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Quatre ans de prison ferme pour l'incendiaire du Bd Saint-Louis et de Dunières

, Mise à jour le 21/10/2021 à 00:00

L’incendiaire présumé d’un immeuble du Bd Saint-Louis au Puy le 26 décembre 2020 a été jugé ce jeudi 21 janvier. Avec un lourd passif en sa défaveur, il écope de plusieurs peines.

Jean noir, pull bleu et baskets blanches. L’homme de 25 ans entre dans la salle, menottes au poing et regard sombre, pour exposer son histoire et défendre sa situation. Il est 16h15 quand commence l’audience au tribunal correctionnel du Puy-en-Velay. Il faudra près de 30 minutes pour détailler les charges qui pèsent sur le jeune homme ainsi que la dense liste des victimes concernées par les différentes affaires. Il faudra autant de temps pour décrire son passé chaotique constitué de violences intrafamiliales, de placements multiples en foyers d’accueil, d’alcool et de stupéfiants.

Loin du dossier de l’incendie ponot du 26 décembre, la première partie du procès porte sur des émissions de chèques sans provision qu’il aurait effectuées de juillet à octobre 2019 pour équiper son bar-restaurant à Roanne. « Vous avez émis 36 chèques bancaires malgré une interdiction vous notifiant votre situation, précise la présidente Anne Cécile Guignard. En dépit de cette connaissance, vous avez continué. Au total, 15 victimes ont été enregistrées ». Le prévenu se défend en affirmant qu’il n’avait jamais eu d’informations lui apprenant sa situation d’interdiction bancaire. « Ce qui est étrange, c’est que vous dites que tous ces chèques ont été émis pour équiper votre établissement et pourtant vous avez tenté d’acheter un 4X4 Mercedes de 11 500 euros avec un chèque sans provision. » L'homme précise alors : « Je pensais l’acheter pour le revendre plus cher ensuite. J’avais besoin de cash. En tous cas, je reconnais avoir fait les chèques mais pas d’avoir été conscient d’être en interdiction bancaire au moment où je faisais ces chèques ».

Les deux incendies à Dunières

Sans que personne ne s’en doute encore, la deuxième partie de l’audience s’apparentera à une véritable traversée du désert. Tout se passe à Dunières sur fond d’incendies en série au mois de septembre et octobre 2020. Le premier a lieu précisément le 30 septembre et le deuxième le 4 et 5 octobre. Détail déroutant, les deux immeubles endommagés par les flammes comportaient un appartement où logeait... le prévenu en question. Une suspicion naît alors rapidement autour du mis en cause comme étant l’incendiaire. « Est-ce que vous contestez avoir mis le feu à ces logements ? ». « Je conteste totalement !, tonne-t-il. Je ne comprends pas pourquoi j’aurais mis le feu à des logements dont j’adore les personnes et une tout particulièrement ».

« Quand il voyait les pompiers s’affairer, il souriait »

À la barre s’avance alors un monsieur aux cheveux blancs, une personne décrite quelques minutes plus tôt comme un père de substitution par le prévenu. « Il m’a dit une chose étonnante cette nuit du 4 octobre, partage-t-il. Il m’a dit que de toute façon, les assurances vont me rembourser jusqu’à 4000 euros. ». Il ajoute : « Et quand il voyait les pompiers s’affairer, il souriait ». La présidente demande : « Ça semblait lui procurer un certain plaisir, pensez-vous ? ». « Oui, certainement ! ». Les incendies à Dunières détruiront nombre d’objets en tout genre mais tueront également le chat de la petite fille que gardait le grand-père venu témoigner.

Une cigarette dans les poubelles

Enfin arrive l’affaire tant attendue de l’incendie du 26 décembre 2020 au boulevard Saint-Louis dans la cité ponote. « C’est un épisode beaucoup moins confus car il n’y a qu’un seul fait, souffle la présidente du tribunal. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’il s’est passé en cette fin d’après-midi ? » Le prévenu explique être venu voir une connaissance au quatrième étage de l’immeuble en question. « J’avais mon téléphone à l’oreille en train d’appeler mon ami pour qu’il m’ouvre et j’avais des courses dans une main et une cigarette dans l’autre. Dans le hall d’accueil, j’ai fait tomber mon téléphone. En tentant de le rattraper, j’ai fait tomber ma cigarette. Ensuite, tout est parti très vite ». « Mais elle tombe où cette cigarette ? », demande la présidente. Le mis en cause répond : « Je ne sais pas vraiment. Je sais qu’elle était encore allumée, qu’elle est tombée au niveau des poubelles mais pas où précisément ».

Des réponses ahurissantes

D’après ses dires, il y avait des matelas et des choses inflammables. « Ça a flambé tout de suite, je n’ai rien pu faire », ajoute-t-il. « Ça commence à s’enflammer et vous montez quand-même quatre étages pour aller voir votre ami ? Pourtant vous voyez bien que ça brûle ! ». Il répond : « Ça brûlait pas vraiment en fait, ça fumait simplement. Et puis, avec les incendies précédents à Dunières, j’avais peur qu’on me mette celui-ci aussi sur le dos ». Moment de silence. 
« Une fois chez votre ami, que faites-vous ? Vous le prévenez de l’incendie ? » Sa réponse provoque alors des expirations et des chuchotements exaspérés à travers la salle : « J’ouvre une bière. Je voulais avoir l’air de rien ». La réaction de la présidente fuse alors : « L’air de rien ? Vous n’avez rien dit à votre ami de ce qu’il se passait ? ». « Les alarmes se sont mises à sonner deux minutes après que je sois monté, ça ne servait à rien que je l’avertisse ! », livre-t-il.

« J’aurais dû éteindre ce début d’incendie, c’est vrai »

« Mais vous ne saviez pas qu’il y avait des alarmes. Comment auriez-vous pu avertir tout le monde dans ce cas-là ? Vous rendez-vous compte du danger que vous avez fait courir à vous-même et à tous les résidents ? ». Le prévenu explique alors : « Je suis resté calme, c’est vrai. Je voyais bien qu’il y avait de la fumée en montant les escaliers mais je ne pensais pas que l’incendie prendrait cette ampleur. Je regrette énormément d’avoir mis en danger tous ces gens. J’aurais dû éteindre ce début d’incendie, c’est vrai ».

« Et pour le 26 décembre, la cigarette tombe-t-elle vraiment par accident ? »

Il est 18h30, près de trois heures après le début de cette audience. Les questions s’enchaînent et les réponses se font de plus en plus embrouillées, confuses, hésitantes. Le ton monte du côté du tribunal et notamment de la part de la vice-procureure, Marie Moschetti. « Vous fumez une cigarette à la fenêtre de votre ami alors que vous venez de provoquer un incendie avec le même objet et vous trouvez ça normal ? » Il répond : « Je sais, ça ne semble pas logique mais j’étais stressé. La cigarette, c’est comme une drogue. »

Et c’est à ce moment là que Marie Moschetti hausse tout à coup la voix, le regard aussi dur que son assurance : « Vous êtes capable de mentir à la barre du tribunal depuis trois heures, ça serait bien que vous soyez à présent sincère ! » Sanglots. Moment gênant. Pour lui. Pour tous les gens présents dans la salle. « Avez-vous menti sur les incendies de Dunières ? Est-ce vous qui avez mis le feu ? ». « Je ne sais pas », répond-t-il. « Et pour le 26 décembre, la cigarette tombe-t-elle vraiment par accident ? » Silence aussi lourd que la révélation qui va suivre. « Non », avoue-t-il.

Quatre ans de prison ferme

Au terme de l’audience, la vice-procureure Marie Moschetti demande six mois d’emprisonnement ferme pour l’affaire des chèques sans provision. Pour l’ensemble des incendies, si les peines encourues en cas de récidive, comme c’est le cas sur cette affaire, peuvent atteindre 20 ans de prison ferme, la procureure demande quatre ans ferme, un suivi socio-judiciaire d’une durée de cinq ans avec une injonction de soins.
Le tribunal a délibéré à 22 heures et les réquisitions sont les suivantes : la relaxe pour les délits bancaires.
Le prévenu est reconnu coupable pour les émissions de chèques et condamné à trois mois de prison ferme avec interdiction de détenir un chéquier pendant cinq ans.
Également coupable concernant les incendies. Le prévenu écope pour cela de quatre ans d'emprisonnement avec suivi socio-judiciaire d'une durée de cinq ans, obligation de soins, interdiction de paraitre en Haute-Loire et interdiction de détenir une arme pendant cinq ans. 

Affaire suivie par Georges Roche et Nicolas Defay