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Un restaurateur du Puy appelle à la désobéissance civile

Par nicolas@zoomdici.com mer 20/01/2021 - 07:26 , Mise à jour le 19/11/2021 à 00:00

À travers une lettre postée sur Facebook, le patron du restaurant Paris Saïgon lance un véritable cri de résistance. Il s’oppose à l’autorité en annonçant l’ouverture au public de son établissement pour le dimanche 14 février à midi.

Bien que chaque client risque de payer une amende de 135 euros en plus de l’addition, quatre personnes ont déjà répondu à l’appel sur les 16 places prévues. « Le dimanche 14 février à midi, le restaurant Paris Saïgon sera ouvert en salle au public pour fêter la Saint-Valentin ensemble avec un menu douceur à 30 euros par personne, plus 135 euros d’amende, la taxe en vigueur pour notre liberté », est-il précisé. Alexandre Giffard, maître des lieux, a posté ce message sur les réseaux sociaux dimanche 17 janvier dans un élan de colère et de désarroi.

Un genou à terre

Avec son épouse et un employé, ils se sont installés sur le haut du Breuil, au Puy-en-Velay, il y a cinq ans. Ils proposent de la cuisine traditionnelle vietnamienne et des pâtisseries traditionnelles françaises dans un espace accueillant une trentaine de couverts en temps normal. « Comme tous mes confrères et consœurs, nous avons fermé du 15 mars au 30 avril 2020, rappelle-t-il. Nous avons ensuite ouvert avec de la vente à emporter jusqu’au 2 juin puis totalement pendant les mois estivaux ». Après avoir effectué récemment le bilan de l’année passée, il déplore une importante saignée faite à son restaurant. « Sur un an, nous avons perdu 30 % de notre chiffre d’affaires ! La vente à emporter sert à peine à payer le loyer mais ce n’est certainement pas une solution durable. Et ceci, en dépit des aides de l’État ».

« Je suis conscient de cette utopie »

Devant des journées et des mois à voir le secteur de la restauration s’effondrer lentement au rythme des annonces gouvernementales, Alexandre Giffard décide de réagir. « Il arrive que la désobéissance civile devienne une nécessité, commence sa lettre partagée sur les réseaux sociaux. Si la lutte contre la pandémie est obligatoire, elle ne doit pas se faire au prix des libertés fondamentales et d’une rupture d’égalité manifeste entre ceux qui profitent et ceux qui souffrent depuis maintenant dix mois. »

Alexandre Giffard explique l’objectif de ses mots : «Étaler sa colère en l’écrivant fait déjà du bien. Mais surtout, j’aimerais faire réagir un maximum les gens et voir qui est prêt à s’engager dans ce combat rien qu’en partageant cette publication ». Il continue : « Dans l’idéal, ce serait génial que tous les restaurateurs me suivent et ouvrent tous. Mais je suis conscient de cette utopie. Car les risques sont très importants par rapport à l’enjeu ».

Photo par Facebook du Paris Saïgon

Jusqu’au 13 février pour rallier un maximum de monde

Les risques peuvent en effet avoir des conséquences dévastatrices pour l’établissement en question. « Le client peut recevoir une amende de 135 euros, prévient Alexandre Giffard. De mon côté, je peux être confronté à une fermeture administrative pendant plusieurs mois, de grosses amendes et l’annulation des aides de l’État. Cela signifierait tout simplement la mort de notre restaurant. »

Il tient à préciser alors : « Aujourd’hui, je maintiens toujours ce projet d’ouverture pour le 14 février. Jusqu’au 13 février, on va essayer de mobiliser un maximum de gens. Si on est très nombreux, pourquoi ne pas aller jusqu’au bout ? Mais si on reste tout seul, nous seront contraints de faire marche arrière ».

« Ce serait un grand signal d’appel à la liberté si un maximum de restaurateurs se rallient à notre cause et si les clients suivent. Mais si nous sommes seuls et que l’on décide tout de même d’ouvrir, on risque de payer pour l’exemple afin que personne d’autres ne répliquent ce que l’on a osé faire ». Alexandre Giffard

Les clients conscients de l’amende

Parmi les quatre clients prêts à s’engager dans l’aventure, deux sont d’anciens professionnels du secteur. « Ces deux personnes ont perdu leur restaurant après le premier confinement, livre le patron du Paris Saïgon. Ils nous ont dit qu’ils n’avaient plus rien à perdre et qu’ils étaient prêts à payer l’amende de 135 euros, d’aller au poste de police mais qu’ils seraient là pour manger. »

Au-delà du défi lancé, Alexandre Giffard veut également dénoncer les injustices en cours au sein même de la branche restauration. « Pourquoi les restaurants qui accueillent les routiers et les agents du BTP (Bâtiment travaux Public, Ndlr) peuvent recevoir des clients et pas nous ? Car les lobbies du BTP et des routiers sont puissants et peuvent faire pression sur le Gouvernement. Tous les restos administratifs sont aussi ouverts ! Il y en a un juste derrière chez nous et on voit passer tous les gens qui travaillent dans les administrations venir ici, dans un lieu bondé où aucune norme sanitaire n’est respectée. Alors oui, ça fait râler ! Pourquoi nous interdire d’ouvrir alors que d’autres sont autorisés ? C’est absurde ! »

« Qu’ils arrêtent les aides et qu’ils nous laissent travailler ! »

« Mon sentiment est que cette crise a été très mal gérée par des technocrates qui ne savent comment faire avec leur pensée unique, partage Alexandre Giffard. Ils font des erreurs sans arrêt où nous sommes au centre des dommages collatéraux ». Il insiste en lançant un appel au Gouvernement en place : « Qu’ils arrêtent les aides et qu’ils nous laissent travailler ! D’autre part, jamais il n’a été prouvé que des foyers de contaminations ont pris naissance dans les restaurants. Il est prouvé néanmoins que la plupart des épicentres de contamination sont issus des réunions familiales. »

Alexandre Giffard sert les dents en commentant la période de Noël 2020. « On encourage les réunions de famille à Noël alors que tout le monde savait qu’on risquait de se prendre une vague de la pandémie juste après. Ce sont alors nous qui payons encore une fois les conséquences de ces décisions insensées ! »