et maintenir le tissu agricole dans le département, il faut totalement repenser la politique agricole ».

Les 7 % qui partent à l’export fixent le prix des 93 % restant au pays

David Chamard termine en ces mots : « La politique néo-libérale des gouvernements successifs de droite et de gauche a œuvré pour que les producteurs produisent toujours plus afin de rendre les prix toujours plus bas. Le mondialisme, c’est une chose. Mais il est urgent de mettre à présent en place un système de calcul du prix en prenant en compte la production au niveau national et non plus au niveau mondial. Cela fera automatiquement remonter les prix de vente en France sur l’ensemble des filières. 7 % de notre production agricole en France part à l’export. Ce sont ces 7 % là qui vont fixer le prix des 93 % restants dans le pays ».